La loi antiterroriste entre dans les laboratoires
(ASP) - Imaginez un instant. Vous vous
appelez Julia Hilliard. Vous êtes une spécialiste
mondiale des virus, traquant depuis 20 ans, entre autres,
un virus rare, dorigine africaine, qui peut détruire
le cerveau dune personne. Vous êtes professeur
titulaire à lUniversité dÉtat
de Georgie. Mais si vous voulez continuez à y
travailler, vous devrez bientôt accepter de vous
laisser soumettre à un contrôle de sécurité
du FBI, afin de prouver que vous nêtes pas
folle, que vous navez jamais eu de casier judiciaire
ni utilisé de drogues.
Et si vous ratez ce test ? Eh bien,
votre carrière dexperte mondiale des virus
touchera peut-être à sa fin.
Car si la loi antiterroriste du président
George Bush sapplique telle quelle, quiconque
est amené, de par son emploi, à manipuler
des produits susceptibles de se transformer en armes
biologiques, se retrouvera désormais sur la sellette.
Pire encore, pour un tel chercheur universitaire, le
simple fait dêtre originaire dun autre
pays procurera déjà une mauvaise note
même si ce pays est le Canada, la Grande-Bretagne
ou la France.
Ce sont des milliers de scientifiques
américains, travaillant avec lune ou lautre
des 40 substances ou agents qualifiés de mortels
(virus Ebola, Machupo, Flexal, de la variole, de lencéphalite
vénézuelienne, de la fièvre jaune,
bactérie du charbon, de la peste, toxine du botulisme,
etc.) qui devront peut-être se soumettre à
des enquêtes aussi approfondies quhumiliantes.
Interrogée
par Science, Julia Hilliard était
pourtant la première à trouver des avantages
à cette loi. "Elle aurait pu venir depuis
longtemps", lance-t-elle, en expliquant quils
seront plusieurs, parmi les scientifiques, à
se réjouir de mesures qui accroîtront la
sécurité sur ces produits hyper-dangereux.
Mais plusieurs de ces mêmes scientifiques seront
peut-être surpris, si les mesures de sécurité
accrues finissent par limiter leur propre travail. Car
personne ne semble en mesure de dire, à ce stade,
combien
de scientifiques exactement seront affectés.
Jusquà 300 universités américaines
abritent un ou des laboratoires manipulant un ou plusieurs
des produits mentionnés plus haut...