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Lorsqu’Alexandre Guertin-Pasquier, du département de géographie de l’Université de Montréal, foule le sol du plateau sud-ouest de l’île Bylot, au Nunavut, il entend presque le bruissement du vent dans les pins… de la forêt vieille de 2,6 millions d’années qui gît sous ses pieds.

Sous les saules rampants qui composent aujourd’hui cette plaine se cache l’une des 20 forêts fossilisées connues de la planète. Mise à jour par Daniel Fortier, directeur du laboratoire de géomorphologie et géotechnique des régions froides, cette forêt est en fait devenue, avec le temps, une tourbière où sont ensevelis des troncs, des branches et du pollen d’arbres vieux de millions d’années.

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Dans les sédiments et les poignées de grains de pollen préhistoriques qui y sont enfouis, le jeune chercheur voit la réplique d’une forêt présente… 2000km plus au sud, là où les conditions climatiques plus chaudes sont favorables au pin, à l’aulne, l’épinette et le mélèze, des espèces jadis présentes à cette latitude.

Lorsque la forêt parle du climat

Cependant, dans cette zone venteuse et froide de l’hémisphère nord, les changements climatiques annoncent des promesses de renouveau. Un nouveau printemps pour cette forêt ancestrale pourrait-il poindre son nez?

«Pas à partir de nos échantillons», dit en riant le jeune chercheur. Parce que si des conditions climatiques plus favorables pouvaient voir une lointaine cousine reverdir cette plaine semi-désertique, l’ADN des plantes contenu ici dans le pollen s’avère une molécule facile à détruire, précise-t-il.

Durant la grande feuillaison de la première époque du Pleistocène –entre 3,5 et 2,5 millions d’années, avant la première des quatre glaciations majeures–, le climat était plutôt chaud. Une hausse de 15 degrés Celsius, pour atteindre une moyenne annuelle d’environ 0 degré, pourrait possiblement aider à la renaissance d’un même type de forêt.

«On peut effectivement penser que nos petits-enfants pourraient voir le retour d’une forêt sur cette terre et assez tôt si le réchauffement se poursuit», avance le jeune spécialiste en analyse pollinique. Actuellement, la moyenne des températures varie de 10 à 15 degrés durant la journée en été à -30 degrés lors de la nuit hivernale.

Sans doute, verront-ils aussi grouiller les coléoptères et autres insectes et croiseront-ils aussi des castors, de lointains cousins de l’espèce d’alors… ceux-là mêmes qui ont laissé leurs traces de dents sur les troncs fossilisés.

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