DDR-sucre-Et-Acne

De 80 à 95 % des adolescents ont des boutons d’acné. Si l’on sait que les hormones sont les grandes responsables, on cherche depuis toujours à faire porter une partie du blâme à l’alimentation. Les ados accusent le chocolat, le fast-food et les boissons gazeuses. Mais qu’en est-il vraiment ? Le Détecteur de rumeurs s’est penché sur la question. 


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« On a de plus en plus de preuves scientifiques solides que l’alimentation influence l’apparition et la gravité des lésions d’acné », confirme Catherine McCuaig, dermatologue à l’Hôpital Ste-Justine et professeure de clinique à la Faculté de médecine de l'Université de Montréal. « Mais ce ne sont pas tous les aliments qui affectent l’acné, et pas chez tout le monde ».

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Selon la plupart des études scientifiques, le sucre est l’ennemi numéro un de la peau. Mauvaise nouvelle, car le sucre, connu sous le nom de glucides en langage alimentaire, se cache partout — ou presque — dans notre nourriture occidentale !

Gare aux aliments trop riches en glucides !

C’est une étude du professeur Loren Cordain, en 2002, souvent citée depuis, qui a relancé l’intérêt de la communauté scientifique pour l’impact possible de l’alimentation sur l’acné. Le chercheur américain, qui avait observé l’absence d’acné chez des populations non occidentalisées de la Papouasie-Nouvelle-Guinée et du Paraguay, a comparé leurs habitudes alimentaires avec celles des Occidentaux. La différence majeure ? L’apport très élevé en glucides (ou sucres) de l’alimentation occidentale, que l’on retrouve dans les produits transformés : céréales sucrées, pâtisseries, pain blanc, biscuits, boissons sucrées, pâtes alimentaires... Le sucre est alors tombé dans la mire des chercheurs, partout dans le monde.

Certains ont par exemple comparé des habitants de régions rurales non industrialisées avec des citadins. Résultats : les premiers se protégeraient effectivement de l’acné par leur alimentation faible en glucides. Selon cet article paru en 2010 sur Skin Therapy Letter, un site écrit par des dermatologues pour leurs collègues, les populations qui changent leur alimentation locale pour de la nourriture dite occidentale voient apparaître des problèmes d’acné. Ce fut le cas notamment pour les Inuits canadiens lorsqu’ils ont augmenté leur consommation de boissons gazeuses, de bœuf, de produits laitiers et de nourriture industrialisée.

L’explication ? Des chercheurs américains ont démontré dans une revue de littérature en 2009, qu’une alimentation riche en glucides exige du pancréas qu’il fournisse plus d’insuline pour maintenir un taux de sucre idéal dans le sang, ce qui fait aussi augmenter la production de l’hormone IGF-1. Un haut niveau de cette hormone dérègle les glandes sébacées (à la base de chaque poil) qui deviennent enflammées et sécrètent du sébum en excès. Les pores de la peau se bouchent et les boutons d’acné apparaissent.

Les chercheurs ont alors voulu savoir ce qui se passait chez les gens qui diminuaient leur consommation de glucides. Une enquête américaine de 2014 cite notamment une expérience qui a noté une amélioration nette de l’acné chez des Australiens ayant consommé des aliments faibles en glucides pendant 12 semaines. L’article de 2010 sur Skin Therapy Letter met lui aussi de l’avant des essais en double aveugle qui concluent que les individus suivant un menu faible en glucides constatent une amélioration de leur acné.

Pour le moment, les données scientifiques ne précisent pas combien de temps met la peau à réagir à un aliment ou à un changement d’alimentation. Manger de temps en temps des denrées riches en glucides ne causerait pas de l’acné ; le problème proviendrait d’une surconsommation, estime le professeur McCuaig. « Pour certaines personnes, l’effet se fera sentir après quelques jours, d’autres après quelques semaines, on ne sait pas encore vraiment ».

Qu’en est-il du lait ?

Quoique faible en sucre, le lait consommé en grande quantité serait associé à l’acné, suggèrent de nombreuses études. Cette enquête américaine de 2016 et une thèse de doctorat réalisée en France la même année, présentent quelques travaux qui incriminent le lait. Certaines molécules retrouvées dans le lait, principalement l’IGF-1 et l’insuline, influenceraient la production de sébum et l’apparition de boutons.

Selon ces chercheurs polonais cependant, il n’y pas de données claires et précises qui démontrent un lien significatif entre la consommation de produits laitiers et l’acné. La plupart des travaux menés sur le sujet sont des études d’observations qui établissent un lien sans nécessairement prouver un rapport de causalité.

« Le lien entre le lait et l’acné n’est pas aussi fort qu’avec les glucides, admet le Dr McCuaig. Mais on ne peut pas l’écarter. D’un autre côté, il ne faut surtout pas bannir les produits laitiers qui sont essentiels, notamment pour la croissance des os. Si on pense que le lait influence notre acné, il faut plutôt revoir la quantité de lait qu’on ingère. »

Qu’en est-il du cacao ?

Il n'existe présentement aucune preuve que l'ingestion de chocolat influence l’acné. C’est ce que concluent cette revue systématique effectuée par des Allemands en 2017, cet article paru sur Skin Therapy Letter et ces chercheurs polonais. Les études qui suggèrent un lien entre le chocolat et l’acné n’ont souvent pas isolé l’effet du sucre de celui du cacao. Selon Catherine McCuaig, si vous voyez que votre acné s’aggrave lorsque vous avez des rages de chocolat, il y a fort à parier que ce soit la surconsommation de sucre qui en est la cause et non le cacao !

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