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Semaine du 27 novembre 2000

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Les miraculés de la chambre hyperbare: un mythe?

(ASP) - Plusieurs parents d'enfants atteints de paralysie cérébrale fondent tous leurs espoirs là-dessus. Mais une étude subventionnée par le gouvernement québécois vient de démystifier la croyance en l'efficacité de la médecine hyperbare sur ces enfants. Les parents n'ont pas désarmé pour autant...

Exit, le mythe de la chambre pressurisée et suroxygénée, grâce à laquelle les enfants verraient leurs spasmes diminuer et leurs habiletés fonctionnelles augmenter. C'est ce qu'affirme le Dr Jean-Paul Collet, directeur adjoint de la recherche clinique à l'Institut Lady Davis de l'Hôpital Général Juif de Montréal. Et il a avec lui les données les plus étoffées jamais publiées là-dessus.

Histoire d'un mythe
La paralysie cérébrale trouve son origine avant ou pendant l'accouchement. Elle est la conséquence directe, chez l'enfant, d'une asphyxie ou d'une hémorragie cérébrale (dans quelques rares cas, d'une infection). Mais l'étendue des "dégâts", c'est-à-dire le degré de paralysie cérébrale, ne se voit, parfois, que plusieurs années après l'accouchement. En effet, au cours des premières années de sa vie, l'enfant ne sollicite que son cerveau inférieur, alors que c'est le cerveau supérieur qui a été endommagé.

C'est alors que la médecine hyperbare entre en action : nombreux sont ceux qui lui prêtent toutes sortes de vertus thérapeutiques, comme celle, justement, de régénérer les cellules endommagées du cerveau. Or, pour les sceptiques, l'idée que l'oxygénothérapie hyperbare puisse agir sur des cellules endommagées après tant d'années paraît utopique. Et la promotion de la médecine hyperbare ne repose sur rien de scientifique. Elle s'est faite sur le Web, qui regorge de témoignages attestant de résultats soi-disant spectaculaires au sortir du caisson hyperbare.

La pratique de la médecine hyperbare est même interdite au Québec, ce qui a soulevé une vive polémique auprès de parents qui la perçoivent comme une thérapie de la dernière chance: pourquoi ne pas laisser la liberté de choisir à ceux qui désirent investir les 10 000$ nécessaires à l'accès au caisson magique? Pourquoi contraindre ceux qui peuvent dépenser une telle somme à se rendre à Ottawa, en Floride, ou ailleurs, lieux d'accueil de centres de traitement hyperbare?

Le Collège des médecins du Québec a finalement décidé de mettre un terme à la polémique: des études scientifiques avaient déjà mis à mal l'idée d'un impact du traitement hyperbare sur des personnes atteintes de sclérose en plaques, il était temps de faire la preuve scientifique de son efficacité (ou non) sur les enfants atteints de paralysie cérébrale... Et c'est alors que le gouvernement québécois a confié la tâche au Dr Jean-Paul Collet. Pédiatre de formation et spécialiste en recherche évaluative, il a réuni 140 enfants québécois de 4 à 12 ans atteints de paralysie cérébrale, et les a séparés en deux groupes: un groupe placebo et un groupe soumis à l'oxygénothérapie hyperbare.

En quoi consiste l'oxygénothérapie hyperbare ?
En temps normal, l'être humain est oxygéné à 21 % et subit une pression atmosphérique de 1 ATA (la pression au niveau de la mer). Son taux d'oxygène dans le sang est alors de 95 mmHg (exprimé en millimètre de mercure). Au cours de l'étude du Dr Collet, qui sera bientôt publiée dans la revue médicale britannique The Lancet, le groupe d'enfants soumis au traitement hyperbare a reçu de l'oxygène à 100 % et a été soumis à 1,75 ATA, ce qui a fait grimper le niveau d'oxygène à 1230 mmHg. Dans le cas du groupe placebo, l'oxygénation s'est faite à 21 %, comme en temps normal, mais la pression a été poussée à 1,3 ATA, ce qui a fait monter l'oxygène dans le sang à 148 mmHg. Cette augmentation de la pression dans le groupe placebo visait à provoquer des effets secondaires (sensation d'oreilles bouchées), afin de donner à ces enfants l'illusion qu'ils étaient véritablement soumis au traitement hyperbare.

Résultats : des améliorations ont été constatées dans les deux groupes mais elles sont équivalentes! Le Dr Collet et son équipe imputent ces améliorations au "phénomène clinique", qui veut que le simple fait de participer à une étude médicale améliore la condition du sujet. De plus, comme le précise le Dr Collet, ce sont les performances de chaque patient qui ont été testées, à savoir le langage, la motricité, la concentration Il se peut que ces améliorations soient survenues parce que les performances des sujets ont été davantage sollicitées pendant l'étude qu'elles ne le sont dans leurs conditions de vie habituelles.

Toutefois, le Dr Pierre Marois, qui a lui aussi participé à cette étude, conteste ces conclusions. Physiatre pédiatrique de formation, il travaille au quotidien à la rééducation de ces enfants. Habitué à composer avec leurs problèmes neuromusculaires, il est aussi un témoin privilégié de la souffrance des parents. Défenseur actif de la médecine hyperbare, il pense que son efficacité pourrait résider dans les 30 % de pression atmosphérique supplémentaire insufflée au groupe placebo, tandis que pour le Dr Collet, ces 30 % sont sans effet thérapeutique. Il ajoute que les paralysés cérébraux font aussi d'importants progrès quand ils sont mis en contact avec des chevaux...

L'enthousiasme des parents pour le caisson de l'espoir réside notamment dans le fait qu'il n'existe pas, à l'heure actuelle, de possibilités de guérison. Les thérapies qui traitent la paralysie cérébrale sont toutes palliatives, c'est-à-dire qu'elles visent à atténuer les symptômes: physiothérapie, chirurgie où certains nerfs sont sectionnés, médicaments destinés à diminuer le tonus, exercices d'éveil. Le Dr Collet insiste enfin sur le fait que son étude a surtout été réalisée dans une perspective éthique : est-ce utile de continuer à alimenter les espoirs des parents... en même temps que les caisses enregistreuses des centres de traitement hyperbare?

Malgré la déception des parents à l'issue de cette étude, elle aura au moins eu pour mérite d'inciter le Fonds de recherche en santé du Québec à investir 100 000 $ par an dans la recherche pour les enfants atteints de paralysie cérébrale.

Gaëlle Schmit

(30 novembre)

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