Depuis deux décennies, les chercheurs canadiens, à l’instar de leurs célèbres prédécesseurs, continuent de se démarquer dans la révolution des cellules souches. Deux d’entre eux, Samuel Weiss et John Dick, ont particulièrement contribué à ouvrir la voie à une toute nouvelle génération.

Au début des années 1990, un premier chercheur canadien s’illustre : alors qu’on croyait que les cellules du cerveau ne pouvaient se régénérer, Samuel Weiss, neurobiologiste, découvre la présence de cellules souches dans le cerveau d’une souris. Celles-ci ont la capacité de se différencier pour devenir trois principaux types de cellules du système nerveux, notamment les neurones qui produisent et échangent de l’information sous forme d’influx nerveux.

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Cette importante découverte, qui a fait l’objet d’une publication dans Science en mars 1992, démontrait que le cerveau et le système nerveux pouvaient poursuivre leur développement tout au long de la vie d’un individu. Elle a également conduit à de nouvelles approches pour le traitement des maladies neurodégénératives, telles que le parkinson et l’alzheimer, et des lésions du cerveau ou de la moelle épinière; toutes des situations qui entraînent la destruction des cellules du système nerveux, entravant ainsi la transmission de l’information entre le cerveau et le reste du corps.

Pour parvenir à développer des traitements utilisant les cellules souches de notre cerveau, les chercheurs, dont le Dr Weiss, tentent actuellement de comprendre, entre autres, comment indiquer à ces cellules qu’elles doivent entamer leur processus de différenciation pour remplacer les cellules endommagées ou détruites.

Le Dr Samuel Weiss a reçu en 2008 le prix Gairdner, reconnu comme l’un des plus prestigieux au monde dans le domaine biomédical. Il est directeur fondateur du Hotchkiss Brain Institute de l’Université de Calgary.

Deux ans après la découverte du Dr Weiss, dans un tout autre registre, John Dick apporte la première preuve de l’existence de cellules souches cancéreuses. Au cours d’une expérience, il isole une cellule capable d’initier une leucémie chez une souris. Cette découverte est publiée dans Nature en février 1994. Quelques années plus tard, il réussit à identifier des cellules souches cancéreuses dans trois formes de leucémie. Puis, en 2006, lors d’une expérience sur le cancer du colon, il démontre que des cellules souches anormales causent le cancer. L’année suivante, en transplantant des cellules souches de moelle osseuse humaine, il parvient à implanter une leucémie humaine chez une souris. Publiée dans Science en avril 2007, cette expérience a permis d’observer pour la première fois le développement initial et la progression d’un cancer.

Les cellules souches qui causent le cancer sont rares mais elle sont puissantes – une petite quantité est suffisante pour déclencher le développement d’une tumeur – et elles peuvent croître très lentement, échappant ainsi à l’effet des chimiothérapies généralement conçues pour tuer les cellules cancéreuses qui ont une croissance rapide. Cela peut expliquer la résistance ou la récidive de certains cancers. Pour enrayer ces cancers, il faut donc s’attaquer directement aux cellules souches en cause. C’est ce que le Dr Dick a récemment réalisé avec succès : dans une expérience portant sur la leucémie chez des souris, il a utilisé un médicament expérimental contre le cancer pour bloquer l’action d’une protéine nécessaire au développement des cellules souches leucémiques. Ce faisant, il est parvenu à diminuer le nombre de cellules leucémiques chez toutes les souris qui ont reçu le traitement, voire même à les éradiquer chez certaines d’entre-elles. Ces résultats, publiés dans Cell Stem Cell en juillet 2009, laissent entrevoir la possibilité d’une éventuelle application clinique.

Presque vingt ans après avoir démontré l’existence des cellules souches cancéreuses, le Dr John Dick est aujourd’hui considéré comme un pionnier dans ce domaine de recherche. Il est actuellement titulaire de la Chaire de recherche du Canada en biologie des cellules embryonnaires et chercheur principal au University Health Network de l'Université de Toronto.

À l’image de leur sujet d’étude, les scientifiques canadiens de la recherche sur les cellules souches semblent avoir la capacité de produire des descendants qui se différencient : à la source de ce champ de recherche, les travaux de James Till et d’Ernest McCulloch ont influencé un certain nombre de chercheurs comme Samuel Weiss et John Dick qui à leur tour ont contribué, via les nouvelles portes qu’ils ont ouvertes, à produire de jeunes chercheurs de plus en plus spécialisés. Ces derniers offriront dès le début du troisième millénaire une pluie de découvertes.

Julie D.

Ce billet a été écrit dans le cadre d'un travail d'équipe pour le cours RED2301 - Problèmes de vulgarisation, donné par Pascal Lapointe, à l'Université de Montréal à la session d'hiver 2011.

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