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Thérapie génique sur la sellette (suite)
(ASP) - Les critiques disent régulièrement des médias,
et ils ont raison, qu'en rapportant trop de déclarations officielles,
on passe à côté de choses bien plus substantielles.
Ainsi, la semaine dernière, nous faisions
état d'un comité d'enquête institué aux Etats-Unis
à la suite d'un décès dans le cadre d'une thérapie
génique : faites circuler davantage les informations, disait ce comité
aux médecins, rapportez promptement tout progrès ou tout incident,
compte tenu de la nature hautement expérimentale et encore largement
inconnue de ce traitement.
Or, il y a tout plein de choses que ces mots ne permettent pas d'exprimer,
comme nous l'a fait remarquer un lecteur cette semaine. Si le comité
a tellement insisté sur la nécessité de mieux faire
circuler l'information, c'est parce que, pendant les trois jours qu'ont
duré les audiences, et pendant toute la semaine qui a précédé,
on en a entendu des vertes et des pas mûres sur la tendance des chercheurs
de New York et de Boston impliqués en thérapie génique,
à tourner les coins un peu ronds.
A la base, la victime, Jesse Gelsinger, 18 ans, n'aurait
carrément pas dû subir cette thérapie génique,
selon les enquêteurs. Il aurait été trop malade pour
pouvoir supporter sans risque l'intrusion de ces milliards de virus génétiquement
modifiés, qui constituent la force de frappe de la thérapie
génique. Comme son nom l'indique, ce traitement s'appuie en effet
sur la génétique : on tente de combattre un mal héréditaire
en injectant dans l'organe malade -en l'occurrence, le foie- un virus porteur
d'un gène susceptible de réparer le gène défectueux.
Dix-sept autres personnes, atteintes de la même maladie héréditaire
du foie, avaient été précédemment traitées
de cette façon, avant le décès de Jesse Gelsinger,
en septembre. Or, non seulement l'information quant à son état
de santé (son foie était affaibli) n'a-t-elle pas été
transmise aux autorités médicales fédérales,
comme elle aurait dû l'être pour une telle thérapie expérimentale
(les chercheurs affirment que dans la matinée, au moment de subir
le traitement, l'état de santé du patient était revenu
à la normale) ; mais en plus, l'information quant aux effets secondaires
subis par au moins deux, peut-être quatre, des 17 autres patients
n'a, elle non plus, pas été transmise. Et ces effets secondaires
étaient si sévères que, si elle l'avait su, l'Administration
américaine des aliments et drogues (FDA) n'aurait eu d'autre choix
que de mettre le holà sur la thérapie.
Ce n'est pas tout : les chercheurs de l'Université de Pennsylvanie
n'ont pas non plus adéquatement informé la FDA des résultats
des expériences sur des animaux de laboratoire, qui faisaient état,
là aussi, de très graves effets secondaires. Pis encore :
des expériences sur des singes ont conduit à la mort de certains
d'entre eux -un fait qui aurait dû être rapporté, là
encore, à la FDA dans les 15 jours, et qui ne lui a été
rapporté qu'un an plus tard... après la mort de Jesse Gelsinger.
Bref, il se dégage de ces audiences un portrait pas joli joli,
assombri encore par la déclaration officielle des chercheurs, une
semaine avant ces révélations, selon laquelle, bien que la
mort de Jesse Gelsinger soit liée à la thérapie génique,
aucune " erreur humaine " n'aurait contribué à cette
fin tragique.
" La découverte d'autant de trous dans l'un des principaux
centres de ce pays en thérapie génique, résume le Washington
Post, porte un sérieux coup à une branche de la médecine
expérimentale déjà sur la sellette, qui pendant neuf
ans, a tenté de guérir le cancer et d'autres maux en donnant
à des gens de nouveaux gènes, mais qui n'est pas encore parvenue
à réussir une première guérison. "
C'est le même Washington Post qui, un mois plus tôt,
avait carrément accusé le chercheur principal, James M. Wilson,
de l'Université de Pennsylvanie, d'être en conflit d'intérêt,
parce qu'une compagnie qu'il a fondée a des intérêts
financiers dans le succès de la thérapie génique.
Les compagnies, justement, sont
en cause dans tous ces dérapages : c'est en partie à cause
d'eux si cette manie du secret s'est infiltrée. Aucune firme commerciale
n'aime en effet publiquement parler de ses échecs : d'abord, parce
que ça peut nuire à la valeur des actions; ensuite, parce
que ça peut donner des indices aux concurrents.
Le père de Jesse Gelsinger, tout au long des audiences, n'a cessé
d'appuyer les chercheurs, " même s'ils ont commis des erreurs
". Il a plutôt blâmé la FDA, pour ne pas avoir fait
cesser les traitements avant la mort de son fils, alors qu'elle commençait
tout de même à avoir certaines informations comme quoi tout
n'allait pas pour le mieux dans le meilleur des mondes. Les parents d'autres
enfants malades ont également demandé aux autorités
fédérales de ne rien faire pour ralentir la recherche en thérapie
génique.
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