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Coup de tonnerre en Europe. Après une consultation publique de trois mois, le Ministère de la Santé britannique vient d’annoncer qu’une nouvelle technique de procréation assistée faisant appel à l’ADN de trois personnes pourrait être légalisée en avril prochain.

Un cas de manipulation génétique unique qui suscite espoirs parentaux et controverses scientifiques.

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L’objectif de la procédure médicale? Utiliser l’ADN sain d’une troisième personne pour éviter la transmission par la mère de graves maladies génétiques d’origine mitochondriale comme des dystrophies musculaires, des affections cérébrales ou cardiaques par exemple. Au Royaume-Uni, 6500 enfants par an sont touchés et 1 personne sur 4000 est concernée.

Développée à l’Université de Newcastle par des scientifiques du Wellcome Trust centre for mitochondrial research, la technique expérimentale, appelée transfert mitochondrial, consiste à remplacer l’ADN défectueux du bagage génétique de la mère trouvé dans ses mitochondries (sorte de batteries qui alimentent les cellules du corps humain) par l’ADN sain d’une femme donneuse.

La quantité d’ADN mitochondrial du donneur —la donneuse en l’occurrence— est infime: 37 gènes, l’équivalent d’environ 0,2% du patrimoine génétique humain. Ces gènes des mitochondries n’ont qu’un rôle métabolique, à savoir fournir de l’énergie aux cellules. Ils ne participent en rien à l’apparence, à la taille ou aux traits de caractère de l’enfant à venir.

Mais, avant la légalisation de la technique par le Parlement britannique en avril 2015, un panel d’experts se penchera sur l’innocuité de la procédure médicale pendant que l’Autorité britannique pour la fertilisation humaine et l’embryologie (HFEA), elle, développera un protocole d’approbation pour les familles qui souhaiteraient avoir recours au transfert mitochondrial. Et, ce ne seront pas les deux seuls obstacles à franchir.

Une décision controversée

Au Royaume-Uni, des scientifiques remettent en cause cette approche de transfert mitochondrial. Certains publiquement comme Ted Morrow, biologiste de l’évolution à l’Université du Sussex. Dans les pages du quotidien The Guardian, il explique les raisons de ses réticences. L’une d’entre elles: le fait que le transfert mitochondrial tenté à l’échelle expérimentale sur des souris modifiait leur métabolisme ou leurs capacités cognitives. Sa recommandation? Combler le manque de données expérimentales sur des espèces plus proches biologiquement de l’homme avant de passer aux tests cliniques sur l’humain.

Pour d’autres spécialistes de la fertilité et de ses traitements, le fait d’insérer de l’ADN sain du donneur dans des embryons est problématique : le nouveau matériel génétique est non seulement porté par l’enfant à naître, mais aussi par toute sa future descendance. Étant donné que les effets secondaires de la procédure sont inconnus, les enfants conçus de cette manière devront faire l’objet de suivis à très long terme.

Certains experts accusent ainsi le Ministère de la Santé de minimiser la portée d’une technique qui, pour la première fois dans l’histoire médicale, permettra la modification de l’ADN des générations à venir. Selon eux, la frontière éthique vient d’être passée. Dès lors, ils n’hésitent plus à parler de bébés génétiquement modifiés, de bébés à la carte!

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