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Deux nouveaux textes sur le Protocole de Kyoto et sur l’Action coopérative à long terme ont été diffusés par le Secrétariat mercredi matin. Ceux-ci ne semblent pas marquer d’énormes progrès – au contraire, on y a réintroduit de nouvelles options qui avaient été éludées dans les textes de samedi et de dimanche. Pourtant, les délégations qui défilent en conférence de presse continuent d’afficher un sentiment d’espoir pour un résultat positif à la COP16.

Or, peu d’information filtre des négociations à ce stade. La salle où se tient la séance plénière a été envahie par les chefs d’État et les Ministres des membres de la Convention où se déroule le « High level segment », exercice relativement symbolique où chaque pays tente sa chance au concours du discours le plus enflammé, ou encore le plus ennuyant. Puisque le processus de la COP est dorénavant politique, les présidents des groupes de négociation et leurs facilitateurs ne peuvent aller dans les détails lors des briefings et des conférences de presse. À peu près tout ce que l’on sait de l’état réel des négociations en ce moment est que les progrès sont difficiles et les échanges serrés.

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On distingue tout de même quelques lignes dures dans les discours, ainsi que les pièces du casse-tête qu’il reste à mettre en place. La principale est sans doute le statut que prendra le Protocole de Kyoto dans le futur régime climatique. On savait déjà que les États-Unis n’y seront pas. On sait maintenant que le Japon, le Canada et la Russie (et sans doute les autres membres du Groupe parapluie ne se cachent-ils pas loin derrière) ne veulent pas d’une seconde phase de celui-ci parce que les grands pays en développement en seront épargnés. Leur option est donc de renvoyer les négociations dans la seconde voie sur l’action collaborative à long terme, dont on ne sait pas encore si elle aura une portée contraignante, ni si des cibles de réduction détaillées pour les pays développés et les pays en développement y figureront.

De leur côté, il semble que les États-Unis tentent actuellement d’affaiblir le langage des textes sur l’adaptation et les transfert de technologie et qu’ils refusent d’avancer sur les textes qui seraient très prêts d’une entente aussi longtemps qu’ils ne connaîtront pas les intentions précises de la Chine et des pays émergents concernant la transparence. Or, le BASIC (Brésil, Afrique du Sud, Inde et Chine) a affirmé par la voie d’un communiqué dimanche son ouverture pour se donner des cibles volontaires accompagnées de mécanismes de transparence tant désirés par les États-Unis. Évidemment c’est dans les détails de ces mécanismes que les pays développés chercheront satisfaction.

Les pays en développement – tous les pays en développement – militent pour le renouvellement du Protocole de Kyoto, qui est posé comme une condition incontournable pour un accord général sur le climat. Certaines coalitions ont des positions plus radicales. C’est le cas de l’ALBA (Alternative Bolivarienne pour les Amériques) qui exige par exemple que l’on inscrive dans les textes l’objectif de limiter à 1 degré Celsius le réchauffement climatique (au lieu du 2 degré de l’Accord de Copenhague et du 1.5 degré proposé par la coalition AOSIS). Mais il serait étonnant que le G77, le Groupe Africain, le Groupe des pays les moins avancés, AOSIS et la coalition informelle des pays latino-américains refusent une entente sur le financement, la forêt et l’adaptation sur cette base. En fait, l’ALBA est plutôt isolée, même au sein des pays en développement. Pour ces derniers, il semble que l’enjeu de l’architecture des accords (notamment le statut du Protocole de Kyoto) soit redevenu, comme à Copenhague, l’enjeu principal.

Les pays en développement et l’Union Européenne qui ont formé il y a quelques mois le Dialogue de Carthagène ont par ailleurs effectué une proposition sur cette question de l’architecture qui prévoit, selon ce que l’on en comprend, la création d’un deuxième Protocole (au côté du premier) où l’on trouverait les engagements contraignants des États-Unis et des pays en développement.

En ce jeudi soir donc, la perspective d’un accord et de la forme qu’il prendrait demeure encore très embrouillée. Ce qui est certain, toutefois, c’est que nous en sommes au moment où des compromis importants sont nécessaires afin d’avancer. Peut-être faudra-t-il alors méditer sur cette idée que Ban Ki Moon, le Secrétaire général de l’ONU, à exprimé hier : « nous ne pouvons pas avoir un accord parfait, car en ce moment la perfection est l’ennemie d’un bon résultat »!

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- Mon premier billet: Ma mission à la COP16 de Cancun

- Mon deuxième billet: Le Japon, le Groupe parapluie et la lutte contre le Protocole de Kyoto

- Mon troisième billet: Le Dialogue de Carthagène : vers une coalition des bonnes volontés?

- Mon quatrième billet: COP16: Orage à l'horizon

- Mon cinquième billet: Optimisme partagé mais modéré pour semaine 2 de la COP16

- Mon sixième billet: Le Climate Group, qu’ossa donne?

- Mon huitième billet: Cancun et la rédemption du multilatéralisme

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