
Le 7 février 2006

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La politique dans la lune
(Agence Science-Presse) - Politique et science
ne font pas toujours bon ménage. La NASA lapprend
à ses dépens. Le " Projet pour lexploration
de lespace " de George Bush met en péril
de nombreuses recherches scientifiques sans être pour
autant une alternative satisfaisante.
En janvier 2004, le président américain
annonçait sa volonté de réorienter
les plans de la NASA pour privilégier une nouvelle
mission : létablissement dune base
sur la Lune pour 2020 qui servirait détape
à une mission humaine sur Mars.
Mais, faute dun budget adéquat,
ce nouveau projet oblige la NASA à mettre tout le
reste entre parenthèses. Le problème se posait
déjà depuis lannonce du projet, mais
la proposition de budget 2007 déposée
devant le Congrès lundi par le président Bush
confirme les craintes. Compte tenu des coûts de la
guerre en Irak et des dégâts occasionnés
par louragan Katrina, laugmentation des fonds
est limitée : 16,8 milliards de dollars, soit
3,2% de plus quen 2006. En conséquence, l'administrateur
de la NASA, Michael Griffin, a dû revoir ses objectifs
à la baisse.
Cest surtout la recherche scientifique
qui pâtit : son budget sera de 5,3 milliards,
soit seulement 1,5% de plus quen 2006 et laugmentation
pour les années à venir ne pourra pas dépasser
1%. Doù lannulation ou le report de nombreux
projets, comme la recherche de planètes semblables
à la Terre ou une mission pour létude
des trous noirs, annulation qui soulève bien des
critiques. Louis Friedman, directeur de la Planetary
Society en Californie déclare ainsi au New
Scientist quil décrirait presque lagence
comme une" NASA anti-science ".
La station spatiale internationale, ce projet
que mène la NASA depuis 20 ans, sera complétée,
grâce aux navettes. Mais il en coûtera de 3
à 5 milliards de plus que prévu pour poursuivre
de façon sécuritaire les vols des navettes
jusqu'à leurs retraites, en 2010.
Et comme ce minimum suppose de supprimer les
projets de recherche dans la station spatiale internationale,
certains sinterrogent sur lutilité dun
laboratoire qui ne fait pas dexpériences, comme
la Fédération internationale des techniciens
et ingénieurs, qui propose de résoudre les
problèmes financiers de la NASA en arrêtant
dès maintenant les navettes.
Le plus paradoxal est que le projet de George
Bush pourrait bien ne pas aboutir." Aux États-Unis,
les nouveaux programmes ont un taux de mortalité
infantile très élevé ",
explique au New Scientist Howard McCurdy, historien
de la politique spatiale à lUniversité
américaine de Washington DC. En effet, après
les présidentielles de 2008, le successeur de George
Bush pourrait bien ne pas soutenir la nouvelle orientation
de la NASA.
Le risque est dautant plus grand que
faute de moyens, le projet est encore mal ficelé.
" Pour le projet Apollo, ajoute McCurdy,
le facteur contraignant était lagenda... Cest
linverse pour le Projet pour lexploration de
lespace. Tout est contraint pour coller au budget. "
Et le budget a longtemps été incertain :
la loi de décembre 2005 qui reprend le projet de
Bush ne garantissait aucun fonds.
Il a fallu attendre lundi pour les certitudes.
La partie du budget qui couvre ce projet augmente de 76%, jusquà
un peu plus de 3 milliards de dollars. Cela pourra financer
la construction du nouveau véhicule dexploration,
le CEV (crew exploration vehicle) et une mission
pour la Lune. Mais les missions suivantes vers la Lune ou
même vers Mars ne sont pas envisagées, laissant
encore beaucoup dincertitudes sur le devenir à
long terme du projet.
De plus, certains contestent même le
principe dune mission humaine sur Mars, jugeant les
robots moins coûteux et aussi efficaces. Comme le
souligne McCurdy, " Griffin a encore deux ou
trois ans pour ancrer son projet assez solidement pour quil
ne puisse pas être arraché par le prochain
gouvernement. " Sinon la NASA aura perdu son
temps et son argent dans un projet qui naboutira pas.
Mélody Enguix
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