Votre cheville enfle à vue d’œil, mais vous refusez de faire le pied de grue pendant huit heures à la clinique. Il suffit d’entrer deux ou trois mots clés dans les moteurs de recherche Google ou Yahoo! et vous avez trouvé le remède miracle. Du moins, c’est ce que vous pensez.

Nos voisins étasuniens sont nombreux à le penser aussi. Près de 61 % des adultes font d’Internet leur principale source d’informations concernant un problème de santé ou une maladie. L’information arrive du Pew Internet and American Life Project, la référence aux États-Unis des tendances de consultations en ligne.

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Wikipedia – La coqueluche des internautes

Plus étonnant encore, l’encyclopédie Wikipedia trône au palmarès des adresses les plus consultées. Vous avez bien lu, le portail collectif où les internautes fournissent tout le contenu reste la coqueluche dans quatre grands moteurs de recherche (Google, Google UK, Yahoo! et MSN). Pour toutes entrées liées à la santé, ce sont les articles de Wikipedia qui ressortent dans 70 % des cas. Selon une étude parue en juillet dans le Journal of the American Medical Informatics Association, ces résultats surpassent ceux de la bibliothèque en ligne de la très réputée National Institute of Health, l’équivalent étasunien de Santé Canada.

Dans cette analyse du Pew Internet and American Life Project, le tiers des personnes sondées déclarent avoir remis en question leur traitement après une recherche en ligne. Ces données inquiètent au plus haut point les spécialistes de la santé, puisque la plupart des informations médicales sur Internet sont jugées peu fiables. C’est du moins le constat qui filtre de la plupart des études internationales déjà parues cette année (Oral Oncology et l’European Journal of Integration, publiées respectivement en mars et mai 2009) ou à venir.

Chez nous, le Collège des médecins met justement la population en garde contre l’auto-diagnostic. Les gens ignorent les intérêts commerciaux des sites consultés, surtout la vente de produits, souligne son porte-parole Yves Robert. « Pour des personnes en phase terminale de certains cancers, Internet apparaît comme une solution miracle, où certains sites douteux encouragent le rêve et l’espoir de guérison. » Surtout parce que les entreprises sont peu scrupuleuses à vendre des produits aux allégations prodigieuses, poursuit le spécialiste.

Toubib 2.0

L’abondance d’information génère aussi un faux sentiment de sécurité, avance le Collège des médecins. « Les gens souhaitent surtout se faire confirmer leurs propres connaissances sur un sujet particulier », observe Yves Robert. Contrairement aux spécialistes de la santé, la majorité des utilisateurs n’a pas l’expertise de juger la validité scientifique des articles, selon lui. Pire, la surabondance des informations livrées sur Internet sème plus de confusion qu’autre chose. « Quand un patient arrive en consultation et confronte le médecin sur des informations glanées en ligne et remet en question son intervention, c’est la confiance entre le patient et le répondant qui en souffre le plus », continue le spécialiste.

Les médecins consultent aussi en ligne

Faut-il s’inquiéter des médecins étasuniens, qui seraient plus de 50 % à consulter Wikipedia pour des questions médicales? « Au Québec, les spécialistes de la santé ont toujours consulté les bases de données scientifiques, y compris des sources comme Wikipedia, souligne le spécialiste. Notre formation en épidémiologie nous enseigne d’abord à rester constamment informés des dernières études, puis à en critiquer leur validité. »

Pour le Collège des médecins, des bases de données fiables existent, comme l’index Medicus ou le New England Journal of Medicine. Or, ces sites sont spécialisés et encore une fois, le médecin est le mieux placé pour faire le tri et y traduire les informations, avance Yves Robert. Une approche qui ne date pas d’hier, souligne-t-il. Quand les charlatans se déplaçaient de village en village pour vendre leur granule, les médecins arrivaient en renfort pour séparer l’ivraie du bon grain. Internet n’est qu’un moyen sophistiqué d’utiliser des techniques d’information du Moyen-Âge, illustre Yves Robert. Et pour appliquer sa propre médecine, le Collège des médecins recommande la consultation des sites Internet les plus réputés — neutres — sur les questions de santé.

Wikipédia et la santé

La plupart des informations publiées dans Wikipedia sont fiables. Kevin Clauson, un pharmacologue de la Nova Southeastern University en Floride, pense que la politique éditoriale de l’encyclopédie s’avère efficace. « L’approche collaborative des internautes permet généralement de repérer et de corriger les erreurs factuelles très rapidement. » Le chercher a publié ses conclusions dans la revue Annals of Pharmacotherapy, en décembre dernier.

Si l’exactitude des informations n’est pas en doute, la plupart des articles consacrés à la santé demeurent incomplets. Kevin Clauson a interrogé Wikipedia sur des questions précises liées à certains médicaments. Il a obtenu une réponse dans seulement 40 % des demandes.

Les concepteurs de Wikipedia créeront sous peu un comité éditorial spécial pour encadrer le travail des collaborateurs. Désormais, le comité validera l’information consacrée aux personnalités avant publication. Les changements entreront en vigueur dans les prochaines semaines et toucheront en premier les articles publiés en anglais, ont annoncé récemment les responsables de Wikipedia.

Votre dossier en ligne

Le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) vient d’amorcer la deuxième phase du site médical MedforYou, le premier dossier personnel en ligne au Québec. MedforYou deviendra un outil convivial pour gérer ses rendez-vous, suivre étroitement sa médication et tenir à jour toutes ses informations médicales. Pour l’instant, la consultation du dossier médical reste réservée aux 300 participants recrutés en juillet dernier pour tester les différentes applications. Les responsables du site MedforYou comptent offrir l’accès au public dès le mois d’octobre 2009.

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