Rencontre dans l'espace de deux David et d'un
Goliath
(ASP) - Deux engins spatiaux en même
temps à proximité de Jupiter, cela nétait
encore jamais arrivé. Cest ce qui sest
produit en janvier 2001, et la masse de données
récoltées sur le gigantesque champ magnétique
de cette gigantesque planète commence tout juste
à faire des petits.
Pas moins de sept articles dans la dernière
édition de la revue Nature, ce qui témoigne
de lampleur du travail. Cest que Jupiter,
en plus dêtre la plus grosse planète
de notre système solaire, possède aussi
le plus gros champ magnétique; sa magnétosphère,
cest-à-dire la "bulle magnétique"
qui entoure cette planète, fait environ 20 fois
le diamètre de notre Soleil. Et quand on sait
que notre Soleil fait déjà plus dun
million de kilomètres de diamètre, on
comprend pourquoi la magnétosphère de
Jupiter est appelée le plus gros "objet"
de notre système solaire.
Même Stanley Kubrick navait
pas rêvé cela en produisant son opus 2001,
lodyssée de lespace: le 9 janvier
2001, deux engins spatiaux, Galileo, déjà
en orbite autour de Jupiter, et Cassini-Huygens, passant
par là en route vers Saturne, se rencontraient,
dans la banlieue de Jupiter, pour étudier non
pas un monolithe noir, mais les mystérieuses
forces émanant de cette planète. Leurs
observations furent complétées par celles
du télescope spatial Hubble et de lobservatoire
à rayons-X Chandra, lui aussi dans lespace.
Une magnétosphère nest
en réalité rien de plus quun nuage
de particules chargées électriquement
et de lignes de forces magnétiques. Elle a davantage
la forme dune comète que dune bulle.
Et si elle a cette forme, cest parce quelle
est constamment déformée par une autre
mystérieuse force, émanant, celle-là,
du Soleil : dautres particules chargées
électriquement, "soufflées"
par le Soleil doù le surnom de vent
solaire- entrent en collision avec celles de Jupiter,
et déforment ainsi la bulle avec une queue
qui sétire en fonction de ce vent. Par
chance, Cassini sest pointé juste au moment
où un tel flot de vent solaire arrivait dans
les parages de Jupiter.
Sur Terre, ce genre de collision se traduit
par des perturbations dans les communications radio
mais surtout, par un phénomène visible:
les aurores boréales. Une des études de
Nature porte précisément sur les
aurores boréales de Jupiter.
Car la Terre a elle aussi, bien sûr,
champ magnétique et magnétosphère,
et mieux comprendre les comportements de leurs homologues
devrait aider à comprendre ce qui se passe autour
de chez nous: on sait depuis quelques décennies
que la technologie humaine lignes à haute
tension et satellites- est particulièrement vulnérable
à un flot trop élevé de vent solaire.
Et un tel flot trop élevé se produit tous
les 11 ans, en fonction des cycles solaires qui, sils
sont bien mesurés, restent encore très
peu compris.