Un télescope pour trouver d’autres Terre. Pas pour voir des petits hommes verts, mais pour au moins savoir s’ils ont ou non des chances d’être là-haut. Impressionnant, n’est-ce pas? C’est en tout cas ce que pensent des millions de lecteurs : rien que pendant la fin de semaine, plus de 1400 articles lui ont été consacrés.

Pensez qu’il y a 14 ans, seule une poignée de gens avait entendu les mots « planète extra-solaire ». Et aujourd’hui, c’est un des « hit » médiatiques sur Google. Tout ça pour un télescope qui scrutera quelque 100 000 étoiles, même pas pour les prendre en photo: juste dans l'espoir de détecter de minuscules variations dans leur brillance —le signe qu’une minuscule planète comme la nôtre est passée devant.

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Mais quand on a écrit 1400 fois qu’on cherche des « soeurs jumelles de la Terre », des « clones de la Terre » ou une « Terre 2.0 », on commence à être en panne de métaphores. D’où ce chroniqueur pince-sans-rire du Times de londres :

À présent que je lis l’annonce de la NASA d’un peu plus près, il apparaît que le but de la mission Kepler est de passer les prochaines années à scruter l’espace à la recherche de planètes qui pourraient abriter la vie; même si c’est une forme de vie très simple, comme Sarah Palin.

Certains n’ont pas peur des superlatifs : « Saint-Graal de l’astrobiologie », « nouvelle ère de l’astronomie », « commencement de la fin de notre solitude cosmique »... S’il ne réalise que le quart du dixième de tout cela, le télescope spatial Kepler se rangera assurément parmi les 10 missions spatiales les plus importantes de l’histoire, aux côtés du premier alunissage, des sondes Voyager, du télescope Hubble et du Spoutnik.

Et d’autres ressortent les vieux clichés philosophiques : « apprendre qu’une civilisation extra-terrestre aurait survécu à l’adolescence technologique serait inspirant », déclare cet auteur à la BBC.

Ceux qui veulent des informations sérieuses ne seront pas en manque, entre le New York Times, le New Scientist et l’Astrobiology Magazine. Mais ils risquent d’être frustrés par l’attente : après son lancement vendredi dernier, il y a de bonnes chances pour qu’on n’entende plus parler de Kepler avant des mois:

- Pour réaliser ces observations, il faut d’abord qu’il aille se planquer sur une orbite autour du Soleil, et non autour de la Terre. De cette façon, la Terre ne bloque pas la vue la moitié du temps. Cela lui permettra d’observer la même région du ciel de manière ininterrompue, pendant au moins trois ans et demi.

- Ensuite, il lui faut observer chaque étoile pendant une longue période, afin d’être sûr que tel ou tel changement de luminosité n’était pas une erreur d’observation. Si un changement se reproduit au même endroit et à la même fréquence —une fois tous les 365 jours, pour prendre un exemple tout à fait au hasard— pas de doute, c’est bien une planète.

Chose certaine, c’est le genre de nouvelle capable de faire rêver, en une année où le rêve n’est pas en surplus. Comme l’écrit le South China Morning Post :

Les États-Unis sont pointés du doigt comme les responsables de la crise économique mondiale, mais au moins, leurs scientifiques travaillent à répondre à la plus ancienne question de l’humanité : y a-t-il de la vie ailleurs, ou bien sommes-nous complètement seuls? Si le libre-marché occidental est gouverné par l’avidité, la science, semble-t-il, est toujours motivée par la curiosité et un profond sens du merveilleux.

Pascal Lapointe

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