J'ai été chagriné d'apprendre que le poète américain Stanley Kunitz s'était éteint récemment. Le poète lauréat est décédé de pneumonie le 14 mai dernier dans sa maison de Greenwich Village à New York. Il était âgé de 100 ans. Récipiendaire du prix Pulitzer (1959), et du National Book Award (1995) ainsi que de nombreux autres honneurs, Kunitz était considéré comme l'un des poètes les plus distingués et les plus accomplis des États-Unis. Il continua à écrire jusqu'à la fin de sa vie ; il avait d'ailleurs publié son dernier livre l'année dernière.

Kunitz possédait un registre très étendu ; sa poésie portait tout autant sur la beauté, le temps et la nature que sur les lieux, les gens, les relations interpersonnelles. Mais si sa disparition me peine plus particulièrement, c'est qu'il fut également un poète de la science, plus particulièrement intéressé à l'astronomie. En effet, plusieurs de ses poèmes se réfèrent au ciel, comme son “ Halley's Comet ” ou “ The Flight of Apollo ” :

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“ I was a stranger on earth.

Stepping on the moon, I begin

the gay pilgrimage to new

Jerusalems

in foreign galaxies.

Heat. Cold. Craters of silence.

The Sea of Tranquillity

rolling on the shores of entropy.

And, beyond,

the intelligence of the stars. ”

Dans d'autres poèmes, il se sert des thèmes astronomiques ou de l'imagerie scientifique pour illustrer une émotion ou un sentiment, par exemple comme dans “ The Science Of The Night ” :

“ (...) My touch is on you, who are light-years gone.

We are not souls but systems, and we move

In clouds of our unknowing

like great nebulae.

Our very motives swirl and have their start

With father lion and with mother crab.

Dreamer, my own lost rib,

Whose planetary dust is blowing

Past archipelagoes of myth and light

What far Magellans are you mistress of

To whom you speed the pleasure of your art?

As through a glass that magnifies my loss

I see the lines of your spectrum shifting red,

The universe expanding, thinning out,

Our worlds flying, oh flying, fast apart.

From hooded powers and from abstract flight

I summon you, your person and your pride.

Fall to me now from outer space,

Still fastened desperately to my side;

Through gulfs of streaming air

Bring me the mornings of the milky ways (...) ”

Vous trouverez ici d'autres exemples de sa poésie, ainsi que des informations biographiques supplémentaires, sur mon site dédié à la poésie du ciel.

La science ne cherche pas à évacuer la beauté du monde, son magistère se situant ailleurs, sur un tout autre plan. Certains poètes l'ont compris et ont cherché à inclure dans leurs poèmes soit une imagerie scientifique, plus près de notre expérience moderne, soit une compréhension des enjeux scientifiques. De telles tentatives enrichissent à la fois la littérature et la science, en bâtissant un pont entre ces deux disciplines en apparence si lointaines. Elle permettent à l'âme contemporaine de trouver sa véritable place dans l'univers, en intériosant les réalités scientifiques de notre époque, tout en essayant de leur donner un sens -- ou du moins une sensibilité.

En guise d'épitaphe, citons le dernier vers de l'un des plus beaux poèmes de Kunitz, “ The Long Boat ” dans lequel il écrit :

“ Peace! Peace !

To be rocked by the Infinite !

As if it didn't matter

which way was home ”

Je donne