... au Québec
semaine du 18 septembre 2000

Sommaire des capsules québécoises


En manchette cette semaine

Les capsules de la semaine


LE KIOSQUE de la recherche au Québec
Les communiqués de presse, dans tous les champs du savoir!

 


Du poison pour les poissons

(ASP) - En septembre, le village de Saint-Alexandre, au sud de Saint-Jean-sur-Richelieu, a reçu des visiteurs inquiétants: des personnages masqués et gantés qui sont allé répandre une substance toxique dans certains plans d'eau.

Ce commando n'avait pourtant rien de criminel. Il s'agissait de techniciens de la faune cherchant à éliminer la tanche, un poisson eurasien de la famille de la carpe, ensemencé dans une dizaine d'étangs de ferme de la région en 1986, et qui, depuis, s'est mis en tête de coloniser le Richelieu. "Des tanches échappées de ces étangs se sont reproduites dans la rivière, et nous ne pouvons plus rien contre elles, rapporte Pierre Dumont, biologiste de la Société de la faune et des parcs du Québec (FAPAQ). Par contre, nous voulons éviter que de nouveaux individus ne passent des étangs à la rivière."

C'est la deuxième fois que les techniciens de la FAPAQ (autrefois partie intégrante du ministère de l'Environnement et de la Faune) se rendent sur ces terres appartenant à la famille Neeser de Saint-Alexandre, elle qui a importé les premières tanches d'Europe. Au printemps dernier, on avait utilisé la roténone, seul "poison à poissons" homologué au Canada, dans quatre des neuf étangs des Neeser. L'opération a été rééditée en septembre pour les cinq autres petits plans d'eau. Les biologistes s'étaient d'abord attaqué aux étangs jouxtant la route, parce qu'on craignait que des passants récoltent ce poisson aux reflets verts. Et ils ont attendu la fin de l'été pour s'attaquer aux autres étangs, de façon à épargner les grenouilles qui les utilisent pour se reproduire.

Compétition pour la survie
"L'arrivée d'une nouvelle espèce dans un système hydrographique n'est jamais une bonne nouvelle pour les espèces indigènes", rappelle Pierre Dumont. Comme elle occupe les mêmes lieux de frai et se nourrit des mêmes organismes, la tanche vient notamment faire compétition à la perchaude et à la barbotte, deux poissons appréciés des pêcheurs, tant sportifs que commerciaux. Cette grosse carpe, qui peut dépasser les 50 cm, pourrait également empirer la situation du chevalier cuivré, une espèce menacée d'extinction qu'on ne trouve plus que dans le Richelieu et qui consomme, comme la tanche, de petits mollusques.

On craint également la grande capacité de reproduction de cette espèce: une femelle d'un kilo peut pondre jusqu'à 500 000 ufs! De plus, la tanche s'adapte fort bien à notre hiver, elle qui fréquente les pays scandinaves et la Sibérie: elle a, entre autres, la faculté d'hiberner en s'enfouissant sous la vase. Finalement, la pollution l'affecte peu et elle peut tolérer un taux très faible d'oxygène, pouvant même survivre 24 heures hors de l'eau !

"Les études menées cet été montrent toutefois que la tanche ne se répand pas à grande vitesse: sa présence est confirmée seulement dans le Haut-Richelieu, et en petit nombre", précise M. Dumont. Seulement huit tanches figurent parmi les 10 000 poissons récoltés en juin et juillet par la FAPAQ, qui cherche à tracer un portrait global des communautés qui habitent dans le Richelieu.

Naturalisée au Québec
Ces mêmes études de la FAPAQ ont établi que la tanche avait définitivement adopté le milieu naturel. "Nous avons pu examiner des individus sur le point de se reproduire et d'autres qui avaient moins de deux ans." Conséquence: la tanche vient d'être officiellement ajoutée à la liste des espèces naturalisées au Québec. Le système hydrographique Saint-Laurent-Grands-Lacs accueille ainsi sa 150e espèce introduite!

Parce qu'elle figure désormais sur cette liste, la tanche ne tombera plus jamais dans le vide juridique qui a rendu son importation possible. En effet, en 1986, la famille Neeser avait simplement transporté, entre l'Allemagne et Montréal, de très jeunes tanches dans des sacs hermétiques déposés dans une glacière. Les douaniers, ne voyant pas ce poisson sur la liste des espèces réglementées, l'ont admis comme poissons d'aquarium.

"Maintenant, la tanche ne peut plus faire l'objet d'aquaculture, ne peut plus servir de poisson d'ornement dans des étangs et ne peut plus être pêchée comme poisson-appât", énumère Pierre Dumont. Cette dernière utilisation est certainement la plus redoutée. Comme le Haut-Richelieu est l'un des principaux lieux de capture des petits poissons vendus comme appâts, la tanche pourrait vite se retrouver dans de multiples cours d'eau.

Louise Desautels

(19 septembre)

Vous aimez cette capsule? L'Agence Science-Presse en produit des semblables -et des meilleures!- chaque semaine dans l'édition imprimée d'Hebdo-science et technologie (vous désirez vous abonner?).
Vous voulez utiliser cette capsule? N'oubliez pas de mentionner la source... et un hyperlien nous ferait bien plaisir!

 

En manchettes sur le Net

La Science d'ici et d'ailleurs

Le Kiosque

Science pour tous

Hebdo-Science

Meilleurs sites en science

Bric-&#153

CyberExpress

C'est quoi l'ASP

Hommages &#153

La Qu te des origines

Le Monde selon Goldstyn

Questionnaire