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«La fin du monde fait vendre et Hollywood l’a vite compris.» Ce sont sur ces mots que Bertrand Gervais, directeur de Figura et du Laboratoire NT2, a amorcé sa présentation sur le cinéma d’apocalypse lors du colloque intitulé Apocalypse(s) et imaginaires de la fin dans le cadre du 80e Congrès de l’Acfas, à Montréal.

«L’industrie cinématographique adore cette recette et elle multiplie les blockbusters apocalyptiques», mentionne le professeur au département d’études littéraires de l’Université du Québec à Montréal. «Si l’on pensait que la fin du monde avait été désamorcée par le passage au 21e siècle, qui s’est déroulé sans effusion de sang ni bogue informatique majeur, les attentats du 11 septembre ont permis une réactualisation de l’imaginaire de la fin.»

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Le site internet apocalypticmovies.com recense par décennie les films, toutes catégories confondues, qui traitent de la fin du monde. «Sur la page d’accueil, on trouve même un sondage qui demande aux internautes d’indiquer leur genre apocalyptique préféré. Ce sont les films post-apocalyptiques et les films de zombies qui ont la cote, car ils raflent à eux deux près de 71% des réponses», dénote-t-il.

Du littéral à l’allégorique

Le spectre des films apocalyptiques est très large en termes de spectacle et de mythes. De plus, les genres oscillent entre des apocalypses traditionnelles déployées à la grandeur du monde et des apocalypses plus intimes.

«On peut penser au navet que fut le film 2012 reposant sur la fin du monde annoncée dans le calendrier maya et qui se présente comme un banal film de catastrophes avec l’arche de Noé en prime. Cependant, les films The Tree of Life de Terence Malick et Melancholia de Lars von Trier offrent un bel exemple de réflexion sur la mort et le destin de l’humanité.»

Ces deux films offriraient, selon le spécialiste, des apocalypses intimes qui se tiennent en retrait des spectacles à grand déploiement. Ce que ces films de fiction perdent en spectacle, ils le gagnent en efficacité symbolique. «Leur propos n’est plus littéral, il devient allégorique», explique-t-il.

Le premier film nous apprend que quelle que soit notre intelligence, nous sommes aveugles à notre propre réalité, car celle-ci ne dépend pas de nous, et le second montre que les suites de l’échec de l’institution humaine, tel que le mariage, sont une fin de ce monde qu’elle exprime.

Unis face à la crise

La fin du monde serait une véritable obsession. L’incroyable masse de films répertoriés sur le site apocalypticmovies.com, plus de 90 depuis le passage au 21e siècle, en faisant foi. Si, individuellement, chacun des films puise à des formes traditionnelles de récit de fin du monde, regroupés, ils décrivent un autre état de l’imaginaire. «La répétition s’impose comme un trait dominant et l’interruption comme une façon de mettre fin au cycle», souligne le chercheur.

Alors que The Tree of Life représente l’imaginaire des temps modernes replié sur un schéma traditionnel chrétien qui fait de la fin un passage à un autre monde, Melancholia représente l’imaginaire de la fin contemporain, où elle est une interruption, point final.

«Les deux films se rejoignent dans l’exploration d’un présent qui, pour leurs protagonistes, s’inscrit dans un pur moment de crise. La seule façon de contrer l’interruption est donner un semblant de cohérence dans ce qui semble en être dépourvu», conclut le chercheur.

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