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Semaine du 13 octobre 1997


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CASSINI, SATURNE ET LE PLUTONIUM

 


Après plus de 15 années de préparatifs, la sonde Cassini-Huygens nous a quitté cette semaine pour Saturne. Un voyage de sept ans qui fera d'elle le premier engin à examiner en détails la planète aux anneaux, et à envoyer un appareil se poser sur une de ses lunes, Titan.

 Et un voyage qui aura débuté par la plus violente controverse à laquelle avait jamais été mêlée une sonde spatiale.

 La sonde Cassini a été lancée mercredi matin, avant l'aube. Tout va bien à bord.


Histoire d'une guerre

Les protestations contre la sonde Cassini pourraient être une bonne illustration de l'histoire du type qui utilise un bazooka pour tuer une mouche... et qui rate la cible!

"Nous réclamons une interruption immédiate de la mission Cassini", répète depuis des mois la "Coalition de Floride pour la paix et la justice", à laquelle se sont greffés des dizaines d'associations écologistes et anti-nucléaires. Leur argument: la sonde transporte 25 kg de plutonium qui lui serviront de carburant pour son long voyage vers Saturne. Or, le plutonium est une substance épouvantablement toxique. S'il devait survenir un accident, les conséquences pourraient être catastrophiques.

Sauf que ce qu'on oublie, c'est que même s'il se produisait un accident, il n'est pas sûr que le plutonium s'échapperait: ses caissons sont conçus pour résister à des tensions extrêmes. Et s'il s'échappait, il n'est pas sûr qu'il trouverait des humains sur son chemin.

Une explosion dans les deux minutes suivant le décollage, par exemple -comme la navette Challenger en 1986- ferait retomber les débris dans la région du Cap Canaveral, en Floride. A supposer que le plutonium s'échappe, la Nasa évalue la zone contaminée à un demi-kilomètre carré. Sur 50 ans, le nombre de cancers mortels pourrait être de... un.

Il existe certes un scénario-catastrophe: imaginons que lors de son passage près de la Terre, en 1999, Cassini change soudain de direction, et rentre dans l'atmosphère. Selon la Coalition, "la désintégration pourrait créer un nuage de plutonium qui couvrirait la majeure partie de la planète".

Sauf qu'il faudrait pour cela que se produisent une série d'événements très improbables: que Cassini échappe aux contrôles; qu'elle se désintègre; que le plutonium s'éparpille; qu'il le fasse autour du globe, et non au-dessus d'une région. Et même si cela se produisait au-dessus d'une région: en 1978, un satellite-espion soviétique, Cosmos 954, fonctionnant lui aussi au plutonium, s'était s'écrasé dans les Territoires du Nord-Ouest. Seules de faibles radiations ont été détectées -et aujourd'hui, on n'est même pas sûr qu'elles provenaient de ce satellite.

"Il n'existe aucune raison pour prendre le risque d'envoyer du plutonium sur un vaisseau spatial", renchérit la Coalition, pour qui la source d'alimentation habituelle, l'énergie solaire, devrait suffire. Or, aux distances abyssales dont il est question ici, s'il ne fallait compter que sur des panneaux solaires, "il faudrait un vaisseau aussi grand qu'une maison." C'est ce que rétorquait l'astronome américain Carl Sagan en... 1989, alors qu'une autre protestation, moins bruyante celle-là, accompagnait le lancement de la sonde Galileo vers Jupiter. Galileo était elle aussi équipée de plutonium, comme plusieurs autres avant elle.

"Une sécurité absolue est une chose qui n'existe pas", ajoutait Sagan. Mais lorsqu'on est rendu à parler d'une probabilité d'accident de un sur un million -et un accident de loin moins apocalyptique que celui imaginé- "je vote pour le lancement".

Par contre, pour les satellites en orbite terrestre, comme Cosmos 954, c'est autre chose. Rien ne semble justifier qu'ils soient équipés de plutonium plutôt que de panneaux solaires. Compte tenu qu'un satellite en orbite est voué, tôt ou tard, à retomber, les futurs protestataires auront là une cible plus facile que Cassini...


Grand dossier sur la mission Cassini-Huygens, par le San Jose Mercury.

Site sur la mission Cassini-Huygens


Site officiel de la Nasa
sur la sonde Cassini

 


Texte et recherche: Pascal Lapointe