Pilules

La réforme du système de santé, pilotée par Donald Trump et destinée à remplacer la couverture d’assurance américaine mise de l’avant par l’ancien président Barack Obama, s’avérerait une catastrophe pour la crise des opioïdes, rapporte-t-on dans un article du magazine Wired.

Révélé récemment, le projet de loi du Sénat républicain ne fournirait plus aucune couverture d’assurances aux Américains et laisserait le champ libre aux États qui voudraient renoncer à soutenir financièrement les patients qui auraient besoin de services essentiels.

En d’autres mots, les coupes annoncées au programme Medicaid, une assurance-maladie couvrant les Américains les plus vulnérables et défavorisés, pénaliseraient directement les 2,5 millions d’Américains aux prises avec une dépendance aux opioïdes.

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L’expansion du programme Medicaid, qui assure actuellement 20 millions de personnes, comptait sur un budget total de 840 milliards de dollars pour les 10 prochaines années.

Certains sénateurs des États les plus touchés par la crise des opioïdes (Kentucky, Michigan et Ohio) souhaitaient conserver un fonds séparé de 45 milliards de dollars sur 10 ans, destiné à la prévention et au traitement de cette dépendance. S’il est adopté, le nouveau projet de loi prévoit plutôt allouer 2 milliards de dollars, pour la seule année 2018, à se partager entre les 50 États américains.

Le sénateur démocrate de l’Ohio, Sherrod Brown, décrie d’ailleurs ce projet de loi : « Il fait disparaître l’outil numéro 1 que nous avons pour combattre la crise des opioïdes : le programme Medicaid ». L’an dernier, l’Ohio avait déboursé 939 millions de dollars pour combattre cette crise, dont une large portion des dépenses (70 %) avaient été couvertes par Medicaid.

Pour l’instant, les députés devant se prononcer sur ce projet de loi semblent dans une impasse, le président américain Donald Trump leur ayant de son côté conseillé d’abroger la loi précédente pour en rebâtir une nouvelle plus en accord avec ses vues conservatrices. Le suspens devrait encore durer une partie de l’été.

De criantes statistiques

Le journaliste German Lopez révèle dans un article du magazine Vox un diagnostic préoccupant : 8 fois plus de personnes souffriraient de dépendance aux opioïdes, en comparaison au nombre de patients recevant un traitement médical. Il rapporte aussi les données d’une nouvelle étude de la compagnie d’assurance Croix-Bleue (Blue Cross Blue Shield), menée auprès de ses clients, démontrant une hausse de 493 % du nombre de personnes révélant avoir souffert d’un problème de dépendance aux opioïdes entre 2010 et 2016.

En parallèle, les traitements n’auraient pas suivi. En effet, une hausse des traitements de 65 % en 7 ans aurait seulement été observée auprès des personnes dans le besoin, et ce, même si cette dépendance s’avère 40 fois plus addictive que celle à l’héroïne.

Pour appréhender l’importance de cette crise, il faut se souvenir, qu’en 2015 seulement, 52 000 Américains sont décédés d’une surdose liée aux drogues, dont les deux tiers (33 000 personnes) concernaient la consommation d’opioïdes. C’est plus que les décès liés aux accidents de voiture (38 000 personnes), que ceux liés aux armes à feu (36 000 personnes) et que le nombre de personnes décédées du VIH (43 000 sont mortes lors du pic de 1995).

La moitié (51 %) des prescriptions d’opioïdes distribuées aux États-Unis — pour un total de près de 60 millions de prescriptions annuellement — visent un adulte avec un trouble de l’humeur, selon une nouvelle étude, rapportée dans STAT News. Les auteurs de cette étude s’étaient intéressés au traitement de la douleur au sein de cette population vulnérable.

Enfin, les prescriptions d’opioïdes ont quadruplé aux États-Unis entre 1999 et 2015, et durant cette période 183 000 personnes sont décédées d’une surdose liée à la prescription d’opioïdes, selon les Centres américains de prévention et de contrôle des maladies.

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