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semaine du 19 janvier 2004



Pourquoi nous n'irons pas sur Mars

Dans les romans de science-fiction des années 50 et 60, on imaginait un premier voyage vers Mars avant l'an 2000, soit une génération plus tard. Aujourd'hui, une annonce présidentielle fait état de délais similaires. Or, l'échéance de 2030 n'est guère plus réaliste que ne l'était celle de l'an 2000.

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Pour quatre raisons:

1. La santé

Si vous êtes dans une cabine spatiale pendant six mois, entre la Terre et Mars, et six autres mois au retour, vous devrez prévoir une protection anti-radiations supérieure à ce qui existe aujourd'hui. Des particules chargées électriquement sont émises en permanence par le Soleil. Lors des éruptions les plus violentes, comme celle de l'automne dernier, les astronautes de la station spatiale doivent aller se réfugier dans une pièce protégée, spécialement conçue à cet effet. La protection devra être encore plus poussée sur une fusée interplanétaire, puisqu'en cas de pépin, il n'y a pas de retour possible vers la Terre.

Mais il y a aussi la santé psychologique. Pendant les années 70 et 80, les Américains et surtout, les Soviétiques, ont étudié les effets physiques d'un long séjour dans l'espace: décalcification des os, perte de l'équilibre dans l'oreille interne, nausées, etc. Mais il a fallu attendre les années 90 avant qu'on ne commence à s'interroger sur la psychologie (résumé des problèmes de santé possibles dans cet article du Houston Chronicle).

Imaginez devoir partager un espace clos, 24 heures sur 24, avec les mêmes personnes, dont vous finissez par connaître toutes les manies, avec qui vous n'avez plus aucune intimité –et par-dessus tout, il y a cette impossibilité de vous en échapper pour aller faire un tour dehors. Imaginez que le seul contact avec les gens aimés qui sont restés sur Terre le soit par des communications radio, et que même un dialogue devienne progressivement impossible à mesure que vous vous éloignez de la Terre (il faut alors compter quelques minutes avant d'avoir la réponse à une question).

Il y a des gens que l'on croyait pourtant hyper-entraînés et hyper-solides (dans l'armée par exemple) qui ont claqué des dépressions pour moins que ça.

A ce jour, on n'a pas l'ombre d'un début de solution à ce problème, qui est celui dont on parle le moins dans les médias, mais celui qui fait le plus peur aux organisateurs d'une expédition interplanétaire.

Car un espace clos reste un espace clos, même si on y a introduit la meilleure technologie du monde.

 

2. L'argent

A court terme par contre, c'est lui le facteur-clef. Le projet d'un retour sur la Lune, suivi de missions vers Mars, déposé en 1989 par l'autre George Bush, le père, et qui avait été rejeté par le Congrès, aurait nécessité un budget estimé entre 400 et 500 milliards de dollars.

Or, le budget de la Nasa est actuellement de 15 milliards par an. Dans son discours, l'actuel George Bush ne propose qu'une augmentation d'un milliard... sur cinq ans. On est loin du compte.

Les plus optimistes parlent déjà d'une réorganisation administrative de la Nasa: un terme pudique qui englobe les nombreuses erreurs de parcours qui, étalées sur deux décennies, sont en partie responsables des tragédies des navettes Challenger il y a 15 ans, et Columbia l'an dernier. Mais même en mettant fin au programme des navettes en 2010, même en annulant la dernière mission de réparation du télescope Hubble, même en supposant que la technologie actuelle permette d'envoyer des hommes là-haut à moindre prix -ce qui reste à prouver- et même en mettant fin au programme de la station spatiale –recommandation avancée jusque sur le site des fans de l'exploration spatiale, Space.com, il faut le faire!– on reste loin des centaines de milliards de dollars nécessaires.

Avant le discours du président Bush, alors qu'on en connaissait déjà tous les détails sauf le budget, Space.com appelait de tous ses voeux une augmentation de 15 à 20 milliards$ du budget de la Nasa.

Un retour sur la Lune est certes possible avec le budget actuel et les progrès technologiques survenus depuis les missions Apollo d'il y a 30 ans. Mais un voyage vers Mars est irréaliste. Du moins, un voyage sécuritaire.

 

3. La politique versus la science

Il est impossible de prouver que cette annonce du président Bush soit liée au fait que l'on approche des élections. Mais chose certaine, le fait qu'elle survienne dans une année électorale est une mauvaise nouvelle pour la science: les élus démocrates au Congrès auront tout intérêt à attaquer les failles du projet, eux aussi pour des raisons électorales.

Le projet est loin d'être aussi solide qu'il en a l'air. Ce qui en survivra après novembre prochain –date des élections présidentielles – dépend beaucoup plus, désormais, de jeux politiques que d'une recherche scientifique neutre et rigoureuse.

Il n'y a "aucune explication raisonnable", "aucune raison spécifique" à ce plan, en-dehors de la grande aventure, déplore par exemple Robert Park, directeur de la Société américaine de physique. Veut-on trouver de la vie sur Mars? Si oui, des robots feraient l'affaire. Veut-on évaluer si, à long terme, une exploitation minière, voire une colonisation de la planète rouge, sont possibles? Là encore, des robots pourraient déblayer le terrain au cours des prochaines décennies, pour une fraction du coût.

"Nous ne mettons pas notre doigt dans un liquide pour en vérifier la température, nous plaçons un thermomètre".

 

4. Laisser le temps au temps

Comme l'ont écrit maints philosophes et penseurs du XXe siècle, il est tout à fait possible que le destin de l'humanité réside dans le cosmos. Mais c'est là une perspective à long terme, au même titre qu'il a fallu des siècles à nos ancêtres avant d'oser franchir l'océan. Ce n'est pas parce qu'une technologie existe –en l'occurrence, la technologie nécessaire à un voyage Terre-Mars– qu'elle est immédiatement employée.

Et ce n'est pas parce qu'une idée est excellente, voire logique, qu'elle fonctionne dans la réalité. En 1972, le président américain Richard Nixon avait lui aussi eu son heure de gloire spatiale, lorsqu'il avait lancé le projet révolutionnaire d'un "véhicule réutilisable" censé réduire considérablement le coût des voyages dans l'espace.

Ce fut la navette spatiale. Elle coûta 10 fois ce qui avait été prévu... et on connaît la suite

Pascal Lapointe

 

 

En manchette la semaine dernière:
Pourquoi Mars?

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