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Dans une récente étude intitulée « Attention decay in science », des chercheurs finnois et américains s'inquiètent de la tendance à l’obsolescence rapide de la connaissance dans le milieu scientifique.

Pour en arriver à cette conclusion, l'équipe a utilisé le contenu de la banque de données Web of Science . Ce service de l’entreprise Thomson Reuters calcule le «facteur d’impact» de chaque étude, c’est-à-dire le nombre de fois qu’elle a été citée par d’autres auteurs. En analysant plusieurs millions d’articles savants, l’équipe de recherche a constaté un déclin croissant de l’attention des scientifiques envers leur propre champ de recherche. Constamment confrontés à de nouvelles données, parfois contradictoires, les chercheurs ne savent plus où donner de la tête.

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« Nous avons découvert que cela était dû à la croissance exponentielle du nombre de publications scientifiques. Inévitablement, [le phénomène] accélère le roulement des études en raison de la capacité limitée des chercheurs à se tenir informés de la littérature scientifique », peut-on lire en conclusion.

Selon eux, le Web est donc venu bousculer le cycle de vie des recherches scientifiques. Désormais, lorsqu’une nouvelle étude est publiée, son taux de citation augmente pour atteindre un sommet en quelques années. Par la suite, ce même taux chute à toute vitesse. «Ce déclin devient de plus en plus rapide au fil des années, signalant que, de nos jours, les études sont oubliées plus rapidement », expliquent-ils.

Un impact loin d’être unanime

Les auteurs de cette étude écorchent au passage l’importance accordée à l’indice de facteur d’impact. Pour eux, la réputation des chercheurs est désormais basée sur une forme «d’économie de l’attention.» Ce ne sont d’ailleurs pas les premiers à critiquer ce système. En mars 2014, une étude d’Arturo Casadevall, du Collège de médecine Albert Einstein à New York, en arrivait à des conclusions beaucoup plus sévères. Selon lui, les scientifiques sont trop souvent atteints par une «épidémie de folie » qui est liée à leur désir d’être cités le plus souvent possible.

« Ils associent la valeur de leurs recherches au journal au sein duquel ce travail est publié, plutôt que dans le contenu même de ce travail. Cette folie cause des distorsions profondes dans la manière dont se pratique la science.» — Arturo Casadevall

Dans sa recherche, M. Casadevall supporte les recommandations émises par la «Déclaration de San Francisco sur l’évaluation de la recherche» (DORA). Lancée en décembre 2012, l’initiative visait à lutter contre l’utilisation du facteur d’impact dans l’évaluation du travail individuel d’un scientifique. Les signataires réclament ainsi l’abandon de cet indice dans les processus d’embauche et de promotion des chercheurs, ainsi que dans les décisions entourant le financement de la recherche. Deux ans après son lancement, la DORA compte désormais plus de 12 300 signatures et elle obtient l’appui de 572 organisations scientifiques aux quatre coins du monde.

Louis-Philippe B.

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