
Le 30 juin 2005

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SAO PAULO (Agence Science-Presse) - Nous sommes
à Estação Ciência (gare
de la science, en portugais), un centre de sciences construit
dans une gare de São Paulo. Il est 13h30. Dans quelques
instants les tourniquets laisseront passer gratuitement
une cinquantaine de jeunes de 17 ans et moins, pressés
de sinstaller dans une salle garnie dune vingtaine
dordinateurs dernier cri, de caméras, de livres,
de bédés et d'une douzaine déducateurs.
Un exploit quand on sait que la plupart de
ces enfants... ne peuvent même pas coucher sur un
matelas pendant la nuit.

photo: Luis Eduardo Araœjo
Cette contradiction doit être assumée
chaque jour, non sans frustration, par léquipe
du projet Clicar (cliquer, en portugais). Selon léducateur
Luis Eduardo, le travail avec des enfants de la rue devient
frustrant lorsquon se rend compte quon ne peut
répondre à leurs besoins immédiats
à court terme. " Plusieurs arrivent ici
avec des problèmes graves : agression de la
part des parents, agression policière, violence sexuelle,
grossesse pendant ladolescence, voire pendant lenfance"...
Luis Eduardo, qui a lui-même vécu
une bonne partie de son enfance dans les rues de São
Paulo, est devenu éducateur à Clicar
en 2000.
Estação Ciência
est attaché à lUniversité de
São Paulo et subventionné en grande partie
par lÉtat. Ce musée interactif est devenu
depuis peu payant, au grand mécontentement de la
communauté étudiante, des syndicats et de
certains groupes communautaires. " Laccès
à la culture nest pas un privilège;
cest un droit prévu par la Constitution brésilienne ",
conclut un communiqué. Résultat, à
13h30, avant l'arrivée des enfants, on ne voit presque
personne dans le musée qui recevait environ 25 000
visiteurs mensuels au temps de sa gratuité.
Éducation scientifique et conscience sociale
En 1996, quand Luis Eduardo a commencé
à participer, à 13 ans, à ce projet
qui venait dêtre créé par la nutritionniste
Dirce Pranzetti et la professeure déducation
physique Cecília Toloza, Clicar ne comptait
que sur deux ordinateurs et deux éducatrices.
Lidée de consacrer une partie
du musée aux enfants à risque est venue du
physicien Ernst Wolfgang Hamburger, alors directeur du centre
des sciences. En constatant que la gratuité du musée
attirait aussi des enfants de la rue, le professeur Hamburger
a fait appel à Pranzetti et Toloza, fondatrices d'une
ONG d'intervention auprès des enfants.
Avec le soutien de la compagnie pétrolière
nationale, Petrobrás, léquipe a réussi
à engager dautres éducateurs et à
offrir plus de ressources informatiques, devenant, en peu
de temps, une référence en matière
déducation scientifique pour un public défavorisé.
En janvier 2001, le prestigieux Prix Kalinga
de vulgarisation scientifique de l'UNESCO a été
remis à Hamburger, confirmant lévolution
de Clicar qui a réussi à tenir bon
depuis 1996, et des quelque 1000 enfants qui y ont participé.
Aujourdhui, léquipe développe
des projets en partenariat avec des chercheurs à
létranger, notamment de lUniversité
de Berkeley en Californie.
" Noublions pas que le rôle
des scientifiques est aussi de montrer que les enfants de
la rue ont besoin de beaucoup plus que de la charité",
commente Luis Eduardo. Pour Douglas Rocha, 17 ans, le projet
représente un changement crucial dans sa vie, puisquil
ne se borne pas à offrir des outils technologiques:
il a stimulé le dialogue et la curiosité.
" Concrètement, jai commencé à
mieux écrire, jai appris à concevoir
des sites Internet, à manipuler des caméras
numériques".
Débora Pinheiro
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