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Vieille histoire de commotion cérébrale. Un temps, souhaitons-le, désormais révolu.

Thomas Duchaine thomas.duchaine.1@ulaval.ca

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C’était un beau dimanche d’automne, comme il y en a quelques fois. Lumière plus blafarde, mais toujours chaude, terre encore meuble, gazon filant sur le jaune. J’avais 16 ans, mais déjà plus toutes mes dents, mais ça c’est une autre histoire…

Excitation au menu, je jouais un match de football ce jour là. Le dernier de la saison. Du haut de mes 115 livres, ce qui était inférieur au poids réglementaire, j’étais un fier demi-défensif pour les Alérions du Petit-Séminaire de Québec, catégorie juvénile AA. Notre équipe manquait de joueurs et ce fut une saison de misère, mais nous étions fiers malgré tout. Nos vestes rouge et or, ornées de l’alérion mythique, nous permettaient, victoire ou non, de faire un effet particulier à une certaine gente féminine. Consolation significative quand on est en cinquième secondaire…

Donc, nous avions rendez-vous sur les Plaines d’Abraham pour affronter nos adversaires, dont j’ai oublié l’identité. Le match se déroulait mal, à l’image de la saison, et nos joueurs étaient surtaxés. Certains devaient mêmes jouer à l’offensive, à la défensive et sur les unités spéciales. Bref, ils ne quittaient jamais le terrain. Ceux qui connaissent le football savent à quel point une telle commande était lourde.

Mais, nous étions fiers, et les blessures c’était pour les autres. C’était une époque où parmi tous les jeux héroïques possibles sur le terrain, un, en particulier, était apprécié des pairs: le casque à casque, ou «cass» à «cass» dans le jargon adolescent du temps. Malgré, l’enseignement des techniques de plaqué par les entraîneurs, nous recherchions l’effet destructeur, et du même souffle, le regard admiratif de nos coéquipiers.

Je n’y échappais pas, et ce jour là, j’eue une occasion en or de me faire remarquer. Nous venions de dégager notre zone et le joueur adverse avait choisi mon côté du terrain pour retourner le botté. Adrénaline au plancher, il défaisait tous les plaqués sur son passage. Mon élan était pris, le sien aussi, et arrivé à sa hauteur, en plein devant notre banc, casque en premier, visant le sien, je plongeai. Courant électrique dans tout le corps et puis, plus rien. Je me réveillai au sol, sonné, pour réaliser que quelques secondes seulement s’étaient écoulées. Rentré au banc, j’ai reçu des félicitations pour mon solide plaqué, le jeu avait réussi, le joueur adverse avait été stoppé.

Notre attaque ayant été limitée à quelques verges sur le jeu suivant, nous devions dégager, et j’étais de retour sur le terrain. J’étais fier, j’étais un Alérion. Mais, au premier contact physique, je senti de nouveau de l’électricité sortir de mon crâne et passer dans mon corps. Je rentrai au banc, demandant à être remplacé. J’ai dû expliquer à mes entraineurs que je ne me sentais pas bien et personne n’insistât pour que je retourne au jeu. On avait vu le coup, on savait que ça avait cogné dur.

À cette époque, les commotions cérébrales étaient méconnues et je n’en veux pas à personne. J’ai eu la chance que ça se produise à mon dernier match en «carrière», et depuis ça ne s’est jamais reproduit. Des séquelles? Possible, mais comment lier les maux d'un corps de 37 ans à un événement si lointain? Je n'ai d'ailleurs réalisé ce qu'était une commotion cérébrale que bien des années plus tard.

La science a bien progressé sur le sujet depuis ce temps et aujourd’hui, des premiers gestes sont posés pour que les jeunes soient conscientisés et mieux protégés. Il faut (encore) souligner le travail de l'émission Enquête, dont le reportage, diffusé le 30 janvier dernier, a fait réagir la population. À tel point, que le gouvernement a annoncé le lendemain, qu'il formait un comité de travail pour étudier la question et faire des recommandations dans les 6 mois.

Pour ma part, j'ai une recommandation spéciale à faire: les jeunes le «cass» à «cass», ce n'est pas cool!

Pour en savoir plus, consultez l'excellent dossier de Radio-Canada: Commotions, jeune cerveaux en péril.

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