Semaine du 24 janvier 2000

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Ebats transgéniques


F
aut-il des aliments transgéniques ou non? Pendant que les grands de ce monde palabrent cette semaine à Montréal, les écologistes s'indignent, les scientifiques s'indignent, et les compagnies s'indignent. Qui dit vrai?

 

Ce qu'on peut lire ou entendre dans les journaux ou à la télé, dans le cadre de cette conférence internationale sur la biodiversité, se résume à ceci : les pays producteurs, dont le Canada et, surtout, les Etats-Unis, sont très réticents à l'idée d'un étiquetage des aliments transgéniques, alléguant qu'aucune forme d'étiquetage ne sera satisfaisante (faudrait-il étiqueter le boeuf non-transgénique s'il a été nourri d'aliments transgéniques?). Les écologistes protestent contre toute forme de manipulation de la nature, alléguant que notre connaissance des risques est trop réduite. Les compagnies enfin, affirment que toutes les études possibles sur la santé ont été réalisées et ne veulent rien entendre d'une quelconque barrière à l'exportation.

Ce que vous ne lirez pas, par contre, peut se résumer à ceci : l'argument premier des Etats-Unis pour s'opposer à un étiquetage est que cela ferait perdre des milliards de dollars déjà investis à leur industrie agricole -les semences sont déjà achetées, les contrats avec les acheteurs européens ou asiatiques sont signés, etc. Du côté des écologistes, l'argument premier pour s'opposer aux aliments transgéniques repose sur du vent (il y a bel et bien eu de nombreuses études, et elles n'ont pas découvert le moindre impact négatif). Enfin, l'industrie agricole européenne est d'ores et déjà prête pour profiter de la débandade de son homologue nord-américaine, si celle-ci doit se cogner le nez aux frontières du Vieux continent.

Faut-il croire Christoph Bail, chef-négociateur pour l'Union européenne, lorsqu'il déclare que l'Europe favorise un traité sur les aliments transgéniques (traité qui imposerait l'étiquetage), non pas pour elle-même, mais pour aider les nations sous-développées? Faut-il croire les Américains, lorsqu'ils accusent les Européens de ne réclamer un traité que pour limiter les importations et ainsi, protéger leur marché?

Ce ne serait pas la première fois : les Etats-Unis sont déjà en conflit avec l'Union européenne, depuis la décision de cette dernière, en 1989, d'interdire l'importation en Europe d'hormones bovines synthétiques.

Cette Conférence internationale sur la biodiversité (dans les faits, il serait plus juste de l'appeler " Conférence internationale sur les aliments transgéniques "), qui réunit à Montréal des représentants de 134 pays du 24 au 28 janvier, est la deuxième partie d'une bataille entamée en février 1999 à Carthagène, en Colombie. A cette occasion, les principaux pays producteurs, appelés " Groupe de Miami " (Etats-Unis, Canada, Australie, Argentine, Uruguay, Chili) avaient catégoriquement refusé l'étiquetage des produits transgéniques " destinés à l'exportation ". L'Union européenne réclamait cet étiquetage et, bien sûr, elle continue de le réclamer. Les pays du Groupe de Miami répètent que si l'étiquetage est possible au niveau des semences, en revanche, une fois ces semences transformées (huile de canola, par exemple), le mélange est tel qu'il est impossible de dire ce qui contient " du transgénique " et ce qui n'en contient pas.

Depuis février 1999 toutefois, la donne a considérablement changé : les mouvements de protestation " anti-transgénique ", qui secouaient l'Europe depuis deux ans, ont gagné l'Amérique du Nord. C'est ce qui fait dire au New York Times que les Etats-Unis sont plus que jamais isolés : cette fois, la pression sera beaucoup plus sur eux que sur les pays européens.

Il ne reste qu'à voir si le jeu de coulisses aux Etats-Unis sera suffisant pour faire pencher la balance : d'un côté, les lobbys écologistes, pas si puissants qu'il y a 10 ans, mais tout de même très bruyants; de l'autre, la puissante industrie agricole, grâce à laquelle, l'an dernier, au moins le tiers des champs de blé américains contenaient des plants modifiés génétiquement. Ca fait beaucoup de sous en jeu...

Mais même là, nul besoin d'être un grand prophète pour voir que le vent a tourné, et que les Etats-Unis sont voués à plier. Le géant américain des biotechnologies Monsanto est sur la sellette depuis plus d'un an, entre son mythique gène Terminator et ses graines " louées " à des agriculteurs; le géant de la nourriture pour bébés Gerber and Heinz s'est cru obligé d'annoncer en 1999 qu'il éviterait tout produit génétiquement modifié dans ses petits pots; le géant des pommes de terre frites Frito-Lay a annoncé aux agriculteurs de l'Illinois qui l'alimentaient qu'il n'accepterait désormais plus de pommes de terre modifiées génétiquement; enfin, des agriculteurs qui avaient utilisé en 1999 des graines génétiquement modifiées ont annoncé cet automne qu'ils renonceraient à en planter en 2000, les protestations devenant un peu trop vives à leur goût.

Certains de ces agriculteurs avaient commencé à utiliser de telles graines en... 1995.

Non sans raison : ces graines se sont révélées de loin plus efficaces et plus rentables que les graines " normales ". Par exemple, une plante à laquelle on a greffé un gène qui la rend invulnérable à un type d'insecte entraîne des coûts de production beaucoup moins élevés... Et devrait en théorie faire le bonheur des écologistes, puisqu'on n'a plus besoin d'insecticides...

Recherche et rédaction: Pascal Lapointe

 

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