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Le bertillonnage, ou l’anthropométrie, est un système d’identification criminelle mis au point par un employé de la préfecture de police de Paris, Alphonse Bertillon.

Engagé pour mettre à jour les fiches de signalement des criminels, il devient, en 1882, le chef du service photographique. C’est à ce moment qu’il émit hypothèse que l’identité d’un individu pouvait être caractérisée par un nombre de mesures corporelles immuables, notamment la taille, la circonférence du crâne, la longueur du pied de l’oreille, etc. Même si l’individu change son apparence en se faisant teindre les cheveux, pousser une barbe ou raser la moustache, son «anthropométrie», elle, ne change pas.

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Bertillon fait le calcul qu’à partir de 14 mesures anthropométriques, les chances que deux individus les aient toutes en commun sont extrêmement faibles, soit une sur près de 300 millions.

Bertillon applique sa théorie en faisant établir, de manière systématique, des fiches anthropométriques pour tous les individus ayant été arrêtés par la police. En comparant ces fiches avec celle d’un suspect, il devient ainsi possible d’identifier les récidivistes. Bertillon obtient son premier succès en 1883 avec l’identification anthropométrique d’un certain Léon Durant, déjà fiché pour un vol de bouteilles. Succès confirmé par l’arrestation de l’anarchiste Ravachol qui avait organisé, en 1892, une série d’attentats à Paris. Le bertillonnage, nom donné à l’anthropométrie à partir de 1883, est alors adopté par de nombreux services policiers, y compris celui des États-Unis, en 1888.

À cette même époque, un autre système d’identification, la «dactyloscopie», ou l’utilisation des empreintes digitales, se développe parallèlement à l’anthropométrie, cela au grand dépit de Bertillon, qui jugeait son système bien supérieur. Mais poussé par ses supérieurs, Bertillon est obligé d’incorporer les empreintes digitales dans ses fiches. En France, les deux méthodes vont coexister jusqu’à 1970, mais, dans le reste du monde, les services policiers vont délaisser le bertillonnage bien avant cette date. Le cas de Will et de William West est souvent mentionné comme en étant la cause.

En 1903, un nouveau détenu, Will West, arrive au pénitencier Leavenworth, au Kansas. Son apparition est un choc pour M.W. McClaughry, le gardien chargé de son enregistrement. Il est convaincu que Will West est déjà passé devant lui. Après avoir établi une fiche Bertillon pour Will West, il la compare à celle des autres détenus du pénitencier. Effectivement, il y a déjà un individu, qui réside depuis deux ans au pénitencier, qui ressemble comme un jumeau à Will West. Il a les mêmes mesures anthropométriques que lui et, de plus, son nom est William West, bien qu’ils n’aient pas d’attaches familiales en commun. Par contre, leurs empreintes digitales sont différentes.

Il s’agit d’une histoire fascinante, mais qu’il faut prendre avec un grain de sel. Bien qu’il ne fasse pas de doute, d’après les photos ci-contre, que Will et William West se ressemblaient de façon étonnante, aucun des documents de l’époque ne suggère que leurs mesures anthropométriques étaient aussi exactement les mêmes. M.W. McClaughry, qui établit les fiches Bertillon de William West en 1901 et celles de Will West en 1903, ne le mentionne pas dans les articles qu’il a écrits au sujet de son emploi à Leavenworth. La première fois que l’histoire de Will et de William West est mentionnée, c’est dans le cadre d’un livre publié en 1918, probablement pour faire mousser les ventes. Quant aux empreintes digitales supplantant le bertillonnage comme système d’identification, il n’est pas nécessaire d’invoquer le cas de Will et William West pour l’expliquer. Cela se serait fait de toute façon, car le premier est de loin supérieur au deuxième. Bien que cela ait pris à la France beaucoup de temps pour le reconnaître!

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