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Une désillusion face à la société. Et un désir très fort de se joindre à des gens qui partagent les mêmes idées. Ce sont deux des principales racines de l'extrémisme que les chercheurs commencent à identifier.

En soi, ces deux racines semblent banales dans le contexte actuel: ce ne sont pas des racines propres à l'extrémisme islamiste, mais à tous les extrémismes du monde, explique dans Nature le psychologue John Horgan, de l’Université du Massachusetts:

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En surface, ça semble ne faire aucun sens que de comparer un groupe comme l'IRA (armée républicaine irlandaise) avec Al-Qaida. C'est seulement quand on regarde de près qu'on réalise qu'ils ont beaucoup plus en commun.

Ces psychologues et anthropologues n’en sont d’ailleurs plus à simplement énumérer les dispositions psychologiques. Une équipe menée par la criminologue britannique Noemie Bouhana tente par exemple de mettre au point un modèle informatique qui permettrait de prédire les futurs attentats terroristes... géographiquement.

Autrement dit, identifier les zones où les risques sont plus élevés. Ce qui serait déjà davantage que l’équipe d’Erin Miller, à l’Université du Maryland, dont la base de données (Global Terrorism Database) a été construite dans l’espoir de prédire les risques d’une attaque comme celle de Paris, ou comme celle du 11 septembre 2001... quelque part dans le monde.

Mais pour ce qui est de prédire avec précision un lieu, ou encore un individu, on est dans la science-fiction. Deux études publiées simultanément en décembre recommandent, par le biais de la psychologie et de la sociologie, ce que les policiers font depuis longtemps: surveiller les groupes radicalisés dans l’espoir d’identifier ceux qui vont passer à l’acte. En vertu du principe voulant que l’extrémisme, chez une personne, ne naisse pas uniquement de son passé, mais de son désir de s'intégrer à un groupe et d'en obtenir une forme de reconnaissance.

Aucune de ces recherches ne suggère toutefois qu'on serait capable d'identifier ce qui fait la différence entre un individu qui s’identifie à un groupe extrémiste et celui qui passera à l’acte —l’infime minorité. Dans sa dernière édition, la revue britannique Nature présente quatre reportages sur ce thème, qui convergent tous vers une même conclusion: «les tentatives pour prédire des attaques terroristes atteignent leurs limites».

Pendant ce temps, la réponse politique, elle, n’attend pas. Et s’il y a une chose qu’on peut en revanche prédire avec assurance, c’est que la réponse politique sera inadéquate. Comme l’écrit Erwann Michel-Kerjan, directeur du Centre d’analyse de risque à l’Université de Pennsylvanie :

Les situations post-crise sont typiquement mal gérées. Les politiciens répondent à la demande que «quelque chose doit être fait» (ou donne l’impression d’être fait). Des solutions à court terme sont rapidement présentées pour réagir à la crise, jusqu’à ce que l’attention du public se détourne vers autre chose.

Exemples récents: suggérer un renforcement des lois anti-terroristes. Ou un resserrement de la surveillance électronique, comme l’a suggéré le premier ministre britannique. «Une vision simpliste des événements de Paris, poursuit Michel-Kerjan, serait que deux frères ont été radicalisés.» Alors qu’une gestion avancée du risque consiste à relier différentes tendances, souvent perçues, à tort, comme séparées.

En France, cela inclut des questions non résolues d’immigration et une réduction des forces policières —conséquence directe de la crise fiscale. À des milliers de kilomètres, cela inclut les conflits au Moyen Orient qui ont donné naissance à un djihadisme extrême et incontrôlé. Tuer des journalistes permet aux terroristes de bénéficier d’une couverture journalistique en continu, qui agit comme amplificateur social pour répandre la peur globalement. Ces facteurs économiques, géopolitiques, sociétaux et technologiques, se renforcent l’un l’autre.

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