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Qu’ils veuillent l’admettre ou non, il semblerait que les chercheurs scientifiques entretiennent une relation bien particulière et même paradoxale avec dame Nature.

La relation a commencé avec du respect et beaucoup d’admiration et puis finalement la compétition s’est lentement installée. Cette rivalité a mené à quelques dérives, mais elle est surtout la source de découvertes majeures, sans lesquelles nous ne serions pas ce que nous sommes aujourd’hui.

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Des chimistes de l’Université d’Édimbourg ne dérogent pas à la règle et sont parvenus à réaliser tout un exploit en effectuant une transformation chimique à l’intérieur d’une cellule.

La nature arrive de façon simple et efficace à assembler des chaînes de carbone, par exemple à travers de longs assemblages d’acides aminés fixés les uns aux autres pour créer des protéines; mais dans ce cas-ci, elle triche un peu, car elle y parvient par la formation de liaison entre un atome de carbone et un atome d’azote.

En revanche, la formation directe de liaison carbone-carbone est une tâche bien plus difficile à réaliser dans l’éprouvette et les réactions de couplage croisé catalysées au palladium ont permis aux chimistes de créer ce type de liaison en contournant toutes les contraintes qui lui sont associées. Dans cette transformation le palladium qui est un métal joue le rôle de catalyseur et permet d’accomplir le procédé chimique dans des conditions douces. La réaction de Suzuki appartenant à cette famille de réactions, a été récemment créditée du prix Nobel de chimie en 2010. L’incroyable défi de cette équipe de recherche écossaise consistait à carrément effectuer la réaction de Suzuki à l’intérieur d’une cellule (assez ambitieux, non?).

Mettons la science de côté quelques secondes, et imaginez une petite luciole jouant à cache-cache avec deux amis dans l’obscurité la plus totale. Les deux compères décident de se cacher ensemble, mais elle finit par les retrouver (elle est très maline cette luciole) et ces deux derniers s’illuminent alors d’une couleur différente. Le point important de cette métaphore est que les amis ne s’illuminent pas avant d’être découverts et surtout qu’ils s’illuminent avec une nouvelle couleur. Donc, l’image présentée est une photo de la scène où la luciole, c'est-à-dire le palladium (points rouges), a retrouvé ses amis qui s’illuminent alors en vert (produits de la réaction). Ainsi, basés sur cette approche, les chercheurs ont été en mesure de confirmer la présence du produit issu du couplage de Suzuki.

Pour arriver à ce résultat, l’idée originale du Pr Bradley et de son équipe a été d’incorporer le palladium sur des microsphères de polystyrène, cela veut donc dire que plusieurs atomes de palladium sont capables de se greffer sur la bille de polystyrène. De cette façon, le métal qui en temps normal provoquerait la « mort » de la cellule, est dans ce cas-ci, vu comme une vulgaire organelle, c’est-à-dire un élément capable de pénétrer la membrane cellulaire. Après s’être assurés que cet intrus était biocompatible et bel et bien localisé dans le milieu intracellulaire, les chimistes l’ont mis en présence de réactifs chimiques et l’ont engagé dans une transformation chimique. Mais comment s’assurer que le métal est bel et bien incorporé dans la cellule et que la réaction s’est réellement produite? Plusieurs méthodes d’analyse sont certes à la disposition des chercheurs, mais on s’accordera vous et moi pour dire que la plus originale de toutes reste la microscopie à fluorescence qui leur a permis d’assimiler les réactifs chimiques à de jolies petites lucioles.

Quand on prend un peu de recul, ces travaux de recherche paraissent un peu fous et surréalistes, les chimistes repoussant ainsi les limites de leur champ d’action en faisant des cellules vivantes leur nouveau terrain de jeu. Oui c’est bien beau, mais hormis l’égo à quoi ça sert? On pourrait imaginer utiliser cette technologie pour l’administration sélective de médicaments. Ainsi un médicament donné sous une forme inactive et neutre, serait « activé » une fois au contact de ces microsphères de palladium qui seraient implantés dans la zone malade. Cependant, il est important de mentionner que toutes ces expériences ont été menées sur des cellules de type HeLa qui sont connues pour être très robustes donc de telles applications ne sont pas prêtes de voir le jour de si tôt.

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