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Je m’appelle Maude et je suis indignée. Je ne suis ni une activiste, ni une révolutionnaire, mais tout de même profondément indignée. L’indignation me motive à réfléchir et à dénoncer certaines situations dans le but de bâtir un monde plus juste.

L’indignation a été mon meilleur motivateur: c’est grâce à elle que j’ai décidé de reprendre les études. Maintenant, c’est l’indignation qui guide mes intérêts de recherche. Mes travaux portent sur les facteurs favorisant les inégalités quant à l’accessibilité aux services de physiothérapie.

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Je suis physiothérapeute depuis 2002, et j’ai travaillé dans toutes sortes de milieux et auprès d’une clientèle variée. J’ai choisi la physiothérapie, car il s’agit d’un métier stimulant intellectuellement.

Ce qui m’a d’abord attirée en physiothérapie, c’est la possibilité d’aider à prévenir, à évaluer et à traiter les troubles touchant les fonctions physiques pour aider les gens à garder leur niveau d’activité optimale et leur dignité.

Le contact humain est très présent et me permet d’aider les gens de ma communauté à réaliser leur plein potentiel d’autonomie.

Tout au long de mon cheminement professionnel, je me suis interrogée sur l’efficacité de nos interventions cliniques et les facteurs pouvant les influencer.

C’est pourquoi j’ai pris plusieurs cours post-gradués reliés à cette problématique. Puis, j’ai réalisé que mes interrogations étaient beaucoup plus larges que les modalités d’interventions cliniques.

Cette profession est une science pure, mais également une science humaine. L’issue du traitement est multi-factorielle et la relation établie avec notre patient est de la première importance.

Alors, comment devons-nous agir comme physiothérapeutes pour améliorer les soins de nos patients et de notre communauté, comment faire pour «bien faire»?

J’ai été très choquée dans les milieux cliniques de constater que plusieurs de mes patients qui nécessitaient des soins n’étaient pas priorisés et ne recevaient pas les mêmes services que les autres. J’ai ressenti de la détresse quand j’ai voulu agir pour leur bien, mais que le système ne me le permettait pas. Quelle injustice! C’est donc l’indignation qui m’a poussée à entreprendre un doctorat.

L’indignation: moteur de ma réflexion

Mon intérêt pour la morale a été le fil conducteur de ma carrière et celle-ci s’est orientée naturellement vers la bioéthique. D’ailleurs, la bioéthique est une discipline qui est elle-même née d’une indignation face à des abus.

Un exemple notable, à l’origine de la naissance de la bioéthique, est l’étude Tuskegee. Dans les années 1960, l’étude Tuskegee a été menée par le département de santé publique américain auprès d’une population afro-américaine défavorisée pour étudier l’évolution de la syphilis.

La syphilis était alors une maladie contagieuse mortelle, et l’étude visait à mieux comprendre l’évolution de gens non-soignés. Au cours de l’étude, un traitement efficace a été découvert (la pénicilline), mais il n’a pas été offert aux participants pour ne pas biaiser la recherche en cours. Ainsi, alors que ces individus auraient pu recevoir un traitement efficace leur permettant de survivre à leur maladie, les chercheurs les ont laissés dépérir au nom de la Science.

L’indignation m’a aidée à m’engager pour des causes importantes. Par exemple, j’ai réfléchi aux enjeux éthiques entourant la protection de nos ainés dans les résidences pour personnes âgées au Québec. J’ai eu besoin de réfléchir à cet enjeu, car un de mes patients est décédé dans une résidence alors que le préposé de nuit chargé de la surveillance dormait (et avait débranché les sonnettes d’alarme). En plus d’un article, j’ai écrit un conte urbain et un billet de blogue pour dénoncer largement la situation.

L’indignation: moteur de mon engagement citoyen

Dans un autre registre, j’ai fait une capsule vidéo avec des collègues concernant des faits entourant la loi 10 sur la réorganisation du réseau de la santé dans le but de dénoncer les contradictions de celle-ci avec les résultats de recherche en santé publique.

Cette capsule a été visionnée plus de 10 000 fois! Alors, la recherche, c’est aussi ça: c’est la possibilité de prendre position dans le débat public et citoyen après avoir analysé des faits.

Ainsi, c’est l’indignation qui m’a poussée vers la recherche en bioéthique mais, c’est également l’indignation qui nourrit mes recherches sur la justice. Et j’ai l’impression que par mes réflexions sur le monde, je résiste un peu, à ma façon, aux dérives et aux injustices.

C’est, disons, ma façon d’être citoyenne et de contribuer au bien-être de ma communauté. D’ailleurs, Stéphane Hessel, un militant pour les droits de l’homme, nous rappelle dans son livre Indignez-vous! que: «Créer, c’est résister. Résister, c’est créer.» Et vous, comment résistez-vous?

Je donne