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La semaine dernière, on apprenait que le trou dans la couche d’ozone au-dessus de l’Arctique avait été plus gros que jamais cette année. Pourquoi cela, alors que nous avons interdit en 1987 les polluants responsables de ces dégâts?

Les CFC (chlorofluorocarbones) ont en effet été interdits cette année-là par le Protocole de Montréal, souvent cité en modèle comme le premier traité international de défense de l’environnement.

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Mais les CFC —qu’on utilisait jusqu’alors dans les frigos— ne sont pas des substances qui disparaissent facilement. Elles s’accumulent dans la haute atmosphère —la stratosphère— où elles mettent des décennies à se dissiper. Selon la NASA, le niveau de CFC dans la stratosphère n’a cessé de grimper qu’en 2000, et en 2008, il avait reculé de 3,8%.

Il en reste donc beaucoup. Or, c’est lorsqu’il fait froid que les CFC sont les plus destructeurs pour la couche d’ozone. Cela explique que, tout au long des années 1980 et 1990, on ait davantage parlé du trou dans la couche d’ozone au-dessus de l’Antarctique que de celui au-dessus de l’Arctique: les températures hivernales au-dessus du pôle Sud sont généralement plus basses qu’au-dessus du pôle Nord.

Mais pas cette année. L’hiver a été exceptionnellement froid, et long, dans la haute atmosphère au-dessus de l’Arctique, c’est-à-dire entre 18 et 20km d’altitude. «Il a fait continuellement froid de décembre jusqu’en avril, et ceci ne s’était jamais produit, depuis que nous prenons ces mesures dans l’Arctique», résume Michelle Santee, du Jet Propulsion Laboratory, coauteure de l’étude parue dans Nature le 2 octobre.

Qu’est-ce que ça signifie pour nous?

À court terme, la couche d’ozone a profité de l’été pour se reconstituer, mais jusqu’à quel point, personne n’en sait rien pour l’instant. À court terme également, le niveau des rayons ultraviolets (UVB) ayant atteint le nord de l’hémisphère nord aura certainement été plus élevé que d’ordinaire cette année (40% de plus, selon le météorologue Jeff Masters). Ce qui pourrait se traduire par davantage de cancers de la peau, et, dans l’année qui suit, à en croire une étude de 2003, par une réduction des deux tiers de la productivité de 300 plantes.

Et à long terme?

En temps normal, lorsque l’ozone absorbe les rayons UV, il réchauffe l’air environnant. Donc, moins d’ozone signifie, à cette altitude, un air plus froid... et du coup, les CFC détruisent encore plus d’ozone!

Or, à long terme, la stratosphère ne se réchauffera pas, et la faute en incombe à l’humain: plus nous envoyons de gaz à effet de serre là-haut, plus ceux-ci emprisonnent la chaleur près de la surface, contribuant ainsi au refroidissement là-haut de la stratosphère... et augmentant les risques de destruction de l’ozone.

Dans son analyse, Jeff Masters envoie un signe de reconnaissance à ceux qui seraient tentés de blâmer l’activité du Soleil, plutôt qu’humaine :

Puisque toute hausse de l’énergie solaire devrait réchauffer autant la basse que la haute atmosphère, la baisse observée des températures dans la haute atmosphère depuis 30 ans constitue un argument à l’encontre de l’hypothèse d’une responsabilité du soleil dans le réchauffement planétaire.

Le refroidissement observé dans la haute atmosphère est une forte indication que le réchauffement à la surface de la Terre est causé par les gaz à effet de serre d’origine humaine, qui emprisonnent la chaleur près de la surface et causent un refroidissement compensatoire en altitude. Cela devrait aussi nous donner une confiance additionnelle dans les modèles climatiques, puisqu’ils avaient prédit que ce refroidissement de la haute atmosphère se produirait.

Tous les futurs hivers de la stratosphère ne seront pas aussi longs que celui de 2010-2011. Mais chaque fois qu’il y en aura un, la couche d’ozone en subira les conséquences.

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