
Le 23 octobre 2002


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Les archives du Kilimandjaro
(Agence Science-Presse) - Avec ses 5900 mètres,
le Kilimandjaro est la plus haute montagne d'Afrique. A
son sommet, on trouve même de la neige -une denrée
rarissime, en Afrique- de la neige éternelle, dont
la blancheur distingue cette montagne à des dizaines
de kilomètres à la ronde.
Des chercheurs viennent d'extraire une carotte
de glace de ce sommet, afin d'en apprendre davantage sur
les climats des 11 500 dernières années. Et
dans ce qu'ils qualifient du tout premier relevé
glaciaire d'Afrique -on voit mal où ils auraient
pu aller en chercher un autre- ils confirment bien des théories
et ajoutent quelques faits nouveaux aux hauts et aux bas
de ce continent.
Les onze chercheurs, dirigés par Lonnie
Thompson, du Centre de recherches polaire Byrd à
l'Université d'État de l'Ohio, distinguent
deux phases: d'il y a 11 500 à il y a 4000 ans, une
période plus chaude mais plus humide qu'aujourd'hui,
ce qui explique que, comme le savaient déjà
les climatologues, le Sahara ait alors été
une région plus "verte". Et une deuxième phase,
les 4000 dernières années, caractérisée
par un climat plus froid mais plus sec. D'où, avancée
du désert, déplacements vers le Sud d'espèces
végétales et animales, et peuplement humain
concentré sur une fine lisière, au Nord, le
long de la Méditerranée, et loin au Sud, dans
les forêts chaudes.
Le Kilimandjaro s'élève non
loin de l'équateur, dans une région de l'Est
de l'Afrique qui, parce qu'elle n'est pas très loin
de l'Océan Indien, est frappée chaque année
par la mousson.
Mais il y a plus que ces grandes phases que
connaissaient déjà les climatologues. Les
chercheurs décrivent dans la revue Science
ce qu'ils appellent trois périodes de sécheresses
catastrophiques, ayant touché la majeure partie du
continent, et survenues dans la période intermédiaire
entre ces deux phases: il y a 8300 ans, 5200 ans et 4000
ans. Cette dernière date coïncide avec d'autres
données historiques, dites du "Premier Age sombre",
qui font état de la plus ancienne sécheresse
connue des historiens de l'Afrique et de l'Egypte: en fait,
cette sécheresse est connue pour avoir eu des conséquences
sociales, politiques et économiques au-delà
de l'Egypte, jusqu'en Mésopotamie et peut-être
en Inde.
Ces données peuvent-elles nous apprendre
quelque chose à l'heure où notre propre climat
semble fluctuer dangereusement? En
fait oui, une chose: à partir de la vitesse à
laquelle la calotte glaciaire de cette montagne croît
et décroît au fil des âges, les 11 scientifiques
en concluent
que si la tendance actuelle au réchauffement se maintient,
ces "neiges éternelles" pourraient disparaître
d'ici 20 ans. C'est une prédiction que le Dr Thompson
avait déjà faite en février 2001, à
partir de l'analyse de photos satellites, et cette dernière
étude, dit-il, n'a pas modifié son évaluation.
S'il a raison, cela s'ajoutera aux difficultés des
peuples de la région -déjà éprouvés
par la guerre civile de la dernière décennie-
dont l'économie dépend en partie des ruisseaux
de neige fondante qui descendent de la montagne... et des
touristes qui viennent admirer le sommet blanc du Kilimandjaro.
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