On
nen a
plus entendu
parler depuis
lan dernier,
alors que le
président
sud-africain
Thabo Mbeki
avait
cette attitude
face au sida
et aux médicaments
éprouvés,
comme lAZT,
chose qui avait
scandalisé
les participants
à la
conférence
internationale
sur le sida,
qui avait lieu,
justement, en
Afrique du Sud,
à Durban.
Mais la situation
na aucunement
évolué
depuis :
les autorités
ne croient toujours
pas à
lefficacité
des médicaments,
et refusent
en conséquence
de les financer,
même pour
les femmes enceintes.
Pour ajouter
linsulte
à linjure,
les autorités
freinent aussi
lutilisation
des médicaments
génériques
ces "copies",
moins coûteuses,
des médicaments
officiels, à
propos desquelles
lAfrique
du Sud a pourtant
remporté
une victoire
éclatante
devant les tribunaux,
en avril,
face à
39 multinationales
pharmaceutiques.
"La
distribution
dantirétroviraux
(les médicaments
anti-sida dont
lefficacité
nest plus
à démontrer,
dans les pays
du Nord) serait
une perte de
temps et dargent
pour le pays",
affirme sans
rire Sam Mhlongo,
professeur de
médecine
et membre du
comité
dexperts
formé
par le président
Mbeki sur
le sida un
comité
dexperts
dont la composition
avait été
dénoncée
à lépoque,
puisquil
accordait une
place prépondérante
à des
scientifiques
dont on connaissait
déjà
les positions:
non, le virus
VIH et le sida
ne sont pas
liés,
affirmaient-ils
d'emblée;
quant aux médicaments
comme lAZT,
ils sont trop
toxiques et
font donc plus
de mal que de
bien.
Résultat:
laccès
aux traitements
existants, rapporte
Libération,
est toujours
aussi limité.
Certes, les
prix ont baissé
depuis deux
ans, mais ils
demeurent encore
inabordables
pour limmense
majorité
de la population.
On estime à
4,8 millions
le nombre de
Sud-africains
contaminés
par le VIH...
soit plus de
10% de la population.
Et
encore, lAfrique
du Sud est-elle
un pays qui
appartient à
la catégorie
des "riches".
Dans le reste
de lAfrique
noire, lattitude
des gouvernements
est souvent
tout aussi déphasée:
en Côte
dIvoire,
au temps dHouphouët-Boigny,
le sida n'existait
tout simplement
pas; à
sa mort, on
a appris que
ce pays était
le plus atteint
dAfrique
de lOuest!
Au Gabon, Omar
Bongo a un jour
lié sodomie
et sida, ajoutant
quil sagissait
dune "perversion"
des Blancs.
En juillet,
au Kenya, Daniel
Arap Moi a demandé
à ses
concitoyens
de s'abstenir
de relations
sexuelles pendant
deux ans. Importer
des condoms?
Vous ny
pensez pas!
"En tant
que Président,
cela me gêne
de devoir dépenser
des millions
de shillings
à importer
ces choses-là."
Aucun
de ces chefs
dÉtat
nétait
présent
à la
conférence
des Nations
Unies sur le
sida, à
New York, en
juin dernier,
et le président
sud-africain
était
ostensiblement
absent de celle,
pan-africaine,
de Ouagadougou
(Haute-Volta),
plus tôt
ce mois-ci.
Il
y en a tout
de même
quelques-uns
qui se mouillent.
Non seulement
le président
du Burkina Faso,
Blaise Compaoré,
a-t-il prononcé
le discours
douverture
lors de la conférence
de Ouagadougou,
mais il accorde
des entrevues
où
il plaide pour
un accès
universel aux
médicaments
anti-sida.
Et surtout,
il a accepté
dêtre
photographié,
sur une affiche,
avec une sidéenne,
dans le cadre
dune campagne
déducation
sur le sida.
Lancien
président
de la Zambie,
Kenneth Kaunda,
appelle pour
sa part à
une "guerre"
contre le sida
il faut
dire quil
y a perdu un
fils, en 1986.
Le sida accentue
la pauvreté
Pour
ceux qui en
douteraient,
une étude
de lONU
vient de souligner
que cette
épidémie
constitue un
"accélérateur
de la pauvreté"
en Afrique:
elle est devenue
le "principal
facteur de destruction"
de tout progrès
économique
qui tente de
relever la tête.
A moins dun
virage majeur,
le sida se traduira
par une baisse
de croissance
de 1% par an
dans la majorité
des pays touchés,
et une régression
du PIB par habitant
de 10% dici
2010. Pour les
pires parmi
les pires, le
Botwana et le
Zimbabwé,
létude,
chapeautée
par le PNUD
(Programme des
Nations Unies
pour le développement)
évalue
quils
sont dores
et déjà
revenus de 40
ans en arrière:
non seulement
léconomie
recule-t-elle,
mais léducation
aussi, ce qui,
à long
terme, est encore
plus désastreux.
Cest
que lépidémie
tue en grand
nombre le personnel
enseignant:
"860 000
enfants ont
perdu leur enseignant
à cause
du sida",
en Afrique subsaharienne,
selon lauteur
de létude,
léconomiste
français
Luc-Joël
Grégoire.
La proportion
denfants
qui ne terminent
pas leur primaire
pourrait grimper
de 31% en 2000
à 37%
en 2010.
Au
Malawi et au
Swaziland, lespérance
de vie a chuté
sous les 40
ans. Dans lAfrique
en général,
lespérance
de vie moyenne
était
de 53 ans en
1985. Elle est
aujourdhui
de 47 ans et
demi. Et ça
continue...
Le
PNUD, diplomate,
évite
de jeter la
pierre aux dirigeants
politiques bornés.
Certes, souligne-t-il,
les programmes
nationaux prennent
rarement en
compte le problème:
absence de soutien
aux malades,
aux familles,
même aux
orphelins du
sida, absence
des indispensables
programmes de
prévention,
sauf sous la
forme de voeux
pieux. Mais
personne nest
pointé
du doigt dans
le rapport:
"il y a
des responsabilités
individuelles,
admet à
Libération
Luc-Joël
Grégoire.
Mais linformation
ne remonte pas
jusquà
eux."
Le
gouvernement
sud-africain
choque à
ce point une
importante frange
de ses concitoyens
quil a
fallu en passer
par les tribunaux.
Vendredi, le
14 décembre,
la
Haute cour de
Prétoria
donnait raison
à un
groupe de femmes
qui avait intenté
une poursuite
contre le gouvernement:
celui-ci est
tenu de mettre
enfin en branle
le programme
visant à
fournir des
antirétroviraux
(la Névirapine)
à toutes
les femmes enceintes
porteuses du
VIH, afin de
prévenir
la transmission
de la maladie
à lenfant.
Un
traitement médical
dont, là
non plus, lefficacité
nétait
pourtant plus
à démontrer,
mais que le
gouvernement
sud-africain
avait refusé,
depuis deux
ans, de financer,
au grand désarroi
des médecins.
Une coalition
de groupes de
pression femmes,
sidéens,
auxquels se
sont associés
200 médecins-
avait donc déposé
cette poursuite
en août.
Le juge Chris
Botha a tranché
en leur faveur,
et donné
jusquau
31 mars au gouvernement
pour lui présenter
un rapport sur
ce quil
aura fait à
compter daujourdhui.
Et
la victoire
du mois d'avril
face aux multinationales
pharmaceutiques
a tout de même
eu des effets:
Aspen Pharmacare,
compagnie sud-africaine,
a obtenu lautorisation
de fabriquer
ces fameuses
copies de trois
antirétroviraux,
dont lAZT.
Ils devraient
être vendu
en mai 2002:
un dollar par
jour et par
patient soit
au moins 20
fois moins cher
que les moins
chers des traitements
"officiels".
Reste à
voir si cet
argument suffira
à convaincre
le gouvernement
de Thabo Mbeki
den acheter...