
Le 12 août 2004

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La course au-delà des limites
(Agence Science-Presse) - Ils sont forts,
ils sont rapides... Trop forts et trop rapides, peut-être?
Qu'arrive-t-il à un corps qui, pendant des années
d'entraînements, a été poussé
au-delà de ses limites normales?
Il existe par exemple en médecine un
terme étrange: le syndrome de la contre-performance
inexpliquée. Un athlète sur dix en souffrirait,
selon la revue Nature, et comme l'indique son nom,
on en ignore la cause, mais les conséquences en sont
très visibles: l'athlète qui, la saison dernière,
se hissait au rang des plus grands de ce monde, est accablé
pendant des semaines, voire des mois, par la fatigue, les
douleurs musculaires et les infections, au point de ne pas
pouvoir se présenter aux olympiques. La forme va
éventuellement revenir, sans qu'on n'ait jamais pu
comprendre ce qui s'était passé.
Richard Budgett, directeur des services médicaux
à l'Association olympique britannique, voit une cinquantaine
de tels athlètes par année. Il est aussi l'auteur
d'un article paru en 2000 dans le British Journal of
Sports Medicine, qui tente de définir les éléments
permettant de diagnostiquer ce syndrome.
S'agit-il d'un simple passage à vide?
Bien plus. Pour que ça dure plusieurs mois, il faut
que ce soit révélateur d'un problème
physiologique beaucoup plus profond. Peut-être la
nature essaie-t-elle de nous envoyer un message? Tout le
monde n'a pas la même capacité de récupération
après un entraînement, et moins encore après
une semaine ou un mois d'entraînements intensifs précédant
une compétition.
Malheureusement, déplore Budgett, s'il
existe une littérature scientifique abondante sur
la capacité de récupération de notre
corps dans les minutes ou les heures qui suivent un gros
effort, on sait très peu de choses sur l'adaptation
du corps à long terme; et ce ne sont pas les athlètes
qui vont aider les chercheurs, eux qui, à mesure
qu'approche la compétition et que s'intensifie
l'entraînement vont tout faire pour nier fatigues,
douleurs et autres problèmes physiques ou psychologiques.
Lucille Lakier Smith, de l'Université
Tshwane de technologie à Prétoria (Afrique
du Sud), a publié l'an dernier dans la revue Sports
Medicine une analyse des niveaux anormaux d'interleukine
chez les athlètes, immédiatement après
un marathon. L'interleukine est une protéine qui,
entre autres choses, grimpe en flèche chez les patients
victimes de brûlures: elle atténue la douleur
mais en retour, elle les rend plus vulnérable aux
infections. L'hypothèse de Lucille Smith, c'était
qu'un athlète soumis à un effort énorme,
faisait subir à ses muscles des dommages similaires
à ceux d'une brûlure. Le fait que la chercheure
ait observé cette hausse d'interleukine chez les
marathoniens suggère qu'elle a vu juste.
Ce n'est qu'un premier pas: il y a sûrement,
dans ces corps poussés au-delà des limites,
des brassages d'hormones et de protéines dont on
ignore encore tout et qui sont tout sauf bénéfiques
pour leur santé à long terme des athlètes.
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