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Ce qui frappe d’abord, ce sont les couloirs. De longs couloirs blancs avec une volée de portes, à droite et à gauche, suivis d’autres corridors et d’allées. Un vrai labyrinthe qui laisse poindre un peu d’angoisse: la possibilité de se perdre sur le vaste territoire de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal.

Plus connu sous son ancien nom, le «Louis-H. Lafontaine», l’établissement de soins psychiatriques, célèbre actuellement 140 ans. La petite ville longue de près de 2km a déjà accueilli près de 6 200 patients —en même temps— à son sommet, entre le début du siècle dernier et les années 1960. Pour y circuler, un petit tramway électrique reliait d’ailleurs les différents pavillons.

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«C’était alors un asile géré par les sœurs où il y avait peu de soins médicaux. Ça a changé en 1952 avec l’arrivée des premiers médicaments qui sortaient les patients de leur psychose», raconte André J. Luyet, directeur des affaires médicales et cliniques de l’Institut.

Puis l’établissement s’est transformé en diverses cliniques externes avec une expertise professionnelle et des services d’accompagnement. L’ouverture de l’hôpital de jour et de la clinique de gérontopsychiatrie annonçait, dès 1997, ce qu’on appelle encore pudiquement la «désinstitutionnalisation».

Beaucoup moins de patients vivent aujourd’hui entre ces murs : environ 300 personnes y séjournent au sein de l’unité de réadaptation, pour des périodes variant entre 30 jours et 18 mois. À ce nombre, s’ajoutent 2000 places en résidences (maisons-relais, appartements supervisés, etc.) destinées à une meilleure intégration sociale.

Le nouveau nom reflète d’ailleurs le virage qu’ont pris les soins en santé mentale: moins d’internement, plus de cliniques externes et plus de recherche. Les directives du Plan d’action québécois en santé mentale misent ainsi sur l’implication des proches, la participation des «utilisateurs», la mise en place de guichets d’accès et de services de crise. «On a vidé l’hôpital. Notre fonction a aussi bien changé, loin des dortoirs à 30 lits et de la marginalisation que cela entrainait d’être hospitalisé ici», relève d’ailleurs le Dr Luyet.

Déverrouiller les portes

En changeant son nom, l’établissement recherche aussi plus de reconnaissance et une meilleure intégration dans sa communauté. L’imposant centre de recherche qu’il est devenu —50 médecins psychiatres, 600 000 heures de stage, etc.— lutte toujours contre les mythes, la méconnaissance des maladies mentales et une image monolithique de dangerosité des patients rapportée par les médias.

Avec des portes ouvertes, un jardin communautaire partagé entre le voisinage et les patients, des activités de sensibilisation, l’Institut veut changer le regard sur les maladies mentales. Soit des «des maladies comme les autres» dont il est possible de se rétablir.

Alors que 1% de la population québécoise aura besoin au cours de sa vie de soins médicaux de ce type, l’Institut fait la promotion d’une image inclusive du malade mental. Une vision de «pleine citoyenneté» qui pousse les dirigeants à déverrouiller les portes et paradoxalement, à réduire en même temps certaines activités de réinsertion sociale pour les patients.

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