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Aujourd'hui, il en coûte un à deux dollars pour faire gonfler des ballons d'hélium du type utilisé pour les fêtes d’anniversaire. Mais s'il n'en tenait qu'au professeur Robert Richardson, Prix Nobel de physique en 1996, le prix par ballon devrait être d'au moins 100 dollars si on voulait arrêter le gaspillage de ce gaz de plus en plus rare.

D'après lui, si rien n'est fait, l'hélium aura disparu de la Terre d’ici 30 ans. Une fois que le gaz est libéré dans l'atmosphère, à partir des ballons d’anniversaire par exemple, il est perdu pour toujours.

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La pénurie d'hélium qui s'amplifie est une crise à l'échelle mondiale. Le gonflage des ballons de célébrations et des dirigeables publicitaires n’est qu’une petite partie des utilisations que l’on fait de ce gaz. L’hélium est essentiel à toute une myriade d'activités médicales, industrielles et scientifiques. Cela va des appareils IRM des hôpitaux, au Grand collisionneur d'hadrons près de Genève. L'hélium est également utilisé pour purger les réservoirs des fusées de la NASA. Il fournit aussi l'atmosphère inerte nécessaire à la production des fibres optiques. On le retrouve également dans les bouteilles de plongée sous-marine pour minimiser les effets de la narcose à l'azote, problème pouvant survenir lors de plongées en eaux profondes. Dans le mélange Trimix, dit 20/25, que les plongeurs utilisent, il y a 20 % d'oxygène et 25 % d'hélium, ce qui ramène la concentration d'azote à 55 % au lieu des 80 % normalement présents. Quand le réservoir d'une fusée est purgé, l'hélium relâché dans l'atmosphère disparaît dans l'espace et est perdu pour toujours. Puisqu’il a fallu 5 milliard d'année – l’âge de la Terre – pour produire l'hélium disponible sur notre planète, il est aberrant de penser que cette ressource non-renouvelable risque de disparaître en une génération.

Le paradoxe est que l'hélium, si rare sur Terre, est l'élément le plus abondant dans l'univers après l'hydrogène. D'ailleurs, il a été découvert dans l'espace avant d'être découvert sur Terre. En 1868, l'astronome anglais Norman Lockyer remarqua un rayon jaune dans le spectre solaire. Il en conclut que ce rayon était généré par la présence d’un élément du Soleil inconnu sur Terre. Lockyer nomma cet élément hélium d'après le terme grec pour désigner le Soleil, hélios. Ce n'est que près de 30 ans plus tard, en 1895, que le chimiste britannique William Ramsay isola l'hélium dans la clévéite, un minerai à base d'uranium. En observant au spectroscope le spectre émis par ce gaz inconnu, il réalisa que c'était le même élément que celui produit par le Soleil.

Sur Terre, l'hélium est le résultat de la désintégration de minéraux radioactifs comme la pechblende, le minerai qui permit à Marie Curie de découvrir le polonium et le radium. Ces éléments produisent des rayons alpha, des noyaux d'hélium He+2, qui se neutralisent immédiatement avec des électrons. Commercialement, l'hélium est extrait des gisements de gaz naturel où l'hélium est emprisonné – comme le méthane – par des couches de roche imperméable. Les plus grands producteurs d’hélium sont les États-Unis, suivi par l'Algérie, la Russie et la Pologne. Or, les réserves d'hélium sont malheureusement en train de s'épuiser.

La plus grande réserve d'hélium se trouve à Amarillo, au Texas. Plus d'un milliard de mètres cubes du gaz, ou la moitié des réserves mondiales, y sont entreposés dans des gisements de gaz naturel désaffectés. Le gouvernement américain a établi, en 1925, la Helium National Reserve quand l'hélium était utilisé dans les dirigeables à des fins militaires. Avec l'avènement de la Guerre froide dans les années 1950, l'hélium est devenu encore plus important puisqu’on l’utilisait dans les missiles à ogives nucléaires intercontinentaux. Or, avec la fin de la rivalité avec l'Union soviétique, le gouvernement américain adopta, en 1995, un acte visant la privatisation de l’hélium selon lequel tout l'hélium présent dans la réserve devait être vendu d'ici 2015. La privatisation visait à récupérer les sommes investies pour mettre en place la réserve. Le problème est que la loi stipule que les quantités d'hélium vendues chaque année doivent être constantes et sans considération de la demande. Cette clause a eu pour effet de maintenir le prix de l'hélium artificiellement bas. Et les utilisateurs n’avaient aucune raison de l'économiser ou de le recycler.

La forme la plus abondante d'hélium est l'hélium-4 avec 2 protons et 2 neutrons dans son noyau. Quant à l'hélium-3, un isotope avec 2 protons et 1 neutron, la pénurie en est encore plus aigüe puisqu’il représente moins de 0,0002 pour cent de l'hélium disponible. Cet isotope est obtenu à partir de la désintégration du tritium, l’un des composants des bombes thermonucléaires. L'arrêt de la production de ces bombes par les États-Unis en 1988, et donc de l'utilisation du tritium, a considérablement réduit les quantités d'hélium-3 disponibles. Or, depuis le 11 septembre 2001, les besoins pour cet isotope ont augmenté exponentiellement. En effet, l'hélium-3 est l'élément central des détecteurs déployés pour déceler la présence de matériaux tels que le plutonium des bombes nucléaires. Le gouvernement américain compte déployer plus de 1 400 de ces machine à travers le monde, au coût de près d’un million de dollars chacune, pour contrecarrer les plans de terroristes potentiels. Étant donné la pénurie, en quelques années, le prix du litre de l'hélium-3 est passé de 100 dollars à 2 000 dollars. Heureusement qu'il n'est pas nécessaire dans la vie courante!

- Le site de l' Organisation pour la science et la société de l'Université McGill .

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