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Avec la crise étudiante, les jeunes Québécois semblent s’intéresser davantage à la politique. Les juges québécois de la Super Expo-sciences auraient-ils senti venir ce vent printanier – et érable – lorsqu’ils ont décerné leur 1er Prix au projet «Discours des mots ou des maux?» au jeune Benoît Corriveau?

C’est la première fois qu’un projet de sciences humaines et sociales remporte cette distinction. «Ça a été une grande surprise pour moi. Ça fait cinq ans que je participe aux expo-sciences avec des projets en physique, en biologie ou en santé et mon projet le moins “scientifique” me fait gagner», confie le jeune homme de 16 ans.

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L’étudiant de 5e secondaire au Séminaire de Sherbrooke s’est penché sur l’évolution du discours politique au cours des dernières années. Son projet présente une analyse lexicométrique des discours politiques du Parti Québécois (PQ) de Lévesque à Bouchard.

La lexicométrie, la science de l’étude statistique de l’usage des mots, permet d’identifier les mots les plus souvent employés dans un texte. Dans un discours, cette occurrence révèle les préoccupations de ceux qui les prononcent – même si l’on peut s’interroger sur le sens d’un même mot à des dizaines d’années d’intervalle!

Le jeune étudiant a étudié les discours inauguraux de René Lévesque (23e ministre du Québec), de Jacques Parizeau (26e ministre du Québec), et de Lucien Bouchard (27e ministre du Québec). Il a relevé le nombre de fois que revenaient les termes liés à la culture, l’économie et aux programmes sociaux.

«Mon hypothèse était que René Lévesque parlerait plus de culture, Jacques Parizeau plus d’économie et Lucien Bouchard serait plus préoccupé par le social. Pas du tout: les deux premiers avaient surtout en tête l’économie tandis que Lucien Bouchard a été celui à parler le plus de culture.»

Dans le contexte postréférendum de 1995, Lucien Bouchard a tenu à recréer une unité québécoise, surtout après les mots maladroits de Jacques Parizeau lorsque le «non» l’a emporté. Depuis, le Parti Québécois a placé la culture et l’identité au centre de sa stratégie, soutient l’étudiant.

Les mots à l’œil

Utilisant l’outil en ligne Online Text Analysis Tool, il remarque ainsi que le discours du PQ a évolué au fil du temps, selon le contexte référendaire, la personnalité au pouvoir et la réalité sociale.

Son analyse du choix de certains mots révèle aussi un appauvrissement du discours politique. Les «arts et lettres» deviennent ainsi la «culture». «Un terme générique plus large, mais aussi plus neutre», note l’étudiant.

Les mots génériques sont également plus nombreux dans les deux discours les plus récents (Parizeau et Bouchard). Au sein des discours, les phrases se raccourcissent: 37 mots pour René Lévesque contre 23 à 24 mots pour Jacques Parizeau et Lucien Bouchard.

«Jean Charest, c’est encore moins que ça: 20 à 21 mots par phrase», rapporte Benoît Corriveau, qui a la piqûre politique —même s’il se destine plutôt à la médecine– et écoute de manière critique tous les discours de nos politiciens. Et en ce moment, la grève étudiante le sert bien!

Les bons discours remportent des voix et les bons projets aussi. C’est ainsi que le jeune homme de 16 ans a décroché la plus haute distinction de la finale québécoise des Expo-sciences, mais aussi le Prix du réseau des Universités du Québec. Ce dernier couvre ses droits de scolarité jusqu’au doctorat!

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