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Dans la série «encore un génome»: voici celui du bonobo, notre cousin si pacifique. Un cousin qui, paradoxalement, n’aurait jamais été identifié comme une espèce différente, n’eut été de ses comportements à faire rougir un évêque.

Il ne faut pas croire certains gros titres qui disent qu’on aurait découvert «le gène du pacifisme» grâce au bonobo. Mais c’est néanmoins le seul des grands singes dont le génome pourrait un jour nous apprendre quelque chose sur des comportements, plutôt que sur de la physiologie —les dents, la marche sur quatre pattes, la taille du cerveau ou la physiologie du langage.

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Quiconque a lu sur les bonobos a en effet d’abord entendu parler de leur attrait pour le sexe, spécialement pour atténuer les conflits. Des chercheurs l’illustrent désormais par cette expérience: de la nourriture a été livrée à proximité d’un groupe de bonobos. Les individus se sont rapidement séparés par couples et se sont mis à baiser. Chez les chimpanzés, il y aurait plutôt eu une lutte de pouvoir pour s’approprier la nourriture.

Mais peut-on aller jusqu’à croire que le génome du bonobo contienne les secrets biologiques du pacifisme? Ce serait trop simple pour être vrai. Les gènes jouent certainement un rôle, nuancent Kay Prüfer et ses collègues depuis la parution de leur étude le 13 juin dans Nature . Mais relier un groupe de gènes à un comportement promet d’être ardu, quand on sait à quel point des facteurs aléatoires peuvent aussi modifier un comportement: la météo d'aujourd'hui, la présence de prédateurs, un déficit de nourriture, la maladie, la présence de bébés, etc.

Les bonobos habitent de plus un territoire relativement restreint, beaucoup plus restreint que celui des chimpanzés: une seule région, au sud de la rivière Congo, dans une forêt humide du Congo. Serait-il possible que la géographie ait eu quelque influence sur leur évolution?

Pour l’instant, cette équipe internationale de chercheurs, dirigée depuis l’Institut Max-Planck d’anthropologie de l’évolution, en Allemagne, a donc en main, grâce à ce génome, un outil de poids pour comparer les grands singes et nous, et les grands singes entre eux (le bonobo était le seul dont le génome n’avait pas encore été séquencé, et celui du chimpanzé remonte à 2004).

Ce que cet outil semble confirmer, c’est que nous partageons un ancêtre commun avec les grands singes qui serait vieux de 5 à 7 millions d’années. Mais bonobos et chimpanzés en partagent un qui remonte à moins de deux millions d’années, peut-être à peine plus d’un million. Ce qui remet sur la table la question de ce qui définit la ligne entre deux «espèces»: parce que, observés de l’extérieur, les bonobos ont toutes les apparences d’un chimpanzé.

La séquence complète de gènes est celle d’une femelle, Ulindi, vivant au zoo de Leipzig, et pour réduire la marge d’erreur, les généticiens ont utilisé des comparaisons avec des séquences de 19 autres bonobos ou chimpanzés.

En chiffres, bonobos et chimpanzés se révèlent aussi proches de nous l’un que l’autre: 98,7% de leur génome est identique au nôtre. Dans le détail, ça se complique. Il y a des séquences de gènes (1,6%) que nous ne partageons qu’avec le bonobo et il y en a d’autres (là aussi 1,6%) que nous ne partageons qu’avec le chimpanzé. Personne ne peut dire à quoi servent spécifiquement ces gènes mais aux yeux des chercheurs, l'ensemble révèle qu’une population assez diversifiée génétiquement a donné naissance à nos ancêtres et à ceux des grands singes, il y a 5 à 7 millions d’années: l’étude mentionne 27 000 individus.

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