Vénus scientifique

La vie est injuste ! Avéré : les gens beaux réussissent mieux. Ils gagnent plus d’argent, sont plus heureux, même les bébés les préfèrent. C’est dégueulasse ! Cette « tyrannie de la beauté »(1) s’applique-t-elle aux scientifiques ? Des psychologues ont publié le mois dernier dans PNAS une intéressante étude sur les ressorts de la communication scientifique. D’après leurs résultats, les beaux gosses attirent le public, mais (vengeance) les moches sont plus crédibles.

Délit de faciès

Chez les communicants, avoir une belle gueule et être « cool » compte tout autant que le talent. C’est presque une condition à l’exercice de la profession. Il/elle doit alpaguer le public au premier coup d’œil. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder les photos de profils sur les réseaux sociaux. Je ne sais pas par quelle magie (L'Oréal ou Photoshop) tout le monde ressemble à un top model. Alors, question : quand les scientifiques communiquent auprès du grand public, comment joue le physique ?

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A priori, on se dit que l’intérêt du public pour la science, noble et respectable exercice, n’a rien à voir avec l’engouement pour les émissions de variétés. Pour tester cette idée, des chercheurs ont mené une petite expérience. En présentant des portraits de physiciens et de biologistes pris au hasard, ils ont demandé aux participants d’attribuer des qualités : attirant, compétent, sympa. Puis, à travers une série de questions et de tests, les psychologues ont évalué l’attrait des recherches d’après la tête du scientifique.

Il ressort que le public s’intéresse plutôt aux travaux des gens qu’il trouve charmants. Les chercheurs plus âgés ont aussi la côte, quand aux femmes, ben, désolée, elles attirent un peu moins le chaland.

Mais entre l’intérêt au prime abord et le fait de considérer les travaux fiables, il y a une petite nuance. D’après l’étude, le public perçoit les recherches comme étant de « qualité » quand elles sont menées par un scientifique relativement vilain, du genre asocial, pour autant qu’il ait l’air compétent et intelligent.

Intelligence artificielle (petite digression)

Du coup, je me suis quand même demandé : c’est quoi avoir l’air intelligent ?

Je suis tombée sur une étude tchèque assez farfelue publiée dans PLOS en 2014. En bidouillant des portraits et en demandant « trouvez-vous cette personne intelligente ? » à un panel de participants, les chercheurs arrivent à une batterie de critères : les visages qui sont perçus comme très intelligents sont plutôt allongés, avec une distance plus large entre les yeux, un nez plus grand et un menton plus pointu.

Ce qui est hallucinant, c’est que, d’après cette étude, cette perception colle avec les tests de QI, en tout cas chez les mecs, pas pour les filles.

Vous ne sentez rien ? Y’a comme un vieux relent fétide d’anthropométrie… Et surtout c'est du grand n'importe quoi ! Les auteurs se lancent dans des théories fumeuses sur les rouages de la sélection sexuelle : pour assurer la survie de leur progéniture, les femelles choisissent les mâles intelligents, forcément il faut que ça se voit sur leurs visages.

Pardon, tout est ma faute, quand on pose une question idiote, il ne faut pas s’attendre à des réponses intelligentes. Donc, laissons ça…

Mine de rien

… et revenons à nos scientifiques en croisade pour diffuser leurs résultats auprès du grand public.

Il est intéressant de s’arrêter un peu sur les stéréotypes. Savant fou ébouriffé à la Einstein, mec un peu à l’ouest, solitaire, portant des fonds de bouteille, les chercheurs les plus convaincants correspondent au profil classique du « bon scientifique ».

Ouaip…, sauf qu'en science, y’a aussi des blondes ! La photo de cette chercheuse américaine démonte tous les clichés (pas crédible pour un sou la nénette, hymne à l’auto-dérision, j’adore !) :

Dr. Carin Bondar

 

micrologie.com

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(1) sur le sujet, je vous conseille cet excellent article de Jean-François Dortier « la tyrannie de la beauté », dans Sciences Humaines

 

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