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La grande mouvée
Tableau de chasse sur la banquise
(ASP) - C'est la rencontre de quatre personnages. Le phoque,
le pêcheur, l'écologiste et l'homme qui regarde,
vous ou moi. C'est l'histoire d'une migration, celle des phoques
qui descendent du Groenland à Terre-Neuve, jusqu'à
pénétrer dans le golfe du Saint-Laurent et s'approcher
des Îles de la Madeleine. C'est aussi l'histoire d'une
chasse controversée, celle du loup de mer -comme on l'appelle
parfois- mise en scène par le réalisateur Alain
Belhumeur et le producteur Jean Lemire, avec la participation
du biologiste Pierre Béland.
De juin à mars, La Grande mouvée rassemble
des millions de phoques formant une vague de 100 km. Au cours
de ce voyage, la femelle âgée de 5 ans met bas son
petit sur un territoire de banquise et d'eau. Un petit blanchon,
sorte de grosse chenille de couleur crème aux yeux humides,
ce qui lui a valu d'être fortement médiatisé
par les écologistes, en plus de posséder un cri
semblable au nourrisson.
La mouvée de phoques longe donc le Labrador et une
zone que l'on nomme le "front". C'est là que
le gros de la chasse au phoque se déroule. Les pêcheurs
ont le droit de chasser 275 000 phoques dans les eaux Canadiennes,
sur une population estimée à 5,4 millions pour
l'an 2000.
Cette chasse s'avère spectaculaire et sanglante. Les
pêcheurs descendent de leurs embarcations, courent sur
la banquise instable et assomment les phoques avec un bâton.
La masse serait plus efficace que le fusil -"l'oeil qui
tue"- trois minutes suffisent pour achever l'animal. Le
quota annuel pour les madelinots avoisine les 50 000 bêtes,
il n'est jamais atteint. Glace qui recule et contrôle accru,
il est également plus difficile de tuer ainsi les jeunes
adultes car leur crâne s'est solidifié.
Une frontière de 25 mètre séparent les
pêcheurs des écologistes. Téléobjectifs
et caméras au poing, ils surveillent le camp ennemi. Le
mouvement IFAW (International Fund for Animal Welfare) fait des
pressions depuis les années 1960 pour que s'arrête
la chasse. Sur leurs pressions et celles de différentes
personnalités internationales -dont l'actrice française
Brigitte Bardot- la Commission Royale canadienne s'est saisi
du dossier et a interdit la chasse au blanchon en 1986.
Entre ce feu croisé de regards -phoque, pêcheur
et écologiste- reste le spectateur et sa conscience. Pourquoi
s'attendrir sur le phoque plutôt que sur le petit veau
mené à l'abattoir ? Comment s'opposer à
la chasse et vouloir la préservation des cultures? Entre
"l'homme qui tue avec haine" et "l'homme qui préserve
la vie", le commentaire du film frôle parfois la démagogie.
Heureusement, une image vaut mille mots et ce documentaire en
contient beaucoup.
Isabelle
Burgun
(23 novembre)
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