Goliath contre Goliath
(Agence Science-Presse) - Et si la Chine
défiait à son tour les médicaments
brevetés des compagnies pharmaceutiques? Cette
fois, ce ne serait plus un combat de David contre Goliath,
mais de Goliath contre Goliath.
Rappelons lenjeu. Des multinationales
pharmaceutiques mettent au point des médicaments
contre le sida, la malaria ou la tuberculose,
par exemple. Parce quils ont été
très coûteux à produire, ils coûtent
également très cher mais peu importe,
les patients des pays riches ont les moyens, quand ce
nest pas leur gouvernement qui paie, via lassurance-maladie.
Au Sud en revanche, il nen est pas de même:
et cest ainsi que des millions de personnes meurent,
année après année, sans même
avoir su quil existait un médicament.
Alors, à gauche et à droite,
des petites compagnies mettent au point des copies des
médicaments originaux: on appelle cela des médicaments
génériques. Copies qui coûtent
évidemment beaucoup moins cher. Les compagnies
pharmaceutiques napprécient pas, crient
au viol du droit dauteur, et lancent des poursuites
judiciaires. Les plus petits pays dAfrique ou
dAsie, peu intéressés à se
mettre en brouille avec ces géants, ne protestent
que mollement.
Sauf qu'au cours des dernières
années, le vent a commencé à tourner:
le tollé des associations anti-sida a été
tel que les compagnies pharmaceutiques, soudain présentées
comme des ogres sans coeur, ont dû reculer, et
alléger leurs pressions. Mais il sagit
en général de petits pays, où la
perte de marché pour ces compagnies est réduite,
en tout cas supportable.
La Chine et son milliard dhabitants,
en revanche, cest autre chose. Le directeur de
son département des maladies infectueuses, au
ministère de la Santé, Qi Xiaoqiu, vient
donc de faire frémir les géants pharmaceutiques,
en déclarant que la Chine pourrait être
forcée de violer les brevets sur les médicaments
anti-sida, si
les compagnies nacceptaient pas de baisser radicalement
leurs prix dici lan prochain.
"Nous ne pouvons pas nous permettre
dattendre plus longtemps", a-t-il ajouté,
en citant un chiffre déjà connu en Occident:
un million de Chinois seraient infectés par le
VIH. Mais ils sont peut-être, en réalité,
beaucoup plus nombreux, et ils le seront de toutes façons
à brève échéance, si rien
nest fait.
Des pourparlers sont en cours depuis des
mois entre le gouvernement chinois et les géants
pharmaceutiques GlaxoSmithkline, Bristol-Myers Squibb
et Merck. Ceux-ci vendent déjà leurs traitements
anti-sida dans ce pays, et les négociateurs chinois
tentent de les persuader de réduire les prix
de pas moins de 80%.