
Le 23 mai 2005

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Clonage: l'éthique pointe le bout de son nez...
mais pas plus
(Agence Science-Presse) - Avec chaque résurgence
du mot clonage, les éthiciens ressortent du
placard les incertitudes qu'ils aimeraient bien voir débattues
sur la place publique. L'annonce sud-coréenne de
la semaine dernière ne fait pas exception. Les éthiciens
seront-ils aussi peu écoutés que d'habitude?
L'an dernier, lorsque les mêmes chercheurs
de Séoul avaient annoncé avoir cloné
avec succès, pour la première fois de l'histoire,
des cellules humaines, les spécialistes de l'éthique
avaient appelé à un débat public, devant
la perspective si lointaine soit-elle que cette
technologie ne débouche sur le "vrai" clonage. Aujourd'hui,
la revue Science profite de la publication de la
nouvelle étude pour ouvrir aussi ses pages à
deux éthiciens californiens qui lancent un appel
similaire.
Car de débat, depuis l'an dernier,
il n'y en a pas eu. L'ONU a repoussé de deux ans
l'idée d'un moratoire sur la recherche (voir
ce texte). Les Etats-Unis s'enlisent dans leurs contradictions
(le gouvernement fédéral ne finance pas ce
type de recherche, mais la Californie a voté en novembre
une initiative qui l'accueillera à bras ouverts).
Et pendant ce temps, les Sud-Coréens ont progressé
à pas de géants, comme en témoigne
le passage d'un taux de succès de 1 sur 200 à
un taux de succès de 1 sur 20 (même la présence
d'un chercheur américain dans leur équipe
a donné lieu à des interrogations: oui,
tout le travail a été fait là-bas,
a assuré Gerald Schatten; non, aucune de mes subventions
de recherche américaines n'a servi à mon travail
là-bas).
La complexité du débat est illustrée
par ce que les éthiciens ont choisi comme enjeu.
Cette fois-ci, leur article
dans Science est bien loin de la banale mise
en garde sur la porte soi-disant ouverte au clonage humain.
Les risque immédiats les plus graves sont: premièrement,
la possibilité de créer un marché d'ovules,
puisque cette nouvelle percée semble avoir mieux
fonctionné grâce à des ovules de femmes
plus jeunes; deuxièmement, les attentes démesurées
que cela crée chez des patients moralement fragiles.
Il est en effet important, écrivent
David Magnus et Mildred Cho, de l'Université Stanford,
de ne pas utiliser les termes "thérapie" et "thérapeutique"
à tort et à travers. "Il n'existe pour l'instant
rien qui puisse être appelé clonage thérapeutique",
puisqu'il n'existe aucun traitement engendré par
ces recherches. "Il est presque certain que les bénéfices
cliniques de ces recherches sont à des années,
voire des décennies, de nous."
De fait, les chercheurs qui bénéficient
des plus gros budgets en sont encore à consacrer
l'essentiel de leurs énergies à simplement
comprendre les racines génétiques des maladies.
Et c'est le but premier de cette annonce sud-coréenne:
en obtenant par exemple une ligne de cellules-souches clonée
à partir d'un diabétique, on espère
pouvoir isoler le bobo génétique. Et si on
l'isole, on peut peut-être l'éliminer. Et ensuite,
réinjecter ces cellules clonées, mais "guéries",
dans le diabétique.
Ce qui demeure, est-il besoin de le dire,
encore hautement spéculatif.
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