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Au Québec, on recense pas moins de 10 000 sites archéologiques. Certains d’entre eux ont été découverts de manière fortuite, mais la plupart l’ont été à l’occasion de projets d’aménagement du territoire: construction de grands barrages hydroélectriques, de lignes de transport d’énergie (électricité, gaz, pétrole), de routes et de bâtiments, entretien des infrastructures urbaines enfouies ou de rénovation d’équipements ou d’édifices historiques.

D’autres découvertes sont issues de recherches universitaires, par exemple la découverte des plus anciennes occupations humaines sur le territoire ou encore la datation des débuts de l’agriculture.

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Le site est d’ailleurs comme un patient: Il faut le diagnostiquer avant d’y mener nos opérations et pour ce faire, nous procédons à un échantillonnage à l’aide de sondages manuels (pelle et truelle) ou mécaniques (rétro excavatrice).

Quelle est la superficie du site? Combien de couches se cachent sous la surface du sol? Ce site est-il riche? Vaut-il la peine de le fouiller au complet? Y trouvera-t-on des réponses à des questions restées en suspens?

Il faut également considérer le temps qui nous est accordé pour mener à bien le projet et, bien sûr, combien tout cela coûtera!

La précision est de mise

Une fois ces questions réglées, la fouille peut être amorcée. Des unités de fouilles numérotées et délimitées par des cordes sont implantées à l’aide d’appareils d’arpentage. Ce quadrillage de fouilles peut varier entre 1 et 20 mètres carrés par exemple.

Muni d’une truelle, de brosses fines et de pics de dentiste, l’archéologue commence par décaper le sol délicatement, expose des objets et note ses observations sur des fiches plus compliquées qu’une facture d’électricité.

Comme l’occupation d’un lieu modifie la couleur et la texture du sol, l’on prendra soin de fouiller chaque couche séparément à la truelle ou à la bèche. Le petit potager aménagé à l’arrière d’une maison habitée au XVIIIe siècle laissera par exemple un sol foncé, chargé de matières organiques, tels des déchets de table —le compost de l’époque!

Même s’ils ont été déplacés, les foyers de pierres placés au centre des tentes coniques des Amérindiens pourront laisser un empreinte de couleur rouge dans le sable (une réaction chimique des oxydes de fer soumis à une chaleur intense).

Tous les artefacts, objets transformés par l’humain et écofacts —ossements d’animaux, restes végétaux— seront récoltés et placés dans des sacs identifiées à une couche et à une unité de fouille données.

La plupart des parois dégagées lors du creusement des «puits» de fouille seront dessinées à l’échelle sur de grands papiers millimétriques (le dessin stratigraphique) et photographiés en haute résolution. Des échantillons de sol seront prélevés pour être soumis à des analyses spécialisées.

En fait, il faut s’assurer d’un maximum d’enregistrements, car une fois fouillé, il est impossible de revenir en arrière et pas question de dire «J’aurais donc dû…»!

On ne s’ennuie pas au labo !

Vous croyez que les découvertes se font toutes sur le terrain? Eh bien non… vous ne pouvez imaginer toutes les informations générées par les travaux en laboratoire: la cartographie des vestiges et la répartition des objets nous permettent d’avoir une vue d’ensemble des habitations et de reconnaître les espaces de vie et leur fonction.

Lorsqu’on recolle les fragments de poterie se révèlent le volume, la forme et la décoration du vase auparavant difficiles à percevoir. Assis devant son microscope électronique, l’archéologue-tracéologue —le spécialiste des traces— détectera des polis singuliers sur les tranchants d’un couteau en pierre. Ces polis indiquent les usages du couteau: est-ce qu’on a coupé du bois, de l’os ou même nettoyé des peaux animales?

L’archéologue palynologue —le spécialiste des spores et des grains de pollens— retirera des échantillons de sol les pollens et graines qui sont autant de signatures de la végétation à l’époque et des végétaux consommés. Des charbons de bois prélevés dans des foyers ou même sur les croûtes carbonisées adhérant aux parois de vases de cuisson donneront des datations relativement précises.

Armé d’une multitude de données, l’archéologue tentera d’assembler toutes les pièces d’un gigantesque casse-tête, de les interpréter et de les consigner dans un rapport de recherche et idéalement dans une publication accessible à un large public.

Le patrimoine archéologique appartient d’ailleurs à la collectivité et toutes et tous devraient pouvoir en bénéficier. D’ailleurs, plusieurs musées du Québec présentent des expositions nourries par des découvertes archéologiques et l’été venu, des chantiers de fouilles ouvrent leurs portes aux visiteurs.

Certains d’entre eux vous permettront d’expérimenter la fouille, alors allez-y, creusez!

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