Sommaire des capsules
québécoises
En manchette
cette semaine
Les capsules
de la semaine
LE KIOSQUE de
la recherche au Québec
Les communiqués de presse, dans tous les champs du savoir!
|
Le Québec sur la piste des gènes
(ASP) - La génétique, et plus particulièrement
son petit cousin, la génomique, ont trouvé deux
précieux alliés : Paul Martin et Bernard Landry
! Après le budget fédéral qui allouait 160
millions$ à Génome Canada, le gouvernement québécois
ajoutait dans son budget, déposé à la mi-mars,
quelques dizaines de millions $ pour Génome Québec,
l'un des cinq futurs centres de la structure pan-canadienne.
Dans les deux cas, il s'agit d'argent neuf, destiné
à mettre au monde chez nous cette science qui étudie
les groupes de gènes de tout être vivant, et qui
repose sur des instruments coûteux, capables de traiter
les tonnes de données contenues dans un code génétique.
"C'est carrément une subvention au démarrage
de l'organisme sans but lucratif Génome Canada, se réjouit
son porte-parole, Martin Godbout. Nous allons maintenant financer
quelques grands projets de recherche fondamentale, fournir un
équipement de pointe et offrir du temps d'utilisation
à tous les chercheurs."
Un grand projet sera retenu pour chacune des cinq régions
canadiennes. La proposition du Québec risque d'être
un modèle du genre. Non seulement parce que, depuis le
dépôt du budget Landry, elle bénéficie
de l'appui du gouvernement, mais aussi parce que ses artisans
travaillent sur une proposition unique pour tout le Québec.
Sous un chapeau intégrateur, les équipes déjà
en place dans les universités se partageraient en effet
le terrain. "Il pourrait y avoir une dizaine de thèmes
de recherche", selon Thomas Hudson, spécialiste de
la génomique à l'Université McGill.
"L'appel des projets sera lancé dans l'ensemble
du Canada d'ici la mi-mai, reprend Martin Godbout. Et nous espérons
qu'au moins deux, peut-être trois centres, seront fonctionnels
à cette date-ci l'an prochain." On estime que chaque
centre aura besoin de 20 millions $ par an. En plus des subventions,
chaque centre alimenterait son budget en "louant" ses
instruments au secteur privé.
La loi des grands nombres
Jusqu'à maintenant, la génomique a fait peu
de percées au Québec et au Canada. Et pour cause.
Alors qu'un chercheur ayant recours à des expériences
in vivo (sur des animaux par exemple) ou in vitro
(sur des cellules) peut se contenter de travailler dans son laboratoire
avec un budget modeste, celui qui veut se lancer en génomique
a besoin d'instruments hors de prix. On dit de lui qu'il a recours
à l'in silico (comme dans silicium) parce
que l'informatique est au cur de ses procédés.
D'où l'importance de la mise en commun que propose Génome
Canada: " il était impensable que, sur un même
campus, les départements de médecine, de biochimie
et d'agriculture s'équipent chacun d'un séquenceur
de gènes ou d'un supercalculateur ! ", plaide Martin
Godbout.
Car la génomique jongle avec les millions... mais pas
ceux des budgets. Il faut d'abord se rappeler que chaque cellule
du corps humain comporte quelque 100 000 gènes, ces segments
d'ADN qui contiennent l'information définissant un être
vivant. Chaque segment est constitué d'une multitude de
bases (qui peuvent prendre quatre formes, définies par
les lettres G, C, T et A) : on en compte au moins trois milliards
chez l'humain. Pour augmenter encore les possibilités
mathématiques, un même gène comporte, d'un
individu à l'autre, d'infimes variations dans l'ordre
et le nombre de bases (c'est le polymorphisme). Enfin, plusieurs
maladies complexes, comme le cancer, font probablement intervenir
plusieurs gènes.
La première tâche à laquelle la génomique
s'est attelée depuis plus de dix ans est le séquençage
des génomes de diverses espèces. En réalisant
celui de l'humain -c'est ce qu'on appelle le projet Génome
humain- les savants japonais, américains et européens
dressent donc la liste de nos 100 000 gènes. Cette partie
du travail sera complétée d'ici un an.
Mais on ne saura pas pour autant à quoi servent tous
ces gènes. Pour cela, il faut isoler chaque séquence
et comprendre comment elle agit sur un nombre significatif de
personnes: c'est la seconde étape de l'aventure. Et c'est
là que que le Canada entre en scène.
Souvent, la compréhension de l'action d'un gène
passe par l'étude de populations apparentées. On
cherche si une "erreur" d'un gène s'est transmise
dans une population. Au Québec, la colonisation par un
nombre restreint de gens, le relatif isolement ainsi que l'existence
de très grandes familles, offrent à la génomique
un bassin intéressant. Terre-Neuve, avec sa population
fondatrice d'Irlandais, et les Prairies, avec les Ukrainiens,
présentent des conditions semblables.
Quel cancer du sein ?
Toute cette recherche débouchera nécessairement
sur des applications concrètes. Déjà, certaines
découvertes ont entraîné la commercialisation
de trousses diagnostiques. Mais la principale conséquence
est une révolution dans la façon de soigner l'humain
: l'avènement de la pharmacogénomique. Finie, par
exemple, l'étiquette large de "cancer du sein"
et son remède universel, le Taxol, que l'on savait pourtant
inefficace chez beaucoup de gens. On vient de démontrer
que plusieurs femmes ne répondant pas au Taxol sont porteuses
de deux gènes particuliers : BRCA-1 et BRCA-2. Ces porteuses
forment 6,5% des femmes atteintes de cancer. "Il appartient
maintenant aux compagnies pharmaceutiques de développer
un médicament spécifique à ce type de cancer
du sein", explique Martin Godbout.
Evidemment, offrir un médicament à une si petite
tranche de la population risque de rendre le traitement peu rentable.
C'est là qu'encore une fois, les outils de la génomique
entrent en jeu. Si tester un médicament sur quelques générations
de souris peut demander des années, et sur des tissus
in vitro, des mois, l'in silico se fait en millièmes
de secondes ! On pourrait par exemple, en théorie, reproduire
sur biopuce, le profil génétique d'une femme atteinte
d'un cancer, et tester plusieurs milliers de médicaments
en un temps record.
Pour le moment certes, la révolution n'est qu'annoncée
Cependant, avec des outils tels que les séquenceurs, les
supercalculateurs et les biopuces, les centres comme Génome
Québec deviendront de véritables pépinières
d'entreprises du domaine pharmacologique, puisqu'ils généreront
à la fois les connaissances, le personnel correctement
formé... et les applications commerciales.
Louise Desautels
(23 mars)
Vous aimez ces capsules? L'Agence Science-Presse en produit
des semblables -et des meilleures!- chaque semaine dans l'édition
imprimée d'Hebdo-science
et technologie. Vous voulez utiliser ces capsules? N'oubliez
pas de mentionner la source! Vous voulez vous abonner à
Hebdo-Science? Contactez-nous!
|