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La remise du Nobel de physique aux investigateurs du graphène suscitera des réactions mitigées : matériau fascinant, qui a engendré une avalanche de recherches... mais dont les retombées pratiques demeurent encore hypothétiques.

Est-ce un métal? Pas vraiment : le graphène consiste en une feuille de... un atome d’épaisseur! Un matériau rare? Non plus : vous en avez probablement à la maison. On en trouve dans la mine de crayon.

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Pour le trouver par contre, c’est autre chose. Bien que le graphène soit connu depuis 1947, la méthode pour l’extraire — qui représente la principale contribution des deux gagnants du Nobel de physique de cette année — a dû attendre 2004. Elle est d’une simplicité en apparence indigne d’un Nobel de physique : une mine de crayon et du ruban adhésif. Avec le ruban adhésif, on arrache des morceaux de graphite — c’est-à-dire la mine de crayon— et on... espère trouver du graphène dans le lot.

Facile, mais compliqué. C’est cette percée, publiée dans Science en 2004, qui a engendré une avalanche de recherches, notamment de la part de l’industrie de l’informatique, pour décoder les propriétés de ce matériau hors du commun.

Car étonnamment, lorsqu’on passe de la « pile de feuilles » — le graphite — à « la feuille unique » — le graphène — les propriétés changent du tout au tout. Tout d’abord, le graphène a beau ne mesurer qu’un atome d’épaisseur, il est le matériau le plus résistant du monde : les liens entre ses atomes de carbone, disposés en hexagones comme une ruche d’abeille, sont les plus puissants que l’on connaisse —plus puissants, semble-t-il, que ce qui donne au diamant sa dureté. Autre découverte : le graphène est hautement conducteur d’électricité... et les physiciens ne s’entendent pas pour dire pourquoi!

C’est ce qui fait croire à IBM et aux autres compagnies qui investissent lourdement dans le domaine, qu’il serait possible de fabriquer grâce au graphène des transistors encore plus rapides et des connexions encore plus petites. D’où, encore plus de miniaturisation, alors qu’avec le silicium, on approche en ce moment d’un mur (appelé la loi de Moore, pour les intimes). Le comité Nobel parle aussi, dans son communiqué, d’applications dans les polymères et même dans le séquençage d’ADN.

Là est toutefois le problème qui suscite des réactions mitigées face à la décision du comité Nobel. Ces applications, elles n’existent que sur papier, ou bien à une échelle très expérimentale. La possibilité d’utiliser le graphène pour du séquençage d’ADN, par exemple, est parue il y a seulement un mois dans la revue Nature (à la Une, tout de même). C’est un peu tôt pour espérer en trouver en magasin à Noël.

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