On a beaucoup dit combien l’élection d’un premier président Noir avait changé les attitudes —et c’est vrai, autant pour de jeunes Afro-américains qui y voient d’ores et déjà un modèle que pour d’autres groupes obligés de remettre en question leurs vieux préjugés. Mais, étonnamment, il y a un revers à ce changement d’attitude... lorsqu’il sert de prétexte pour se déculpabiliser.

Exprimé plus cruellement : « certains de ceux qui ont voté pour Obama se sentent plus libres de faire preuve de racisme ». Daniel Effron, de l’Université Stanford, a en effet mesuré cet impact par des voies détournées : par exemple, en demandant à des gens comment ils se sentiraient avec un chef de police Blanc ou Noir, avant ou après avoir vérifié s’il avaient voté pour Obama ou McCain.

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Ceux qui avaient exprimé leur appui à Obama avant la question sur le chef de police étaient plus susceptibles de choisir un Blanc que ceux qui avaient exprimé leur appui à Obama après la question. Comme si, suggère Effron, cela leur avait donné « la crédibilité morale » pour donner une opinion qui pourrait être perçue comme raciste.

Plus décourageant : cette même étude laisse entendre que des gens pourraient être moins intéressés à donner à des organismes de charité desservant des communautés noires, une fois qu’ils ont admis avoir voté pour Obama.

Il n’y a pas de raisons, reprend Effron, pour que de telles attitudes ne s’appliquent qu’à Obama. N’importe quelle vedette politique pourrait en être la victime : Hillary Clinton ou Sarah Palin, dit-il, pourraient très bien avoir eu un semblable impact négatif sur l’attitude à l’égard des femmes.

Toutefois, du côté des bonnes nouvelles, on ne peut pas négliger que les préjugés ont vraisemblablement reculé, et dans les années à venir, ça devrait pouvoir se vérifier statistiquement. Déjà, dans une étude parue (comme les autres études mentionnées dans cet article) dans le Journal of Experimental Social Psychology, l’équipe du psychologue Ashby Plant, de l’Université d’État de Floride, décrit une dégringolade des préjugés chez les étudiants, entre 2006 et le sommet de l’Obama-manie précédant l’élection. Brian Nosek, de l’Université de Virginie, qui entretient un site web mesurant les préjugés implicites, observe lui aussi une baisse, commencée en janvier 2007.

Reste juste à savoir combien de temps cet « effet Obama » durera —dans un sens ou dans l’autre.

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