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J’ai souvent remarqué que les jeunes journalistes qui n’ont pas étudié en science, ainsi que les journalistes chevronnés qui n’ont jamais couvert la science, souffrent du même complexe d’infériorité : ils se croient ignorants. Or, certaines des erreurs les plus courantes des médias ne sont pas le résultat d’un déficit de connaissances, mais plutôt de ce réflexe journalistique consistant à toujours chercher « un pour » et « un contre ».

J’aurai l’occasion d’y revenir dans ce blogue, parce que c’est une réalité qui étonne, par exemple, les adeptes des joutes politiques. En général, ce sont des journalistes scientifiques qui font ainsi la leçon à leurs collègues, mais le mois dernier, en préparant ce texte sur le décès du climatologue américain Stephen H. Schneider, je suis tombé sur un essai qu’il avait pondu en 2002, à l’intention de ses collègues scientifiques. Schneider n’était pas seulement un excellent vulgarisateur : il avait compris comment fonctionnent —parfois en bien, parfois en mal— les médias.

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En couvrant la politique, les affaires légales ou d’autres histoires dominées par un lobby, il est naturel et approprié pour les journalistes honnêtes de rapporter « les deux côtés de la médaille ».

En science, c’est différent. Il y a rarement deux côtés diamétralement opposés, mais plutôt un spectre de possibilités, souvent accompagné par un historique des évaluations scientifiques de la crédibilité relative de ces nombreuses possibilités. Un climatologue qui fait face à un journaliste enfermé dans le carcan « il faut trouver les deux côtés de la médaille » risque de retrouver sa position enfoncée de force dans l’une de ces deux boîtes : « nous sommes inquiets » ou « tout ira bien ».

Or, parfois, ces deux boîtes sont trompeuses. Un consensus général, bien établi, peut être présenté comme « égal » aux positions d’une poignée d’extrémistes. Et aux yeux du profane, chaque position semblera tout autant crédible. Tout scientifique qui s’aventure dans l’arène politique et croit naïvement que des déclarations « équilibrées » sont ce que chacun des deux côtés recherche (ou comprend) a intérêt à apprendre rapidement comment le système de lobbys fonctionne.

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