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Les scientifiques ont donc annoncé en grande pompe avoir découvert sept planètes d’un seul coup autour de l’étoile TRAPPIST-1, toutes « semblables à la Terre », dont trois dans la « zone habitable ». Un grand pas en avant pour l’astronomie, mais aussi la porte ouverte à une série de pièges. Sachez les identifier avant de partager sur les réseaux sociaux toute nouvelle sur une exoplanète !


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Piège no 1 : « zone habitable » ne veut pas dire habitable

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La conférence de presse de la NASA n’était pas terminée que « les formes de vie » dominaient déjà les échanges. Certes, au moins trois des sept planètes se trouvent à la distance optimale de leur étoile pour abriter la vie, cette fameuse « zone habitable ». Le problème, c’est qu’autour de notre Soleil, Vénus et Mars aussi sont dans la « zone habitable ». Et pourtant, aucune n’accueille des formes de vie. Il y a donc d’autres critères à considérer :

  • Y a-t-il une atmosphère ? Ce n’est qu’en 2016 que, pour la première fois, des astronomes ont identifié une atmosphère autour d’une planète extrasolaire. Ce type de détection, impensable il y a quelques années, commence à être à la portée des instruments.
  • Que contient cette atmosphère ? À titre d’exemple, une des lunes de Saturne, Titan, est entourée d’une épaisse atmosphère d’azote et de méthane, un mélange pas vraiment sympathique à la vie.
  • Y a-t-il de l’eau ? L’eau est l’ingrédient idéal pour rassembler les molécules qui forment les « briques » de la vie, et encore faut-il qu’elle soit à l’état liquide, c’est-à-dire d’une température se situant entre 0 et 100 degrés Celsius. En théorie, une analyse de l’atmosphère — si elle existe — de ces planètes permettrait d’y détecter de la vapeur d’eau, ce qui serait un grand moment pour l’astronomie.

Comme cette étoile est dans notre banlieue cosmique (à « seulement » 39 années-lumière), la découverte de sept planètes d’un seul coup attirera à coup sûr l’attention des astronomes pour les années à venir. Le télescope spatial James-Webb, qui doit être lancé en 2018, serait en théorie capable d’analyser leurs atmosphères.

Piège no 2 : détectée ne veut pas dire photographiée

C’est en 1995 qu’on annonçait la première découverte d’une planète extrasolaire. Depuis, on en a identifié près de 2000, et 3000 autres « candidates » sont en attente de confirmation. Mais dans la très grande majorité des cas, c’est une détection indirecte : seule une petite poignée de planètes a été photographiée. Par conséquent, tout ce qu’on sait de ces planètes — masse, dimension, température, etc. — provient de mesures indirectes ou de déductions.

Une détection indirecte peut se faire de deux façons. D’une part, les oscillations naturelles de l’étoile  peuvent trahir qu’un « objet » plus ou moins massif lui tourne autour, la « tirant » tantôt d’un côté, tantôt de l’autre. D’autre part, une baisse de luminosité de l’étoile peut trahir que quelque chose est passé entre elle et nous — c’est la méthode dite du « transit », et c’est celle qui a permis l’identification de ces sept planètes. Mais il s’agit de variations infimes, qui restent difficiles à déterminer lorsque la planète est aussi petite que la Terre. Incidemment, c’est la première fois que les astronomes détectent un ensemble de sept planètes aussi petites : elles font entre 0,4 et 1,4 fois la masse de la Terre.

Piège no 3 : « planète similaire à la Terre » ne veut pas dire... planète similaire à la Terre !

Lorsque la chasse aux planètes extrasolaires a mis la main sur ses premières proies il y a 20 ans, il s’agissait de planètes géantes, et même très géantes : plusieurs faisaient plus de 10 fois la taille de Jupiter — qui à elle seule pourrait contenir plus d’un millier de Terre. Le terme « planète similaire à la Terre » (Earth-like planet) était donc davantage une ambition lointaine qu’une vraie définition : l’espoir qu’un jour, la technologie permettrait de détecter des planètes « rocheuses » (comme Vénus, la Terre et Mars), qui sont beaucoup plus petites que les planètes gazeuses (comme Jupiter ou Saturne). Mais détecter une planète d’une taille similaire à la nôtre n’est qu’un point de départ. Bien que l’animation créée par la NASA pour son annonce du 22 février montre une des sept planètes aussi bleues et blanches que la nôtre, c’est de la pure spéculation : on ignore tout de son atmosphère, de sa surface et de sa température.

Le mot de la fin 

Malgré ces pièges, le Détecteur de rumeurs vous encourage à partager cette nouvelle. Mais privilégiez les sources qui se donnent la peine d’expliquer à celles qui se lancent dans des spéculations plutôt hasardeuses.

Ci-dessous : animation de la NASA, qui est justement un exemple d'une pure spéculation. À quoi pourrait ressembler la surface de la 4e planète du système TRAPPIST-1.

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