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Il y a 35 ans, une idée qui, à l’époque, avait pu paraître farfelue, allait germer parmi les médias québécois : une agence de presse spécialisée en science, destinée à alimenter les petits médias en nouvelles scientifiques.

Depuis sa fondation, l’Agence a bien changé : d’un service de nouvelles desservant l’ensemble des hebdos régionaux à ses débuts, elle est devenue, depuis l’avènement d’Internet, un imposant site d’informations scientifiques, rejoignant des centaines de milliers de passionnés chaque année, dont une importante proportion venant de France.

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Nous vous proposons d’ici le 22 novembre prochain, jour de célébration de ses 35 ans, de passer en revue certains de ses bons coups… et d’autres curiosités.

La féroce bataille « beurre versus margarine » se terminera-t-elle avec un net vainqueur?

Quand Paul et Jeanne Tremblay écoutent leurs téléromans favoris. Ils assistent malgré eux à la « guerre des gras » - beurre vs margarine - qui se joue entre les épisodes. Après une fraîche jeune fille qui loue les délices du beurre, c'est une randonneur au visage avenant qui chante ceux de la margarine. Entre ces deux personnes apparemment aussi en santé l'un que l'autre, les Tremblay aussi bien que leur médecin ont de la difficulté à faire la part des choses.

Beurre ou margarine?

« Quand une personne souffre d'un excès de cholestérol ou d,un excès de gras dans le sang, ou encore qu'elle est sujette à l'arthérosclérose, tous s'accordent pour lui prescrire une diète pauvre en gras saturés et en cholestérol », explique le Dr Jean Davignon, de l'Institut de recherches cliniques de Montréal. La controverse commence quand certains médecins et nutritionnistes cherchent à convaincre utout le monde d'adopter cette diète par mesure préventive. La polémique est d'autant plus virulente que des enjeux économiques importants y sont impliqués.

Certains tenants du beurre ont essayé de discréditer les acides gras polyinsaturés en émettant l'hypothèse qu'ils seraient potentiellement cancérigènes. D'autres ont affirmé qu'en grande quantité, ils causaient une déficience en vitamine E. Ces hypothèses sont maintenant rejetées par la communauté scientifique, soutient le Dr Davignon.

Combien de cholestérol?

Un des sujets de discussion importants consiste à définir quel est le taux optimum de cholestérol dans le sang. « Si on place la limite supérieure à 240 milligrammes par décilitre (mg/dl), 5 à 10 % de la population souffre d'hypercholestérolémie. Mais en fixant la norme à 150 mg/dl, c'est 30% de la population qui est anormale!, explique le Dr Davignon. On peut estimer que le taux de cholestérol idéal pour un adulte se situe entre 130 et 190 mg/dl. « Et plus il est bas à l,intérieur de ces limites, mieux on se porte! », ajoute-t-il.

Les Américains ont un taux moyen d'environ 230 mg/dl. Selon Suzanne Lussier-Cacan, chercheuse elle aussi à l'Institut de recherches cliniques de Montréal, cette moyenne n'est pas nécessairement normale, elle n'est que caractéristique d,une population où une personne sur deux meurt d'une maladie cardio-vasculaire. Ce taux serait nettement anormal chez les Japonais, dont le cholestérol moyen se situe autour de 150 mg/dl, et chez qui l'incidence des maladies coronariennes est très faible.

Les polyinsaturés

La forte incidence de maladies cardio-vasculaires en Amérique du Nord dépend de notre riche alimentation en calories, en graisses saturées et en cholestérol. C'est pourquoi des chercheurs recommandent de ne pas manger plus de trois œufs par semaine et de substituer partiellement les graisses saturées par des grasses polyinsaturées.

Ces dernières sont intéressantes principalement à cause de leur contenu en acide linoléique. Cette substance est essentielle à l'organisme et elle réduit autant le cholestérol que les triglycérides dans le sang. Elle a de plus un effet inhibiteur sur la formation de caillots dans les artères et elle réduit la pression artérielle chez les sujets hypertendus. Les huiles plus riches en acide linoléique sont les huiles de maïs, de tournesol, de soya et de carthame.

La brique de la cellule

Mais à quoi sert-il, ce fameux cholestérol dont la trop grande abondance nous est si néfaste? « Le cholestérol est à la cellule de que la brique est à l'édifice », affirme M. Simon-Pierre Noël, biochimiste à l'Université de Montréal. « C'est pour l'organisme un matériau si important qu'il en fabrique lui-même lorsque l'alimentation n'en apporte aps assez », ajoute-t-il. Mais quand il est trop abondant, l'organisme ne sait pas toujours comment s'en débarrasser efficacement : on risque alors l'arthérosclérose.

Trop de LDL

Le cholestérol se présente dans le sang sous forme d,un complexe appelé LDL. « A peu près tous les animaux possèdent trois à quatre fois moins de LDL que l'homme », soutient M. Noël. Aussi l'être humain est-il à peu près le seul à souffrir d'hypercholestérolémie. « Si on avait tout juste le quart des protéines LDL, ajoute-t-il, on en aurait encore assez pour bien vivre. Le fœtus et le jeune enfant fonctionnent naturellement avec cette portion réduite de LDL. Ce n'est qu'après l'âge de deux ans qu,un enfant adopte un taux de LDL propre aux humains et exagérément élevé comparé aux autres espèces animales. »

Chez la femme avant la ménopause, il y a proportionnellement moins de LDL que chez l'homme, ce qui explique qu,elle soit moins sujette que lui à l'arthérosclérose.

On a réussi à réduire l'arthérosclérose chez les rats en les soignant avec des hormones femelles. Mais chez les hommes, les effets secondaires de ces hormones ne contrebalancent pas les bénéfices!

- Article rédigé par Carole Thibaudeau, 7 juin 1983

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