SPECIAL CONGRES DE L'ACFAS
Du 11 au 15 mai,
5000 participants se sont réunis à l'Université Laval,
à Québec, pour le 66e Congrès de
l'Association canadienne française
pour l'avancement des sciences (ACFAS).

Les grosses aiment les petites
QUEBEC - Eh bien oui, les petites côtoient aussi les grosses! Jusqu'à
présent, les astronomes croyaient qu'il était impossible qu'une
étoile "légère" naisse à proximité
d'une étoile massive, et considéraient donc que les deux types
d'étoiles venaient nécessairement de deux parties différentes
du ciel. Les astrophysiciens québécois Laurent Drissen, de
l'Université Laval, et Anthony Moffat, de l'Université de
Montréal, ont toutefois démontré le contraire avec
l'aide du télescope spatial Hubble, et c'est une des choses qu'ils
sont venus expliquer au congrès de l'ACFAS.
Les étoiles prennent naissance lorsqu'un nuage moléculaire
très froid se comprime. Des grumeaux se forment et, avec la gravité,
deviennent tranquillement des étoiles. "Les étoiles massives
(qui ont de 15 à 120 fois la masse du Soleil) se développent
très rapidement, explique Laurent Drissen, elles sont très
chaudes et très lumineuses et c'est pourquoi on croyait que le fort
rayonnement ultra-violet qu'elle dégagent empêchait la condensation
d'étoiles de faible masse": les U.V. réchaufferaient
les nuages moléculaires avoisinants, et les forceraient à
se dissiper au lieu de se comprimer.
Mais cette hypothèse n'est plus valable, si l'on en croit les
observations des deux astronomes. Dans l'amas NGC 3603, où se retrouve
la plus grande concentration d'étoiles de notre galaxie, à
20 000 années-lumière de la Terre, les chercheurs ont, pour
la première fois, observé ce type de cohabitation entre "grosses"
et "petites" étoiles.
Karina Laberge
(15 mai 1998)
L'immigration fait rajeunir
QUEBEC - Sans l'apport des enfants nés au Canada de mères
immigrantes, l'âge moyen des Montréalais serait de 37 ans,
plutôt que des 36 ans et demi actuels. Un écart qui semble
minime, mais qui, pour les démographes, est très significatif:
les immigrants contribuent au rajeunissement de la population québécoise!
C'est la conclusion qu'est venu présenter au congrès de
l'ACFAS Ayéko Appolinaire Tossou, étudiant au doctorat à
l'Université de Montréal. La tendance qu'il souligne, de plus,
ne s'arrête pas là: les immigrantes installées à
Montréal donnent naissance à 2,3 enfants en moyenne, contre
seulement 1,5 enfant pour les femmes nées au Canada. Un tel taux
reste insuffisant pour assurer le maintien de la croissance de la population
du Québec, laquelle, selon les démographes, devrait commencer
à diminuer vers 2030.
(15 mai 1998)
Revues savantes sur Internet: ça traîne
encore
QUEBEC - Il y a quatre ans, les internautes de la première heure
regardaient d'un côté l'évolution fulgurante du Net,
et de l'autre les revues universitaires de chercheurs et se disaient: quel
beau couple! Voilà des publications hyper-spécialisées,
indispensables à leur lectorat, mais un lectorat tellement limité...
Quoi de plus logique que d'abandonner le papier et de ne publier qu'en format
électronique?
Un dossier spécial de l'Agence
Science-Presse
(14 mai 1998)
Un champignon pesticide
QUEBEC - Un petit champignon pourrait bien améliorer la qualité
de vie des paysans africains. Ce champignon microscopique, que des chercheurs
de l'université McGill et des collègues africains ont réussi
à isoler, viendrait à bout d'une mauvaise herbe qui envahit
les champs de céréales en Afrique.
Le champignon en question, appelé Fusarium oxysporum, est originaire
du Mali. Et la mauvaise herbe, la striga, est une véritable peste
pour les agriculteurs de là-bas, parce qu'elle suce littéralement
toutes les substances nutritives du plant de céréale. Le Fusarium
aurait pour caractéristique d'empêcher cette mauvaise herbe
de se fixer aux racines du sorgho, du millet et du maïs. Lors d'essais,
la striga a été éliminé à plus de 85%.
Or, quand on sait que la striga peut causer la perte de deux tiers des
récoltes de sorgho, de millet et de maïs dont se nourrissent
les populations locales, qu'elle menace la sécurité alimentaire
de plus de 100 millions de personnes et que la seule méthode connue
de lutte était jusqu'ici... l'arrachage, on mesure mieux l'importance
de cette découverte.
(13 mai 1998)
Un gel anti-MTS
QUEBEC - Un gel pour prévenir les maladies transmissibles sexuellement:
c'est ce qu'est venu mettre sur la table, si l'on peut dire, un groupe de
chercheurs du Centre hospitalier de l'Université du Québec
au cours de la deuxième journée du congrès de l'ACFAS.
"Le passage de l'état fluide à la température
ambiante permettrait au gel de former une barrière qui préviendrait
l'infection en bloquant la diffusion des pathogènes vers les muqueuses",
expliquent les chercheurs, en ajoutant que des expériences in vitro
auraient permis de bloquer jusqu'au passage du virus VIH, le virus responsable
du sida.
Avant de grimper au plafond, il est important de souligner que ce gel
n'a aucunement pour prétention de tuer le virus, mais seulement de
lui fermer la porte. Des tests prometteurs ont également été
réalisés sur des femelles lapins et des souris, qui ont permis
de conclure à l'absence de toxicité du produit, appliqué
sur les muqueuses.
"Ces résultats démontrent que l'utilisation de notre
gel constituerait une mesure de prévention innovatrice afin de réduire
la transmission sexuelle du VIH, de l'herpes et autres MTS." Reste
à savoir ce qu'en diront les essais cliniques...
(13 mai 1998)
La préhistoire n'est plus ce qu'elle était
QUEBEC - Après 200 nouveaux sites archéologiques en 12
ans, des fouilles intensives dans une demi-douzaine d'entre eux et des milliers
d'artefacts, le portrait qui se dégage des populations humaines qui
sont passées par l'Abitibi au cours des derniers milliers d'années
est beaucoup moins simpliste que ce qu'on en disait jusqu'ici.
C'est ce qu'est venu dire à un auditoire conquis d'avance l'archéologue
Marc Côté, de la corporation Archéo-08, qui avait reçu
en 1986 du ministère de la Culture et des Communications du Québec
le mandat d'élaborer et de réaliser un plan de recherches
archéologiques en Abitibi-Témiscamingue. M. Côté
effectuait cette présentation au milieu d'un colloque d'une journée
entièrement consacré aux "perspectives futures de la
recherche en préhistoire au Québec", de l'Abitibi à
la Côte Nord en passant par le Saguenay et des périodes dont
le profane n'a jamais entendu parler, du Sylvicole inférieur à
l'Archaïque.
"La préhistoire du Nord-Ouest québécois a titillé
l'imagination des archéologues depuis le début du XXe siècle",
a rappelé Marc Côté, et ce titillement n'est pas étranger
aux portraits plus romantiques que réalistes qui se sont petit à
petit dégagés. Mais ce que ses fouilles permettent de dégager
-à tous les sens du mot- depuis 12 ans, ce sont des changements culturels
marqués d'une époque à l'autre, et non des sociétés
statiques; des peuples qui entretiennent des contacts avec d'autres peuples,
parfois à de très grandes distances; des bouleversements,
d'un millénaire à l'autre (les plus anciennes traces d'occupation
en Abitibi remontent à 7000 ans), conditionnés par des mouvements
de population ou des changements climatiques. Bref, une (pré)histoire
fort complexe, et où tout reste encore à écrire...
(13 mai 1998)
L'armée du cancer recule sur tous les fronts
QUEBEC - Nous en parlions il y a quelques semaines (voir
la manchette du 23 mars), et la chose se confirme chez nous: le taux
de mortalité par cancer de la prostate au Québec a diminué
en 1996, après avoir grimpé chaque année jusqu'en 1989,
et s'être stabilisé entre 1989 et 1995.
C'est ce qu'un groupe de chercheurs (François Meyer, Lynne Moore,
Isabelle Bairati et Yves Fradet) a présenté lundi au congrès
de l'ACFAS, en se permettant du même coup un regard prudent vers l'avenir:
l'avancement des pratiques médicales, la prise de conscience de la
population quant à la prévention, et à présent
ces chiffres encourageants, permettent d'être -un peu- optimiste.
Les taux d'incidence du cancer de la prostate, eux, avaient été
stables jusqu'en 1989, avaient augmenté de 9% entre 1989 et 1993
-conséquence du dépistage systématique, disent les
chercheurs- puis s'étaient stabilisés jusqu'en 1995. Avant
de diminuer en 1996.
En fait, ces chiffres ne surprennent pas les spécialistes, puisqu'ils
viennent appuyer ceux d'une vaste étude américaine menée
autour non pas uniquement du cancer de la prostate, mais de 23 types de
cancer: entre 1990 et 1995, leur incidence moyenne a connu une baisse de
0,7 % par année... alors qu'entre 1973 et 1990, on parlait plutôt
d'une hausse de 1,2 % par année!Le nombre de décès
est également en baisse, de 0,5 % par année, contre une hausse
de 0,4 % par année entre 1973 et 1990.
(12 mai 1998)
Dépister pour dépister
QUEBEC - Dire ou ne pas dire? Dépister ou ne pas dépister?
Les progrès fulgurants de la génétique au cours de
la dernière décennie ont fait miroiter de nombreux espoirs,
et ouvert la porte à des traitements aussi efficaces qu'inédits.
Mais n'y a-t-il pas des limites morales à ce qui peut être
annoncé, ou fouillé?
C'est la question que pose tout haut le Groupe de recherche en génétique
et éthique du Québec, qui organisait, dans le cadre du congrès
de l'ACFAS, un colloque d'une journée, sur l'épineux problème
du dépistage génétique. Problème épineux,
par exemple, dans le cas des porteurs de gènes qu'on appelle délétères:
les porteurs ne souffriront jamais de la maladie, mais risqueront de la
transmettre à leurs descendants. Faut-il organiser des dépistages
systématiques?
Tout au long de la journée, entre génome humain et diagnostics
prénataux, les participants ont navigué entre la prudence
et l'incertitude... et la critique des réglementations, celles d'aujourd'hui
comme celles d'hier.
Il existe par exemple un consensus pour ne pas obliger les personnes
d'âge mineur à se soumettre à des tests de dépistage
génétique, et attendre qu'ils soient en mesure de prendre
eux-mêmes la décision. Mais qu'en est-il des embryons? Difficile
de refuser à des parents des tests prénataux, ont souligné
Richard Gagné, Marcel Mélançon et Bruno Leclerc dans
le cadre d'une étude intitulée on ne peut plus prudemment:
"L'information génétique en période prénatale:
que faire?" Mais en autorisant de tels tests, ne commence-t-on pas
déjà à étiqueter l'individu avant même
sa naissance?
Plus compliqué encore, s'est-on demandé en après-midi,
alors que le débat se concentrait sur les concepts aussi vagues que
l'autonomie et le consentement. Tout le monde veut que le patient prenne
une décision "éclairée", mais quelle est
la quantité d'information nécessaire pour en arriver à
une décision "éclairée"?
Et pour compliquer encore plus le tableau: les experts eux-mêmes
ne sont sûrs de rien. On veut bien donner un maximum d'information
au patient, mais il y a encore des tas de choses que la génétique
ignore, a rappelé Ingeborg Blancquaert, du Conseil d'évaluation
des technologies de la santé du Québec, à Montréal.
Difficile donc, de répondre à un patient qui veut savoir,
à la lumière du diagnostic qu'il vient de recevoir, quelles
sont ses chances de contracter la maladie.
Y aurait-il des cas où, en définitive, le dépistage
ferait plus de mal que de bien?
(12 mai 1998)
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