Saviez-vous quel est le plus gros problème des biologistes qui étudient l’évolution? Le sexe. Non, ça n’a rien à voir avec la façon dont ils utilisent leurs temps libres. Plutôt avec ce qui s’est passé il y a très, très longtemps.

C’est que d’un point de vue bêtement biologique, le sexe n’a pas de sens. La reproduction à la manière des bactéries —une bestiole qui fabrique une copie d’elle-même— est beaucoup plus logique : moins de risques d’erreurs que lorsqu’on mélange les gènes d’un mâle et d’une femelle, pas de rivalités entre mâles, et comme chaque copie peut en produire d’autres, en peu de temps, il y a beaucoup plus de descendants.

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Comme quoi ça fonctionne: non seulement la vie sur Terre s’est-elle entièrement reproduite sans sexe pendant plus de 4 milliards d’années, mais en plus, la forme de vie dominante aujourd’hui —la bactérie— continue de se débrouiller très bien.

C’est ce qui fait de la sexualité « la reine des problèmes de l’évolution », selon l’expression consacrée. Les plus grands esprits de la biologie du 20e siècle y ont travaillé le plus sérieusement du monde. Plusieurs théories ont été avancées, mais aucune n’a réussi à satisfaire (par exemple, le mélange des gènes qu’engendre la sexualité ne provoque pas autant de diversité qu’on l’imagine, en tout cas pas à court terme).

La question serait peut-être résolue si on pouvait pointer du doigt à quel moment nos lointains ancêtres ont « évolué » vers la sexualité, et ces dernières annnées, la recherche a fait de grands pas dans cette direction. Bill Martin, de l’Université de Düsseldorf, en Allemagne, a par exemple l’oeil sur la mitochondrie. Cette « centrale d’énergie » de nos cellules est présente chez presque tous les organismes dits eukaryotes (y compris tous les organismes avancés) dont un microbe à une seule cellule appelé Giardia que l’on croyait appartenir à une autre lignée... et qui semble se reproduire de manière sexuée.

Le Giardia serait-il un eukaryote primitif, un genre d’étape intermédiaire entre les bactéries qui se reproduisent en se divisant et tout le reste du règne animal et végétal? C’est ce que croient Joel Dacks, de l’Université de l’Alberta à Edmonton et Andrew Roger, de l’Université Dalhousie à Halifax : cité dans le New Scientist , ce dernier affirme que « nous pouvons maintenant dire avec certitude que toutes les lignées d’eukaryotes descendent d’un ancêtre commun qui avait une mitochondrie ».

La mitochondrie n’est pas seulement le moteur de la cellule : tout tend à croire que ce fut jadis une bactérie indépendante, qui a un jour infiltré les cellules de nos lointains ancêtres et n’en est jamais sortie. Y aurait-il dans cette infiltration le lien avec les mutations qui ont conduit au développement du sexe?

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