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semaine du 13 décembre 2004



Le corbeau est malin comme un singe

Pendant qu'on s'extasie sur les singes, on en oublie les corbeaux. Le croiriez-vous: ils semblent aussi intelligents que les singes. Malin comme un singe, cet oiseau noir.

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Mais mal-aimé. Deux articles dans la très pointue revue Science le démontrent cette semaine: l'un, sur des singes capucins qui utilisent des outils. L'autre, sur l'utilisation d'outils par des corbeaux. La majorité des médias du monde ont repris l'histoire des singes capucins. Mais n'ont pas dit un mot du corbeau.

Et pourtant. "Le corbeau est aussi intelligent que les grands singes", titre sans hésiter le National Geographic. "Raisonnement de cause à effet, flexibilité, imagination et prospection": le corbeau a toutes ces qualités qui définissent l'essence même de l'intelligence chez les singes, résument Nathan J. Emery and Nicola S. Clayton, de l'Université britannique de Cambridge, les deux auteurs de cette revue de la littérature scientifique qui, dans l'édition de cette semaine de la revue Science, donne au corbeau ses lettres de noblesse.

"Parce que corvidés (corbeaux, corneilles, geais, choucas, pies) et singes partagent ces outils cognitifs, nous affirmons que des capacités cognitives complexes ont évolué en de multiples occasions chez des espèces très différentes dotées de cerveaux structurés très différemment, afin de résoudre des problèmes similaires."

Ce n'est pourtant pas d'hier que ces oiseaux sont crédités d'une intelligence supérieure à la moyenne. Il y a 2600 ans, le Grec Esope racontait la fable d'un corbeau qui, placé devant un récipient trop haut pour qu'il puisse en boire l'eau, avait jeté des pierres à l'intérieur, jusqu'à ce que le niveau d'eau monte suffisamment. Une fable, certes, mais le fait de l'avoir attribuée à un corbeau n'était pas un hasard.

Aujourd'hui, la littérature scientifique contient des récits de corbeaux qui utilisent le passage de voitures pour casser les noix dont ils se régalent. De geais qui se souviennent d'une quantité considérable d'endroits où ils ont caché leur nourriture –et qui font la distinction entre les caches d'aliments périssables et les autres. De geais, encore, qui s'asseoient sur des nids de fourmis, afin que celles-ci les arrosent d'acide formique... un puissant insecticide qui débarrasse l'oiseau de ses parasites. Ont-ils anticipé l'impact de leur action? Si oui, c'est une réflexion qui implique une cause et un effet: un exploit qu'aucun animal, en-dehors des singes, ne semblait capable d'accomplir.

Et que dire de cette corneille de Nouvelle-Calédonie élevée dans un laboratoire américain qui, l'an dernier, est devenue célèbre en tordant un fil de fer pour qu'il devienne un hameçon capable de récupérer de la nourriture à l'intérieur d'un vase. Mieux encore, elle en est arrivée à choisir, parmi plusieurs fils de fer, celui qui sera de la bonne longueur. Or, si les chercheurs ont choisi la corneille de Nouvelle-Calédonie, c'est parce qu'on l'a déjà vu faire la même chose dans son état naturel: elle y fabrique deux types d'outils, l'un s'apparentant au hameçon (pour extraire les insectes des trous d'arbres), l'autre à une pelle (une feuille soigneusement choisie, avec laquelle l'oiseau balaie sous les détritus de feuilles, jusqu'à ce que des proies sortent au grand jour).

Toutes ces démarches dévoilent une intention claire. L'oiseau a imaginé, dans sa petite tête, le but à atteindre et il a pris les moyens qui s'imposent.

Il a imaginé: voilà un exploit qui, à lui seul, range les corvidés dans une catégorie à part dans le règne animal.

"Ces études, concluent Emery et Clayton, ont démontré que certains corvidés ne sont pas seulement supérieurs en intelligence aux oiseaux des autres espèces (peut-être à l'exception de certains perroquets), mais qu'ils rivalisent aussi avec plusieurs espèces de primates."


Des cerveaux différents, mais dirigés vers le même but

Les structures des cerveaux de ces oiseaux et des primates sont pourtant très différentes, ce qui a d'ailleurs longtemps contribué à rejeter l'hypothèse de l'intelligence: on supposait qu'il y avait quelque chose de très spécifique dans la structure de notre cerveau, quelque chose qui aurait émergé au cours des derniers millions d'années. De toute évidence, l'hypothèse est fausse: cerveaux différentes, mais évolution similaire.

Deux facteurs importants. D'abord, le cerveau des corvidés est très gros: à peu près la même taille que le cerveau d'un chimpanzé.

Ensuite, la vie en groupe. Les créatures dites "sociales", comme les dauphins, les chimpanzés, les humains et les corvidés, ont besoin de mémoriser davantage d'éléments pour vivre en société, ce qui oblige sûrement le cerveau à travailler plus fort.

Le corbeau peut-il nous aider à comprendre d'où provient notre propre intelligence? L'apparition du langage, de la pensée abstraite, des intentions, des désirs, de l'imagination? Oui, répondent Emery et Clayton, certainement autant que les singes capucins du Brésil et les pierres qu'ils utilisent comme outils pour aller chercher la nourriture.

Ce n'est parce que le corbeau ne nous ressemble pas, physiquement parlant, que nous devons le considérer moins intelligent.

Pascal Lapointe

 

 

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