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Je sors de prison. Chaque année, en juillet, je rends visite à des prévenus et détenus d’un Centre de détention.

Au Centre de détention, j’y entre et j'y sors sous bonne escorte (pas celle de l’ex-maire Duplessis). Je laisse tout dans un casier à l’entrée : clés, cellulaire, canif, chapeau, petites monnaies. M’accompagne seulement un grand cahier de présentation rempli de photos méticuleusement choisies. On y retrouve ce qui peut être utile a illustrer mes propos : photos de galaxies, de pouponnières d’étoiles, d’aurores boréales, de taches solaires, d’anneaux de Saturne…

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Dans une pièce, genre salle de classe, les « résidents » s’assemblent en nombre. C’est une activité « populaire ». Cette année, ils étaient près de trente. Dans l’audience, aucun notable, aucun entrepreneur, aucun élu. Du « peuple », seulement !

Ensuite, sous œil vigilant de la garde on échange, et on discute. Les questions sont nombreuses. L’intérêt et la curiosité sont à la dimension du gigantisme des sujets abordés.

Ce qui frappe, c’est la justesse des questions. On sent cependant que tous les liens n’ont pas été faits antérieurement entre les notions. Ces hommes ont été happés en cours de vie. D’abord exacerbés par les appels à la consommation, à paraître et à posséder. Puis par la fatalité d’une pauvreté matérielle endémique et, profilage ethnique et social aidant, par un manque de chance qui les a conduits sous les verrous.

Durant deux heures, c’est l’hyper « grande évasion ». Rien ne nous arrête, ni murs ni barreaux. On voit naître des étoiles, on visite des exoplanètes, on séjourne dans la Station spatiale, on dessine des constellations, on cherche Dieu dans les replis du cosmos…

Puis, un moment donné, les gardes nous ramènent tous ensemble des confins de l’Univers. C’est fini. Alors on me raccompagne à la sortie. Au-delà des clôtures barbelées, je me retrouve alors pantois à l’air libre (à notre époque, il n’y a véritablement que l’air qui puisse encore être complètement libre).

Chaque fois je me pose la même question. Pourquoi ces hommes sont-ils en cage ? Leur existence aurait-elle pu être différente, si on avait veillé à nourrir leur imaginaire et leur curiosité lorsqu’ils étaient enfants ? J’en suis convaincu.

Je donne