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Si l’éducation est la cause de cet enlèvement de plus de 250 jeunes femmes au Nigéria, l’Occident devrait-il en profiter pour investir dans l’éducation?

«Plus de 200 filles réduites en esclavage parce qu’elles avaient l’audace de vouloir devenir professeures ou médecins.» C’est la phrase-choc par laquelle le chroniqueur du New York Times Nick Kristof concluait sa chronique le 4 mai. Une phrase-choc qui traduisait aussi un sentiment d’impuissance: il a fallu deux semaines avant que les médias occidentaux ne commencent vraiment à s’intéresser à cette histoire. L’histoire d’un raid sur une école pour filles mené dans la nuit du 15 avril par des fanatiques religieux —des filles de 15 à 18 ans qui, en dépit du danger qu’elles savaient courir, étaient revenues à cette école une dernière fois, afin d’y passer leurs examens de fin d’année.

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Si le gouvernement nigérian a choqué par son indifférence, les gouvernements étrangers n’ont guère fait mieux, et les médias ont, dans un premier temps, consacré davantage d’espace aux spéculations sur l’avion MH370 tombé dans l’océan Indien.

Jusqu’à ce qu’un mouvement de fond sur les médias sociaux ne secoue les esprits: sur Twitter, le mot-clic #BringBackOurGirls, lancé par un avocat nigérian, a dépassé le cap du million le 6 mai. Le 9 mai, plus de 775 000 personnes avaient signé une pétition sur Change.org. Des familles sont descendues dans la rue au Nigéria, un événement rare. Cette semaine, le président Obama annonçait l’envoi là-bas d’une équipe d’experts enquêteurs —alors même qu’on apprenait l’enlèvement de huit autres filles.

La «protestation» numérique a donc eu le poids de son nombre, mais elle n’en reste pas moins limitée, écrit la blogueuse Jill Filipovic dans The Guardian : «toute opportunité pour aider au problème plus large auquel fait face le Nigéria sera perdue, si l’effort commence et s’achève avec les filles kidnappées».

Et ce large problème, c’est l’éducation. S’il n’y avait qu’un geste de protestation que les Occidentaux pourraient poser, ce serait d’investir massivement dans l’éducation, et spécialement l’éducation pour les filles.

  • Il existe par exemple une Campagne de financement pour l’éducation des femmes en Afrique, Camfed.org.
  • Il existe également une initiative des Nations Unies pour l’éducation des filles.
  • Et il existe une initiative pan-africaine, FAWE, visant à élargir les portes d’entrée pour les filles, de la maternelle à l’université.

Le groupe fanatique en question, Boko Haram, sévit depuis des années. Rien qu’en 2013, il aurait à son compte des attaques contre 50 écoles et le meurtre de plus de 100 écoliers et 70 professeurs ou adultes. Le rapport d’Amnistie Internationale d’où proviennent ces chiffres s’intitule Education under Attack in Nigeria . Et le mantra de ces fanatiques est on ne peut plus clair: «restez loin de l’école ou bien nous allons vous tuer».

Un mantra familier aux oreilles de Malala Yousafzai, 16 ans, cette Pakistanaise qui, en 2012, a survécu miraculeusement à une balle à la tête, parce qu’elle militait pour l’éducation des filles. Elle en est devenue une vedette internationale, qui fait plus mal aux Talibans que bien des bombes. Si les événements des deux dernières semaines au Nigéria pouvaient avoir une retombée positive, ce serait l’émergence de dizaines de Malalas.

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